En organisant hier une rencontre avec les producteurs nationaux de médicaments et la presse, notre ministre de la Santé, Djamel Ould Abbès, n'est pas venu les mains vides. En fouillant dans le «panier» à médicaments depuis son arrivée à la tête du département, en mai dernier, il a découvert des vertes et des pas mûres. D'abord cette ahurissante découverte. Pas moins de 19 produits pharmaceutiques portés sur la liste des médicaments interdits à l'importation, certains depuis 2008, n'étaient pas produits localement. Or, chacun sait que c'est pour protéger la production nationale que l'interdiction d'importation est prononcée. Alors comment expliquer cette fausse liste qui vient d'être découverte? Première précision: ces 19 produits font, en réalité, partie de plusieurs médicaments de même dénomination commune internationale (DCI), c'est-à-dire la substance active (la molécule) comme par exemple le paracétamol. Une même molécule peut être vendue sous une vingtaine de marques différentes. Donc, ces 19 produits interdits à l'importation sans être fabriqués par nos industriels représentent en réalité entre dix et vingt fois plus de médicaments portant des marques commerciales différentes. Si cette interdiction a duré des années, cela est à mettre au compte de l'incurie qui prévalait à l'époque. On dresse une liste sans y jeter de temps à autre un oeil. Sans vérifier. L'interdiction pouvait rester en vigueur des années ou l'éternité. Ce qui n'était pas sans arranger les affaires de certains importateurs qui écoulaient tranquillement la même molécule sous une autre marque commerciale différente. Pour mettre fin à de telles légèretés, Ould Abbès a décidé de restructurer cette fameuse liste de médicaments interdits à l'importation en trois catégories. La première lorsque le médicament est produit par au moins trois producteurs nationaux et couvrant entièrement nos besoins. Dans ce cas-là l'importation est totalement interdite. La seconde lorsque la production nationale d'un médicament donné ne couvre que les 2/3 des besoins, cela autorise donc à importer le tiers restant. Et enfin, les médicaments produits chez nous mais ne couvrant que le tiers de nos besoins permettra d'importer les deux tiers qui manquent. Une liste à trois étages. Ce n'est pas tout. Un travail si pointu nécessite un suivi. C'est pourquoi le ministre a mis en place une structure de veille pour suivre les changements qui peuvent intervenir en cours de route. Cette structure dispose, entre autres outils, des rapports trimestriels de production exigés aux entreprises opérant dans notre pays. L'autre mesure importante prise par le ministre est l'obligation faite aux opérateurs (importateurs et producteurs) de disposer dorénavant de stocks pour six mois et non plus de trois mois comme auparavant. Toujours pour la méthode et contre toute précipitation, Djamel Ould Abbès a décidé, en accord avec le Premier ministre, de différer à 2012 la distribution des médicaments par les fabricants eux-mêmes. Pour avoir le temps de mutualiser leurs moyens et mettre en place, probablement avec une participation de l'Etat, un système de distribution pérenne pour alimenter les officines. Notons que le ministre a rappelé avec insistance, tout au long de son intervention, le caractère stratégique du médicament et le cap mis sur une production nationale fixée à 70% à l'horizon 2014-2015. Une autre rencontre aura lieu dans les prochains jours avec les importateurs.