Dans son discours mardi, le président américain n'a apporté aucun élément nouveau. Aucun élément, en tout état de cause, propre à justifier l'acharnement que met Washington à vouloir, coûte que coûte, attaquer l'Irak, comme l'Administration américaine, n'a cessé, depuis plusieurs semaines, de le réclamer au Conseil de sécurité. En fait, les photos satellite, sur lesquelles s'appuie le président Bush, pour estimer que Bagdad a reconstruit - ou est en train de reconstruire - un armement de destruction massive, sont peu probantes et, à la limite, si elles peuvent éveiller les soupçons, ne montrent, en revanche, rien qui prouve que l'Irak s'est, à nouveau, engagé dans la voie de son réarmement. Certes, George W.Bush, s'est montré tout aussi déterminé à frapper l'Irak, mais semble toutefois tenir un peu plus compte de l'opinion mondiale en affirmant mardi que «l'option militaire est mon dernier choix». De fait, le président américain dans sa campagne anti-irakienne, joue essentiellement sur la peur qu'ont les gens des armes nucléaires et autres armes de destruction massive. Désarmer l'Irak est une bonne chose à la condition que cette mesure soit étendue à d'autres pays et notamment Israël, le seul pays du Proche-Orient détenant en fait présentement des armes de destruction massive opérationnelles. Donc, s'il convient de désarmer l'Irak, il faudrait aussi faire en sorte que cela soit le cas de tout le Proche-Orient. Focaliser sur le seul Irak est à tout le moins irresponsable, d'autant que l'objectif réel américain tend, outre désarmer ce pays, à en changer le régime. Ce qui, en vérité, outrepasse et de loin les prérogatives dont peuvent se prévaloir les Etats-Unis en tant que «gendarmes» du monde. Le changement du régime irakien demeurant une affaire intérieure à l'Irak. C'est ce que n'ont cessé de répéter les grandes puissances, amies ou alliées des Etats-Unis, lesquelles estiment que toute action militaire contre l'Irak doit se faire dans la légalité internationale et dans le cadre strict du Conseil de sécurité de l'ONU. Ce que Paris et Moscou, notamment, ne se sont pas fait faute de mettre en exergue ces derniers jours. C'est cette opposition à une frappe de l'Irak en dehors de toute résolution de l'ONU qui, sans faire reculer la détermination de Washington, ne l'on a pas moins fait voir les risques d'une action solitaire dans la seule compagnie de la Grande-Bretagne. De fait, la résistance de la communauté internationale au diktat américain, a fait évoluer les choses, notamment au sein de l'ONU où les positions des membres permanents du Conseil de sécurité se sont quelque peu rapprochés ces derniers jours. En effet, après plusieurs jours de concertation, Français et Russes, qui sont totalement opposés à une résolution mentionnant une frappe automatique de l'Irak, se sont, en revanche, ralliés à la mise au point d'une résolution plus contraignante pour l'Irak, l'obligeant à coopérer totalement avec les experts onusiens. C'est seulement dans l'optique où l'action des inspecteurs de l'ONU est effectivement entravée qu'il y aurait alors la possibilité d'envisager une résolution comparable à celle ayant permis en 1991 à la coalition internationale de mener des frappes militaires contre l'Irak. A l'évidence, on n'en est pas encore là, d'autant que Bagdad a donné son feu vert au retour sans condition des inspecteurs de l'ONU. Il fallait donc donner à l'équipe de Hans Blix, directeur de la Mission d'inspection de vérification et de contrôle de l'ONU (Cocovinu), la possibilité de faire son travail et de montrer, sur le terrain éventuellement, que ce travail ne pouvait être effectué du fait des obstacles que mettrait Bagdad à sa réalisation. Ainsi, les discussions ont beaucoup avancé et il devient de plus en plus probable que le Conseil de sécurité va aller dans le sens de l'adoption d'une nouvelle résolution plus ferme concernant le désarmement de l'Irak.