Mis à l'index par l'Occident pour sa politique nucléaire controversée, l'Iran a accumulé ces derniers jours les coups d'éclat diplomatiques illustrant son rôle incontournable dans la région. En une semaine, le président iranien, Mahmoud Ahmadinejad, a effectué un voyage triomphal au Liban sonnant comme un défi aux Etats-Unis et à Israël, le premier ministre irakien sortant, Nouri al-Maliki, est venu chercher le soutien de Téhéran pour former un nouveau gouvernement, et l'Iran a obtenu de Washington la reconnaissance publique de son rôle dans le dossier afghan. L'Iran a, par ailleurs, arraché pour la première fois depuis la révolution islamique de 1979, la présidence de l'Organisation des pays exportateurs de pétrole (Opep), où l'Arabie Saoudite, alliée des Etats-Unis, joue un rôle déterminant. Au-delà de sa zone d'influence, l'Iran a entrepris de développer ses liens avec des puissances émergentes comme le Brésil, partenaire d'une initiative diplomatique iranienne sur le dossier nucléaire, ou le Venezuela dont le président Hugo Chavez effectuait hier sa 9e visite à Téhéran. La communauté internationale doit «prêter attention à l'influence importante de l'Iran dans la région, et l'utiliser pour préserver la paix et la stabilité», a résumé l'ambassadeur d'Iran à l'ONU, Mohammad Khazai, cité par l'agence Irna. Cette moisson de coups d'éclat est intervenue alors que les Occidentaux multiplient les efforts pour affaiblir et isoler Téhéran, notamment par de lourdes sanctions économiques prises dans la foulée d'une condamnation de la politique nucléaire de l'Iran par le Conseil de sécurité de l'ONU en juin. Elle renforce indiscutablement la position diplomatique de Téhéran à un mois d'une reprise prévue des discussions avec les grandes puissances sur la question nucléaire après un an d'impasse, selon des analystes à Téhéran. «L'Iran vient de montrer que les Etats-Unis ne peuvent pas le marginaliser», estime Mohammad Saleh Sedghia, directeur du Centre arabe d'études iraniennes basé à Téhéran. «La politique des sanctions économiques a peut-être un certain impact, mais elle ne peut pas aboutir à isoler l'Iran au Moyen-Orient». «L'Iran est parvenu à surmonter politiquement le problème des sanctions et à éviter l'isolement», estime également Gholam Reza Ghalandarian, directeur du quotidien conservateur Quds. Au-delà du conflit sur le dossier nucléaire, «les pays de la région et de nombreuses autres nations considèrent l'Iran comme un acteur géopolitique majeur», ajoute-t-il. Plusieurs diplomates occidentaux en poste à Téhéran reconnaissent que l'Iran a marqué des points, tout en minimisant leur importance. «Dans le contexte actuel, ces événements peuvent être considérés comme des succès pour l'Iran», admet un diplomate qui a requis l'anonymat. «Mais ce sont des succès largement optiques. Concernant l'influence de l'Iran dans la région, que personne ne conteste, il n'y a rien de nouveau». «Et la question-clé pour Téhéran demeure les dommages que les sanctions internationale commencent à infliger à son économie, et qui vont rendre sa politique nucléaire de plus en plus coûteuse», souligne-t-il. «L'Iran a redoublé d'activité diplomatique ces derniers mois pour tenter d'échapper aux sanctions puis d'en réduire les effets» relève un autre diplomate. Selon lui, «Téhéran veut prouver qu'il est moins isolé que les Occidentaux ne le disent. De ce point de vue, c'est peut-être un succès, mais l'Iran fait surtout du bruit et de la fumée. En dehors de sa zone d'influence traditionnelle dans la région, il n'y a rien derrière cette activité» diplomatique.