Les forces de sécurité sont de plus en plus visibles à Khartoum, où les rumeurs circulent à vitesse grand V poussant des habitants à quitter la ville. Les forces de sécurité soudanaises, les Casques bleus, les organisations internationales et la population accroissent les mesures de sécurité en vue des premières élections multipartites en 24 ans au Soudan, un pays marqué par un lourd héritage de guerre. Stocker de la nourriture, faire le plein d'essence, s'assurer d'un éclairage d'appoint: les ambassades de la capitale soudanaise ont conseillé des «mesures de précautions» à leur ressortissants en cas de manifestations qui émailleraient les élections soudanaises qui débutent demain. «Nous avons prévu plus de 100.000 policiers pour surveiller les élections (dans le Nord-Soudan)», a affirmé cette semaine le général Mohammed Ahmed Ali, responsable de la sécurité pour les élections. Les forces de sécurité sont de plus en plus visibles à Khartoum, où les rumeurs circulent à vitesse grand V poussant des habitants à quitter la ville. «Au cours des trois derniers jours, les mouvements pour sortir de Khartoum ont beaucoup augmenté», assure Youssif Dufaalla, chef d'une société de transport, indiquant que le nombre de cars en circulation est passé de 20 à 50 depuis mercredi. «Je crains beaucoup de troubles», affirme Moutawakil Hassan Sharif, un étudiant de 27 ans, qui va quitter Khartoum le temps des élections. Géant d'Afrique au pied d'argile, le Soudan tient de dimanche à mardi ses premières élections -législatives, régionales et présidentielle- multipartites en près d'un quart de siècle. Plusieurs observateurs redoutent que ce scrutin serve de prétexte à une nouvelle flambée de violence dans un pays qui sort de deux décennies de guerre civile entre Nord-Sud (1983-2005) et encore en proie à un conflit dans la région occidentale du Darfour. Le Sud-Soudan est endeuillé par une montée en flèche des violences tribales et la situation pré-électorale était tendue dans les villes de Bentiu et Malakal, situées à la lisière du nord du pays, et dans l'Etat de Jonglei, selon différents témoignages. «Les Casques bleus vont assurer la sécurité dans des régions où il y a des menaces de confrontations armées», a indiqué Haile Menkerios, représentant spécial du secrétaire général de l'ONU Ban Ki-moon pour le Soudan. L'ONU dispose d'un peu moins de 10.000 soldats et policiers au Sud-Soudan et dans des régions limitrophes. «Nos troupes vont aider à s'assurer que ces conflits ne créent pas une atmosphère qui conduirait les électeurs à ne pas être en mesure d'exercer leur droit de vote», a-t-il affirmé à la presse à Khartoum. Au Darfour, où l'état d'urgence est en vigueur, de violents combats ont eu lieu au cours des derniers mois entre les rebelles et l'armée au Jebel Marra ainsi qu'entre des tribus arabes rivales entre les villes de Kass et Nertiti. Les rebelles du Darfour, opposés aux élections soudanaises, n'ont toutefois pas promis de faire dérailler le scrutin dans cette région en proie à une insécurité endémique. Les observateurs de l'Union européenne ont annoncé mercredi qu'ils se retiraient du Darfour pour des raisons de sécurité. «Nous sommes prêts à toute éventualité», a dit pour sa part le chef des communications de la Mission hybride ONU-Union africaine au Darfour (Minuad). Le Croissant-Rouge soudanais est en état d'alerte à la veille des élections et a déjà mobilisé quelque 15.000 bénévoles dans l'ensemble du pays afin de répondre à des situations d'urgence, a indiqué un responsable.