Les Ivoiriens étaient hier dans l'attente du verdict des urnes, promis d'ici mercredi, au lendemain d'une présidentielle historique à laquelle ils ont participé massivement et dans le calme pour en finir avec une décennie de crise politico-militaire. La Commission électorale indépendante (CEI) a légalement jusqu'à demain pour proclamer les résultats provisoires mais, selon des sources concordantes, les choses devraient aller beaucoup plus vite. Hier, le calme régnait toujours dans la capitale économique Abidjan et à Bouaké (centre), fief de l'ex-rébellion des Forces nouvelles (FN) qui tient le nord du pays depuis le coup d'Etat raté de 2002. Pour le grand jour, les foules s'étaient déplacées dimanche dès l'aube afin de prendre part, dans le calme et l'émotion, à la première élection véritablement ouverte de l'histoire du pays, repoussée six fois depuis 2005. Le taux de participation avoisinerait les 70%, selon des indiscrétions. Quelque 5,7 millions d'inscrits devaient départager 14 candidats, dont les trois poids lourds pour la première fois opposés: le président sortant Laurent Gbagbo, 65 ans, au pouvoir depuis 2000 malgré la fin de son mandat en 2005, l'ex-chef d'Etat Henri Konan Bédié, 76 ans, et l'ancien Premier ministre Alassane Ouattara, 68 ans. «Il y a une forte pression pour que la CEI donne les résultats ce (lundi) soir», indique une source diplomatique, pour qui l'essentiel est de «canaliser» l'après-scrutin et d'éviter un long suspense propice aux impatiences et aux débordements. Il s'agit de savoir si un prétendant a réussi le tour de force de l'emporter dès dimanche ou si un second tour sera organisé (15 jours après la proclamation des résultats définitifs du premier tour par le Conseil constitutionnel), et entre quels rivaux. «Les candidats sauront-ils renvoyer l'ascenseur aux électeurs, en respectant le choix opéré par ceux-ci?», s'inquiète le quotidien d'Etat Fraternité-Matin. Le président Gbagbo comme le chef des FN Guillaume Soro, devenu Premier ministre après l'accord de paix de 2007, ont rappelé ce week-end qu'il appartenait à la commission d'annoncer les résultats. Or, tandis qu'Abidjan grouillait de rumeurs, une certaine confusion a régné ces dernières heures à la CEI. Après l'avoir longtemps exclu, elle a commencé à livrer tard dimanche soir des résultats partiels, mais pour seulement une poignée de circonscriptions de l'étranger, avant d'ajourner ces annonces dans le courant de la nuit. A travers le pays, aucun incident notable n'avait été signalé dimanche, même si le scrutin a connu quelques carences d'organisation (retards dans l'ouverture des bureaux, absence d'une partie du matériel électoral...). «Grands» candidats et observateurs internationaux ont exprimé leur satisfaction. La sécurité du vote était assurée par des brigades mixtes loyalistes/FN fortes de quelque 6600 éléments, soit moins que les 8000 hommes prévus. Elles étaient épaulées par les ex-rebelles au nord, police et gendarmerie au sud, et l'Opération des Nations unies en Côte d'Ivoire (Onuci, plus de 8500 hommes). La présidentielle est censée clore la crise ouverte par le putsch de 1999 et aggravée par le coup d'Etat raté de 2002, qui a entraîné une guerre et la partition de cette ex-colonie française longtemps donnée en exemple pour sa stabilité et son «miracle» économique.