Le parti du président zimbabwéen Robert Mugabe se réunit en congrès demain pour décider de la date des prochaines élections qui risquent de plonger le pays dans le chaos, estiment des diplomates, si elles ont lieu dès 2011. Les 3000 délégués de l'Union nationale africaine du Zimbabwe-Front patriotique (Zanu-PF) devraient également entériner la candidature du plus vieux leader africain, 86 ans, à sa réélection, lors de cette conférence annuelle à Mutare (est). Robert Mugabe, au pouvoir depuis l'indépendance en 1980, plaide pour des élections à la mi-2011. Son ancien rival Morgan Tsvangirai, devenu Premier ministre à la faveur d'un gouvernement d'union, estime que les conditions pour un scrutin «libre et équitable» ne seront pas réunies avant 2012. «Il y aura des élections même si le MDC (Mouvement pour le changement démocratique de Tsvangirai) refuse d'y participer. En ce qui nous concerne nous avons notre candidat», assure Rugare Gumbo, porte-parole de la Zanu-PF. «Dans les zones rurales, les violences et les intimidations sont un vrai problème, rétorque Nelson Chamisa, porte-parole du MDC. Un scrutin dans ces conditions serait illégitime». Précipiter la tenue d'un scrutin reviendrait à répéter le scénario de 2008, quand la défaite de la Zanu-PF aux législatives avaient entraîné un déferlement de violences au Zimbabwe, mettent en garde analystes et diplomates occidentaux. «Si nous avons des élections l'année prochaine, il pourrait y avoir des troubles et un carnage», prévient l'avocat des droits de l'homme Alec Muchadehama. Pour sortir de la crise de 2008, Robert Mugabe et son rival ont formé en février 2009 un gouvernement d'union, censé prendre fin avec de nouvelles élections, après l'adoption d'une Constitution. Obstruction et manque de financement ont retardé le processus constitutionnel mais la Zanu-PF pousse pour un scrutin rapide. «Si la Zanu-PF décide lors de cette conférence d'avoir des élections l'année prochaine, elles auront lieu, que le MDC le veuille ou non. La Zanu-PF ne veut pas d'une élection quand le MDC a l'avantage. Alors, elle ne vas pas attendre que des réformes soient mises en place», estime l'universitaire zimbabwéen Taka-vafira Zhou. Mais sans «mécanismes pour des élections libres et équitables, nous aurons une autre Côte d'Ivoire», prédit-il, en référence aux tensions dans ce pays d'Afrique de l'Ouest où coexistent deux présidents proclamés. Au Zimbabwe, les jeux ne sont pas encore faits, souligne toutefois un diplomate occidental à Harare. «Le président Mugabe, quelques membres de la Zanu-PF et les militaires veulent des élections l'année prochaine», mais «les parlementaires du parti présidentiel veulent des élections en 2013 afin de conserver leur siège et leur salaire», remarque-t-il. La Communauté de développement d'Afrique australe (SADC), qui a nommé le président sud-africain Jacob Zuma médiateur dans la crise, devrait jouer un rôle dans l'évolution de la situation. «Nous suivons avec attention ce que fait la la SADC et quelle sera la feuille de route de Zuma pour éviter une répétition du scénario de 2008», déclare un autre diplomate occidental. Pour l'instant, la médiation reste prudente. «On ne peut donner aucune date» pour les élections, indique sa porte-parole Lindiwe Zulu. «Les élections doivent avoir lieu dans un environnement favorable pour que les Zimbabwéens puissent revendiquer une élection crédible», dit-elle.