Pays maghrébins en pleine mutation politique et Européens sous l'effet de la double crise économique et de l'emploi. Les rapports entre les deux rives du Bassin méditerranéen étaient au menu du colloque organisé hier, à Alger par la Confédération des cadres de la finance en collaboration avec Maghreb+, une association maghrébine pour la promotion des relations économiques et financières. De tout temps, les relations entre les pays de la rive Sud et l'Europe sont «multidimensionnelles et parfois complexes», a déclaré Mellak Abderahmane, enseignant chercheur des universités et consultant international. Il est primordial de revoir les bases de cette coopération déséquilibrée en faveur de l'Europe, pour aller vers une relation sincère et durable. Ce lien pourrait aboutir à une relation équilibrée gagnant-gagnant à condition «d'assurer la solidité, l'équilibre et la pérennité de ce lien», estime-t-il. Cependant, que doivent faire les pays européens et maghrébins pour parvenir à un partenariat gagnant-gagnant, devant un manque de volonté politique stratégique manifeste de part et d'autre? «L'Union européenne devrait donner beaucoup plus d'importance à ces relations avec les pays du Maghreb afin d'assurer l'équilibre», selon ce consultant. Intensifier des échanges commerciaux, des services, y compris dans le domaine de l'environnement et du rapprochement des systèmes sociaux et des efforts particuliers qui devraient être employés de manière à orienter des investissements européens au Maghreb et renforcer la dimension multinationale des programmes Meda, indique-t-il. L'Union européenne qui devrait montrer clairement la volonté de prendre en compte les besoins de ses partenaires devrait également, selon lui «s'engager franchement sur les questions se rapportant à la maîtrise des flux migratoires en parvenant à une gestion réaliste et concertée avec les pays de départ», souligne-t-il et de préciser que «cela signifie que l'UE ne doit pas considérer les pays du Maghreb comme de simples boucliers mais comme des partenaires car la politique migratoire de l'UE se joue autant à Dakar, à Bamako qu'aux Canaries ou à Lampedusa, qui symbolise l'échec de la politique migratoire européenne». Il faut également, poursuit-il, s'investir davantage dans le dialogue intermaghrebin notamment par la mise en place de lieux de réflexion». Au vu des mutations traversant actuellement le Maghreb, l'Europe devrait, constate-t-on encore, «aller vers une réflexion innovante qui aille au-delà de la simple gestion de flux migratoire en adoptant une politique pro-active et en révisant les bases de la coopération. De son côté, le Maghreb est en pleine mutation sous l'impulsion de certains facteurs dont, entre autres, le récent mouvement des réformes politiques, le phénomène migratoire et la population majoritairement jeune qui souffre d'une intégration intérieure insuffisante. La région du Maghreb est la moins intégrée du monde. Chaque pays tente de s'arrimer à la locomotive européenne en solo en tournant le dos aux voisins», selon Mellak. «La sévérité des conséquences économiques et sociales de la crise mondiale au Maghreb est attribuée à l'absence de marché régional», dira-t-il en citant le Fonds monétaire international. L'ambassadrice et chef de la délégation de l'Union européenne (UE), Mme Laura Baeza, a dressé, de son côté, un bilan de la coopération entre les pays du Maghreb et l'UE, insistant sur le processus de Barcelone (1995) et la Politique européenne de voisinage (2003). Elle a cependant souligné que «le partenariat envisagé par l'UE sera mis en oeuvre dans le respect des processus de changements internes aux pays de la rive Sud de la Méditerranée».