Des discussions ont lieu à Vienne pour préparer le retour des experts de l'ONU. Au moment où l'ONU tente de mettre au point, avec Bagdad, les conditions du retour des experts onusiens en désarmement en Irak, Washington, peu disposé à donner une chance à la diplomatie, multiplie, a contrario, les pressions sur la communauté internationale pour obtenir un blanc-seing et imposer aux Nations unies sa vision des choses. Cependant, il semble que cela ne soit pas aussi évident que l'espérait Washington, et la communauté internationale est peu encline à s'engager dans l'inconnu d'un nouveau front au Moyen-Orient. D'autant plus que le dossier britannique, voulant prouver le réarmement de l'Irak, présenté la semaine dernière par le Premier ministre, Tony Blair, a été un véritable bide, peu d'analystes ayant donné crédit au rapport de M.Blair. En fait, quand M.Blair affirme que «la volonté de la communauté internationale devrait être respectée» par l'Irak, il faut surtout comprendre la volonté du tandem américano-britannique, le seul, présentement, partisan de frappes militaires contre l'Irak. De fait, pour l'ancien inspecteur de l'ONU chargé du désarmement de l'Irak, Scott Ritter, le dossier «à charge contre Saddam Hussein» du Premier ministre britannique, «ne justifie pas que soit versée une goutte de sang américain, britannique ou irakien». Malgré le scepticisme affiché par la communauté internationale, qui demande de laisser les inspecteurs de l'ONU faire d'abord leur travail, Washington se veut ferme, menaçant même d'y aller seul. Voulant faire les choses dans la légalité internationale, l'ONU, par son représentant Hans Blix, directeur exécutif de la Commission de contrôle, de vérification et d'inspection des Nations unies (Cocovinu), a commencé, lundi à Vienne, au siège de l'Aiea (Agence internationale de l'énergie atomique, dépendant des Nations unies) des discussions avec les Irakiens pour mettre au point les modalités et les «arrangements pratiques» permettant le retour des inspecteurs. L'entrevue de lundi, a permis, selon Hans Blix, de passer «en revue toutes les questions une première fois, hier, et nous devons avoir une seconde lecture aujourd'hui (hier, ndlr)». Ainsi, selon toute hypothèse, les inspecteurs de l'ONU pourront retourner en Irak «vers la troisième semaine d'octobre», comme l'indiquait M Blix. Toutefois, Washington continue à faire pression sur l'ONU, demandant même à ce que les discussions actuelles soient retardées jusqu'à l'adoption, éventuelle, d'une résolution par le Conseil de sécurité, pour voir, affirme le chef de la diplomatie américaine, Colin Powell, «comment les choses évolueront pendant les deux prochaines semaines». Ce qui n'est pas l'avis des inspecteurs onusiens, lesquels, négociant sur la base des résolutions existantes, poursuivent leurs préparatifs. «Le Conseil (de sécurité) m'a demandé de faire un travail, je le fais» s'est contenté de dire Hans Blix le chef des inspecteurs. Plus catégorique, Melissa Fleming, porte-parole de l'AIEA, (agence de l'ONU basée à Vienne) explique: «Nous sommes l'organe technique d'inspection du Conseil de sécurité et nous prendrons nos instructions du Conseil» Aussi, indique-t-elle: «Nous continuerons nos discussions sur la base de notre mandat et nous prendrons bien sûr en compte toute directive du Conseil de sécurité (...) Nous devons poursuivre comme si nous allions y retourner.» Restant donc loin des remous autour de l'éventuelle adoption par le Conseil de sécurité d'une nouvelle résolution (selon des sources diplomatiques proches de l'ONU, les Etats-Unis présenteront aujourd'hui, au Conseil de sécurité, leur projet de résolution, dans lequel ils revendiquent le droit d'une frappe automatique contre l'Irak) les inspecteurs en désarmement se préparent à retourner en Irak à tout moment. Un fait patent cependant, la communauté internationale, avant tout action ou opération militaire en Irak, veut donner toute sa chance à la diplomatie pour trouver une issue à l'impasse irakienne. Même aux Etats-Unis, au sein du Congrès, les avis sont de plus en plus partagés, et plusieurs représentants et sénateurs ont émis des réserves sur la précipitation avec laquelle le président Bush veut engager, selon eux, le pays dans la guerre. Même si les congressistes sont unanimes sur le principe d'une frappe contre l'Irak, beaucoup exigent que cela se fasse dans le cadre d'une puissante coalition internationale, comme celle de 1991, car, selon eux, il n'est pas question que les Etats-Unis (accompagnés de l'unique Grande-Bretagne) partent seuls en guerre. Cela a donné lieu à des débats contradictoires, ce qui a fait dire au sénateur démocrate de la Louisiane, John Breaux: «Nous ne voulons pas d'une situation semblable à celle du Viêtnam où la Chambre était divisée, où le Sénat était divisé et le peuple était divisé» Le Congrès, de fait divisé, n'arrive pas à se faire une religion sur les motivations du président Bush à vouloir à tout prix déclencher une nouvelle guerre dans le Golfe. En fait, chaque jour qui passe montre bien que MM.Bush et Blair sont, actuellement, les seuls à militer pour la guerre, la communauté internationale s'efforçant, quant à elle, à trouver une issue pacifique au contentieux irakien.