Les autorités électorales de Côte d'Ivoire procédaient lundi au dépouillement des milliers de bulletins déposés la veille dans les urnes, au premier tour d'une élection présidentielle historique censée tourner la page d'une décennie de crise. La commission électorale, qui a fait état d'un taux de participation de 60 à 70%, pour 5,7 millions d'inscrits, s'est donné trois jours pour annoncer les résultats d'un scrutin que les observateurs voient plutôt se jouer lors d'un second tour, fixé au 28 novembre. Durant la nuit, la commission n'a livré qu'une poignée de résultats concernant la diaspora ivoirienne dans trois pays européens. Auguste Miremont, son porte-parole, a promis de nouveaux résultats à 11h00 GMT. Le premier tour du scrutin, repoussé à six reprises depuis 2005, a mis aux prises le président sortant Laurent Gbagbo, l'ancien président Henri Konan Bédié, chassé du pouvoir par un coup d'Etat fin 1999, et l'ex-Premier ministre Alassane Ouattara, qui n'avait pu se présenter à la précédente élection pour cause de "nationalité douteuse". Les trois candidats ont salué le déroulement du scrutin, qui s'est déroulé dans le calme. Chacun des camps a organisé des "nuits électorales" pendant lesquelles ils ont comptabilisé publiquement les résultats envoyés par leurs représentants dans les 20.000 bureaux de vote installés pour l'élection. Un haut responsable du Rassemblement des Républicains (RDR) d'Alassane Ouattara a déclaré à RFI que l'ancien Premier ministre était en tête et pourrait l'emporter au premier tour, sans fournir d'autres précisions. Mais les candidats devraient s'abstenir d'annoncer quoi que ce soit avant la commission électorale. "Si la commission est transparente", remarque un observateur international, "personne ne se fiera à ce que disent les candidats." "L'élection s'est déroulée de manière correcte et est globalement satisfaisante", ont indiqué dimanche soir les observateurs internationaux réunis au siège de l'Opération des Nations unies en Côte d'Ivoire (ONUCI) à Abidjan pour une évaluation de la journée du scrutin présidentiel. Plusieurs centaines d'observateurs issus de l'Union européenne (UE), de l'Union africaine (UA), de l'Organisation internationale de la Francophonie (OIF), du Centre Carter, de l'Union monétaire ouest africaine (UEMOA), du groupe Afrique Caraïbes et Pacifique (ACP), des Etats-Unis et du Japon suivent le processus électoral en Côte d'Ivoire. Le représentant de l'UA, Ambroise Nyonsaba, a souligné "la patience et la discipline" des Ivoiriens dans les longues files d'attente devant les bureaux de vote. "Le constat est positif", a déclaré pour sa part le chef de la mission d'observation de l'UEMOA, Dramani Dama. "Dans les bureaux de vote où nous sommes passés, il y a de l'affluence, le vote est tranquille et libre pour l'instant", a-t-il fait remarquer déplorant toutefois l'absence de représentants de certains candidats dans les bureaux de vote. Un peu plus tôt dans la matinée, le représentant spécial du secrétaire général des Nations unies pour la Côte d'Ivoire, Young Jin Choi, avait relevé "l'accalmie, l'ordre et la patience" qui ont régné tout au long de la journée dans les bureaux de vote. "C'est très encourageant, car tout se passe dans la paix et dans l'ordre", a-t-il dit après une tournée dans des bureaux de vote à Abidjan et Grand-Bassam à 35 km d'Abidjan. "Je félicite le peuple ivoirien qui, maîtrisant la passion et l'émotion, est sorti massivement exercer son droit civique, dans la paix et dans la discipline après avoir patienté si longtemps", a ajouté M. Choi. Comme les quelque 5,7 millions d'électeurs, les principaux candidats, les opposants Henri Konan Bédié et Alassane Ouattara, et le président sortant Laurent Gbagbo ont exprimé leur satisfaction sur le bon déroulement du scrutin après avoir accompli, en compagnie de leurs épouses, leur devoir de citoyen. Henri Konan Bédié s'est dit "serein et soulagé après tant d'années passées sans élections" tout en se félicitant du calme qui a prévalu. "Pour le moment, tout se passe paisiblement et je voudrais féliciter les forces de l'ordre pour l'encadrement des électeurs", s'est réjoui également Alassane Ouattara qui estime que "la paix est ce dont le pays a le plus besoin, aussi bien le jour des élections que les jours après les élections". Le président Laurent Gbagbo a également exprimé sa satisfaction pour le bon déroulement du scrutin. Il a invité ses adversaires à ne pas "se donner en spectacle" en proclamant leurs propres résultats. "Il faut respecter la loi, la Commission électorale indépendante (CEI) est seule habilitée à proclamer les résultats provisoires", a-t-il insisté. La CEI s'est engagée, conformément à la loi, à proclamer les résultats dans un délai de 72 heures, "mercredi au plus tard", avant la validation par le Conseil constitutionnel. R.I.