Organisées depuis 1972, les conférences internationales sur l'environnement et le développement font du surplace. Convoqué par l'ONU pour la deuxième fois en dix ans, le Sommet de la Terre, réuni actuellement à Johannesburg en Afrique du Sud, se veut théoriquement une autre opportunité de prise de conscience des habitants de la Planète bleue quant aux dangers qui se dressent sur le chemin de l'évolution de l'espèce humaine en termes de développement économique et social. Consacré cette fois au développement durable et à la dégradation continue de l'environnement terrestre, le Sommet n'en est pas moins un forum idéal pour tous ceux qui luttent pour un monde plus juste sinon meilleur sur Terre. C'est que ce développement durable, thème officiel du sommet, cherche à concilier activités humaines et environnement afin de permettre à l'humanité de «durer» tout en évoluant vers plus de prospérité. Il remet en cause donc, contrairement aux tenants de l'ultralibéralisme, le mode de production et de consommation occidental, qui, en faisant école dans les pays du Sud, menace, selon les très développés pays du Nord, l'équilibre de la planète. Au vu de cette apparente insoluble contradiction, les premiers responsables de la dégradation de l'environnement mondiale sont les pays occidentaux et leur chef de file les Etats-Unis qui consomment à, eux seuls, la quasi-totalité des richesses de la planète et donc polluent l'atmosphère dans les mêmes proportions. Et, à l'occasion de ce sommet de Johannesburg, les mêmes griefs sont reprochés à ces mêmes pays quant à la déréglementation continue du climat de la planète ces dernières années et de ses conséquences: les catastrophes dites naturelles avec leur lot de victimes et de dégâts matériels. S'agissant maintenant du développement économique à l'occidentale, il n'est pas, lui non plus, épargné par les critiques virulentes, mais très solides des pays du tiers-monde et des ONG. C'est ainsi que, dès l'ouverture du Sommet, les subventions accordées par les pays du Nord, notamment à leurs agriculteurs, sont apparues comme l'un des sujets les plus brûlants de la conférence. Les pays du Sud soulignent que les pays riches, chantres de la libéralisation et des privatisations, accordent paradoxalement, six fois plus de subventions à leur agriculture que d'aide publique au développement (311 et 55 milliards de dollars en 2001). Ils accusent le Nord de bloquer leur décollage économique en «ruinant» leurs agriculteurs qui ne peuvent ni exporter leurs produits dans les pays industrialisés ni encore moins vendre chez eux, en raison de la concurrence de marchandises importées à bas prix et ce, sans parler des autres mesures de protectionnisme douanier, déguisées ou ouvertement décrétées par les pays occidentaux. Un exemple: l'arrêt des subventions aux producteurs de coton américains se traduirait par un revenu supplémentaire de 250 millions de dollars par an pour les agriculteurs africains selon une étude de la Banque mondiale sur cette question. Autrement dit, la politique agricole suivie dans le Nord, tant en Europe qu'aux Etats-Unis, affame des millions de personnes dans le Sud. Idem pour le dossier fort controversé des Organismes génétiquement modifiés (OGM) qui a surgi dès les premières heures du Sommet et où les organisations écologistes ont accusé les Etats-Unis de vouloir profiter des négociations en cours pour vendre leurs OGM sur l'ensemble des marchés de la planète. Les ONG présentes en force à Johannesburg où elles comptent contrer tous les aspects négatifs du Sommet, ne cachent plus leur crainte de voir les Etats-Unis et leurs multinationales dont les profits dépassent les budgets de certains Etats du Sud, détourner la conférence à leur profit, par le biais d'un «marchandage» secret avec l'Union européenne pour résoudre les questions d'aide au développement et de commerce, l'un des domaines les plus importants du plan d'action qui doit être adopté à l'occasion de ce Sommet. L'absence remarquée du président américain, conjuguée à l'unilatéralisme de la politique de Washington en matière de sauvegarde écologique de la planète (refus de signer le protocole de Kyoto), a ravivé les craintes que la conférence ne débouche que sur des recommandations sans lendemains. En fait, comme l'ont qualifié les représentants des peuples indigènes de par le monde, (5000 peuples et 350 millions de personnes à travers le monde) présents à Johannesburg, ce sommet est plus proche de «l'avidité durable» que d'une vision honnête de développement équitable et équilibré pour tous. Et, dans ces conditions, l'avenir de la Terre et de ses habitants ne sera que compromis.