Devant la pression de l'étranger, les observateurs de la scène nationale s'attendent à des décisions qui chambouleront le cours des événements en Algérie. La marche de samedi prochain peut être tolérée. La Coordination nationale pour le changement et la démocratie a de fortes chances d'obtenir le feu vert du gouvernement. La déclaration faite hier par le ministre des Affaires étrangères, Mourad Medelci, sur les ondes d'Europe1, donne un avant-goût de ce que sera la réaction du gouvernement. Interrogé sur la levée de l'état d'urgence, M.Medelci a déclaré: «Prochainement, on en parlera au passé, mais je dis bien que la levée de l'état d'urgence interviendra dans les jours prochains.» Certes, le président de la République avait promis de lever l'état d'urgence dans un proche avenir, mais les propos de M.Medelci laissent croire que ce verrou est sur le point de sauter. Un décret exécutif, autorisant les marches à Alger, sera probablement publié avant la fin de cette semaine. Le président de la République a chargé le gouvernement d'étudier les textes législatifs permettant la suspension de cette mesure. Les observateurs politiques avertis de la scène nationale s'attendent à des décisions qui chambouleront le cours des événements. S'appuyant sur des éléments bien déterminés, ils prévoient un relâchement de la part du gouvernement. Afin d'apaiser la situation sur le front social, le gouvernement, selon des observateurs, pourra précipiter la levée de l'état d'urgence. Pourquoi? Pour eux, la donne a changé par rapport à la marche du 12 février. Preuve en est, les réactions étrangères exprimées ces derniers temps sont un élément fort qu'on ne peut occulter. Devant la détermination de la Coordination nationale pour le changement et la démocratie à braver ce mur, le gouvernement n'aura d'autre choix que d'autoriser la marche. Suite à l'interdiction de la marche du 12 février dernier, les réactions étrangères tombent en cascade. Les Etats-Unis, l'Allemagne et même l'Union européenne ont adressé des mises en garde non voilées au gouvernement algérien. Le département d'Etat américain a appelé dimanche les forces de sécurité à la retenue face aux manifestants en Algérie. «Nous prenons acte des manifestations actuelles en Algérie, et appelons à la retenue les forces de sécurité», écrit le porte-parole du département d'Etat, Philip Crowley, dans un communiqué. La Maison-Blanche qui suit la situation de près réaffirme son soutien aux droits universels du peuple algérien, y compris les droits de réunion et d'expression. «Ces droits s'appliquent sur Internet et doivent être respectés», a précisé le porte-parole. L'Allemagne n'est pas restée indifférente. Son chef de la diplomatie, Guido Westerwelle a appelé le gouvernement algérien à ne pas faire usage de violence contre les manifestants, qui ne font qu'exercer un «droit humain» en exprimant leur opinion. «Le gouvernement allemand appelle le gouvernement algérien à renoncer à tout recours à la violence», a dit le ministre sur la première chaîne de Télévision publique. «Il s'agit de manifestants désireux de liberté, qui ne font rien d'autre qu'exercer un droit humain, à savoir le droit de défendre dignement leur point de vue. C'est pourquoi nous condamnons toute forme de recours à la violence», a déclaré M.Westerwelle. Le Parlement européen a été très sévère. Son président, Jerzy Buzek, a réclamé la libération «immédiate» des manifestants arrêtés durant la marche de samedi dernier. Il a exhorté les autorités algériennes «à ne pas céder à la violence et à respecter le droit de leurs citoyens à manifester pacifiquement». La France a été prudente dans sa réaction. Son ministre des Affaires étrangères a déclaré que la France souhaite que les manifestations en Algérie puissent se dérouler «librement et sans violence». Pour les observateurs les plus avertis, cette incursion est une façon de se venger de l'Algérie. Alors que l'Algérie est loin d'être la Côte d'Ivoire ou l'Egypte, l'Occident verse dans l'excès de zèle.