Ce film, projeté samedi dernier à la veille de la clôture de la Semaine du film turc à Alger, est un procès fait à une société traditionaliste, «archaïque» et «hypocrite». Dans certains villages en Turquie, il ne fait pas vraiment bon vivre quand on est une femme. Viols, humiliations, crimes d'honneur et mariages forcés sont le lot quotidien des paysannes en quête de bonheur et de liberté. Mutluluk ou Le Bonheur, le film de Abdullah Oguz relate justement le martyr enduré par une adolescente de 17 ans, Meryem (Ozgü Namal), qui habite dans un village au sud-est de la Turquie. Après avoir été violée au bord d'un lac, elle sera condamnée à mort par sa famille, et ce conformément aux traditions archaïques toujours en vigueur dans certaines régions du pays. On lui donne une corde pour se pendre. Mais Meryem refuse de se plier. Elle choisit de vivre et donc de s'enfuir, de partir ailleurs en espérant se construire une nouvelle vie. Ce n'est pas pour autant qu'elle sera épargnée. En effet, voulant à tout prix la tuer pour soi-disant laver l'honneur de leur famille, son oncle ordonne à Cemal (son fils qui vit à Istanbul) de partir à la recherche de la jeune fille et de l'abattre. Même après l'avoir retrouvée, Cemal sera dans l'impossibilité d'exécuter les ordres de son père. En proie à de nombreuses hésitations, il décide finalement de s'enfuir avec elle. C'est au cours de cette aventure que les deux jeunes gens feront la rencontre d'Irfan, un professeur à l'université d'Istanbul. Déterminé à changer de vie et à quitter le milieu mondain auquel il appartenait, ce quinquagénaire se lance avec Meryem et Cemal dans un voyage sur les côtes de la mer Egée. Le film de Oguz est la quête de bonheur de ces trois personnages. Iniques mais surtout absurdes sont ces traditions qui condamnent et méprisent la victime plutôt que de juger le bourreau. C'est l'absurdité de ces lois de société que Abdullah Oguz, le metteur en scène, a voulu reconstituer à travers l'histoire de la jeune Meryem. Le Bonheur est l'un des meilleurs films présentés au cours de la Semaine du film turc à Alger. Une oeuvre époustouflante qui nous donne un aperçu du cinéma turc qu'il faut absolument découvrir. Sortie en 2007, cette oeuvre a obtenu plusieurs prix dont le «Prix des droits de l'homme» par le Conseil de l'Europe.