Annan «regrette», Bush est «irrité», mais personne ne condamne ni n'exige d'Israël qu'il arrête ses assassinats. Depuis vingt-cinq mois, Israël a transformé la Cisjordanie et Gaza en une gigantesque prison, quadrillée par la plus puissante armée du Proche-Orient, l'armée israélienne. Durant cette période, plus de 3000 Palestiniens ont été assassinés, dont l'immense majorité était des civils, des dizaines de milliers de blessés, un pays totalement à l'arrêt, ses infrastructures administratives et sociales délibérément détruites par les chars et les blindés israéliens. Tout cela au vu et au su d'une communauté internationale amorphe, incapable d'exiger, enfin, de l'Etat hébreu de la retenue et de savoir raison gardée. Le massacre commis jeudi à Rafah par l'armée israélienne, qui tira à la mitrailleuse lourde contre deux écoles, n'est, en fait, que l'un des innombrables carnages perpétrés par les Israéliens contre la population civile palestinienne. Pour seulement ce début du mois d'octobre plus de 50 Palestiniens, dont 15 enfants, ont été tués par l'armée israélienne, plus de 300 autres blessés. Mais, encore une fois, face à la détermination d'Israël de réduire toute résistance palestinienne, la communauté internationale a encore montré sa veulerie en ne condamnant pas franchement ces «exécutions» sommaires de civils palestiniens par une armée qui a la gâchette trop facile. Washington a exprimé sa «colère» certes, mais plus par rapport à ses efforts de rallier le monde arabe à sa croisière contre l'Irak, que les exactions israéliennes mettent en difficulté, que par compassion pour une population assiégée et meurtrie depuis plus de deux ans dans l'indifférence générale. Ainsi, le secrétaire général de l'ONU, selon un communiqué de son service de presse, se dit «surtout troublé par le fait que les forces israéliennes aient tiré des feux nourris contre deux écoles» du camp de réfugiés de Rafah dont l'une, apprend-on, dirigée par l'Unrwa (l'Agence de secours de l'ONU pour les réfugiés palestiniens.) Paris «souhaite» que Tel-Aviv cesse «toutes ses opérations militaires». La communauté internationale est ainsi tétanisée face à Israël n'osant pas condamner ces exactions et ces assassinats comme elle le fait naturellement pour tout dépassement survenant ailleurs dans le monde. Dès lors, les dirigeants israéliens font-ils fi de l'opinion de la communauté internationale, sans grande conséquences pour lui, poursuivant méthodiquement le génocide du peuple palestinien pour lui prendre ses terres. De fait, il ne pouvait en être autrement quand, même lorsque l'on parle de paix ou de reprise du processus de paix, on constate que les principaux concernés, les Palestiniens, sont encore les derniers à être consultés sur le sort que l'on veut leur réserver. Ainsi, le sous-secrétaire d'Etat américain chargé du Proche-Orient, William Burns, a entrepris depuis vendredi une large tournée au Proche-Orient où il visitera pas moins de huit pays. Il fera une halte dans les territoires occupés, mais n'a pas prévu de rencontrer le président palestinien Yasser Arafat. Avec quels responsables compte-t-il discuter de la Palestine et de la paix dans les territoires occupés? Alors que les autorités américaines refusent de dialoguer avec le président Arafat, le président Bush a reçu mercredi dernier le Premier ministre israélien Sharon, auquel il a remis un document présentant des idées du «quartette» (ONU, UE, USA et Russie) devant mettre en place «une feuille de route» devant conduire d'ici à 2005 à la création d'un Etat palestinien «provisoire», du moins selon la terminologie usitée par le «quartette». Dans sa première réaction, le chef du gouvernement israélien a déclaré qu'il «ne se sentait pas lié par le document de travail américain». Les Israéliens qui ont besoin des Américains, estiment néanmoins n'avoir aucune obligation envers quiconque, notamment dans la perspective d'une paix globale chapeautée par la communauté internationale. De fait, Israël, qui n'a appliqué aucune des résolutions du Conseil de sécurité le concernant ne s'était jamais senti concerné par les plans de paix, au Proche-Orient, mis au point par les Nations unies et la communauté internationale, agissant comme juge et partie ne se reconnaissant aucun engagement envers le droit et les lois internationaux. S'étant placé au dessus du droit international, l'Etat hébreu est en outre assuré de l'impunité que lui prodigue la protection des Etats-Unis. Les réactions internationale mitigées au nouveau massacre de Palestiniens, commis par l'armée israélienne à Rafah, atteste, s'il en est, du fait qu'Israël est bien un Etat à part.