Les deux compères qui se sont réunis samedi à Camp David, résidence d'été du président américain, sont tombés d'accord pour sonner l'hallali à l'Irak. Bien sûr on ne pouvait en attendre moins de deux des principaux dirigeants de la planète qui, forts de leur écrasante puissance militaire, ont oublié de savoir raison garder. Car les tenants et aboutissants de cette affaire ne sont ni clairs ni effectivement étayés. Bush veut détruire ce qui subsiste encore d'un pays mis depuis plus d'une décennie au ban de l'humanité. Non seulement le président américain veut, quoi qu'il en coûte, porter la guerre en Irak, mais il veut également changer son régime. Du coup, après le Rambo de George Bush père, qui déclencha en janvier 1991 la seconde guerre du Golfe, c'est au fils, George W. de vouloir jouer l'Effaceur, en éliminant Saddam Hussein. Les Bush manquent-ils à ce point d'imagination pour appeler à la rescousse Sylvester Stallone et Arnold Schwarzenegger, plagiant leurs exploits cinématographiques? Cela aurait, sans doute, prêté à rire s'il n'y avait au bout le danger menaçant dans leur vie 25 millions d'Irakiens. Depuis dix ans, Américains et Britanniques, sans aucune couverture légale internationale, du seul droit du plus fort, martyrisent, par des frappes ponctuelles, un peuple livré à leurs basses vindictes. Aujourd'hui, les choses sont devenues plus dramatiques et l'insistance du président américain à soutenir la nécessité de faire la guerre à l'Irak reste incompréhensible, même si l'on admet, par ailleurs, le droit de George W.Bush d'avoir de l'aversion pour Saddam Hussein. Pour autant, cela ne l'autorise pas à menacer un peuple juste pour assouvir sa haine du président irakien. Car, si effectivement les Etats-Unis et la Grande-Bretagne détiennent, comme ils l'affirment, des preuves de l'existence d'armes de destruction massive en Irak, il leur revient de les remettre à l'ONU, à laquelle il appartient, dès lors, conformément à sa Charte et au droit international, de mettre le holà! Toutefois, tout ce bruit fait autour de pseudoarmes chimiques, biologiques, ou nucléaires irakiennes, (tous les experts estiment que l'essentiel de ces armes a été neutralisé entre 1991 et 1995, quoique l'équipe onusienne de l'Unscom, qui a dû quitter l'Irak en 1998, n'ait pu mener sa mission jusqu'au bout) ne doit pas pour autant faire oublier ou minimiser le fait que c'est l'actuel président américain, George W. Bush qui a contribué à relancer la course aux armements prohibés, en abrogeant le traité ABM signé en 1972, par Richard Nixon, avec l'URSS. Au moment où les Etats-Unis se donnent ainsi le droit de se doter des armements les plus meurtriers du troisième millénaire, en poursuivant des recherches dans le domaine des armes spatiales, Washington veut interdire à tous les autres pays ce même droit de se prémunir et de protéger leur sécurité. La campagne américano-britannique contre l'Irak de Saddam Hussein, aurait été crédible si dans le même temps ce duo d'enfer avait mis à l'index, de la même manière, le criminel de guerre israélien Ariel Sharon qui, depuis deux ans a commis d'innombrables crimes contre l'humanité dans les territoires palestiniens occupés. Ceci étant, aucune preuve n'existe quant à la détention par l'Irak d'armes de destruction massive, ce qui n'est pas le cas d'Israël, dont tous les spécialistes occidentaux, et évidemment américains, estiment qu'il dispose d'au moins 200 têtes nucléaires et qu'il a la capacité de produire de telles armes théoriquement prohibées par la communauté internationale. Ainsi, ce que Israël et les Etats-Unis ont le droit de faire pour se défendre, l'Irak, singulièrement, les Etats arabes généralement (cf, les campagnes ponctuelles de la presse américaine et israélienne, notamment, contre les pseudo-recherches nucléaires dans certains pays arabes) n'en ont pas, eux, le droit, et sont encore soumis à une étroite surveillance de la part des Américains et des Israéliens. Sur les cinq pays permanents du Conseil de sécurité de l'ONU, détenteurs du droit de veto, au moins deux d'entre eux, la Russie et la France, auxquelles s'est jointe l'Allemagne, important membre de l'Union européenne, se sont exprimés en refusant clairement toute action contre l'Irak en dehors du cadre de l'ONU, Kofi Annan, secrétaire général de l'ONU a également dit, tout récemment à Paris, son opposition à une attaque contre l'Irak. Passant outre aux appels à la retenue formulés par les pays représentatifs de la communauté internationale et des parties les plus influentes du monde, de même que par le S.G. de l'ONU, Bush et Blair, veulent réunir autour d'eux «la plus large coalition» pour mener leur guerre contre l'Irak, Dans cette affaire il est évident que les Arabes, cinquième roue du carosse, n'ont qu'à se soumettre et à accepter la destruction programmée d'un Etat arabe. De fait, la seule chose attendue des Arabes est de mettre à la disposition des troupes de débarquement américano-britanniques, leurs installations et autres bases aériennes. Ce sont ces mêmes Arabes qui, par leurs investissements, qui se montent en centaines de milliards de dollars, aux Etats-Unis et en Grande-Bretagne, assurent et garantissent la prospérité de ces pays qui, aujourd'hui, poussent à commettre un génocide en Irak. Aussi, la question est de savoir si les Arabes sauront dire non à ce que préparent Bush et Blair, d'autant qu'il ne s'agit pas de défendre Saddam Hussein, mais bien de sauvegarder un peuple otage de la folie d'un dictateur et de la démesure d'un président, auquel la puissance de son pays lui fait perdre quelque peu les pédales.