Les affrontements entre les deux camps ont fait plus de 60 blessés parmi les étudiants, dont certains sont dans un état grave. La marche à laquelle a appelé la Coordination nationale autonome des étudiants a été empêchée, hier, par des milliers d'agents de l'ordre déployés autour de la Grande-Poste et plusieurs points de la capitale. Alors qu'elle devait s'ébranler de la Grande-Poste vers le Palais du gouvernement, la marche s'est finalement transformée en rassemblement devant la Faculté centrale. Les quelque 4000 étudiants, qui ont pu accéder, malgré tous les obstacles, à cette place ont été encerclés par deux cordons de sécurité «infranchissables», constitués de milliers d'hommes en bleu. Les tentatives de forcer ces cordons ont été vaines et se sont à chaque fois heurtées à la matraque des policiers. Plusieurs étudiants ont été passés à tabac dont 60 d'entre eux blessés. Un étudiant, visiblement très en colère devant les brutalités policières s'est, dans un geste spectaculaire, tailladé le cou avec un couteau. Ses camarades l'ont immédiatement transféré à l'hôpital. Tout a commencé aux environs de 11 heures lorsque quelques universitaires ont réussi à se rassembler devant la Fac centrale. Durant la matinée, les policiers ont procédé à des vérifications systématiques de l'identité des passants. Des milliers d'étudiants ont ensuite rejoint leurs camarades pour former une foule nombreuse, alors que des centaines d'autres ont été soit bloqués à l'intérieur de la Fac centrale soit enfermés dans le sous-sol de la Fac. Empêchés de marcher par les agents de l'ordre, les universitaires ont scandés à tue-tête des slogans hostiles au pouvoir et à leur tutelle. Les slogans se radicalisaient et se politisaient à mesure que la violence policière s'intensifie. «Nous sommes toujours des combattants», «Khawa khawa, z'kkara fi lwizara», «Marche pacifique», «A bas la répression», «Pouvoir assassin», «Il n'y a de Dieu que Dieu, le chômage bi idhni llah», «Les fils du peuple sont qui, l'université appartient à qui?», sont entre autres, les slogans scandés par la foule. Les étudiants ont porté également des banderoles qui en disent long sur l'état de l'Université algérienne en particulier et du pays en général. Sur l'une d'elle on pouvait lire: «L'université est la colonne vertébrale du pays». A elle seule, cette phrase exprime l'état de délabrement et de décomposition avancée de l'Université algérienne. Car si les étudiants sont depuis maintenant plus de quatre mois en grève, c'est que leur institution va mal, et partant, c'est tout le système qui est malade. «Pour une université publique de qualité», «Halte à la clochardisation de l'université», «Pour une université publique performante ouverte sur le monde», lit-on encore sur d'autres banderoles et pancartes arborées par les manifestants qui ont chassé les caméramans de l'Entv à 11h50 mn. Les étudiants ont maintenu le rassemblement, ponctué par des prises de parole, jusqu'à 14 heures lorsqu'un membre de la Cnae a demandé à ses camarades de se disperser dans le calme, tout en dénonçant la répression qui s'est abattue sur eux. «On a réussi malgré l'empêchement», a-t-il clamé sous les applaudissements des étudiants qui ont applaudi aussi les forces de l'ordre avant de libérer la place dans une atmosphère de fête. «On va revenir massivement», a promis également l'orateur. Les manifestants ont ensuite improvisé une marche jusqu'à la station de bus des étudiants à Tafourah, où les étudiants ont continué à scander des slogans politiques avant de s'attirer la matraque des policiers. Des affrontements de moindre importances ont alors éclaté sur place.