Soixante-trois ans après la résolution du Conseil de sécurité de l´ONU (29 novembre 1947), portant partage de la Palestine historique, 62 après la proclamation illégale de l´Etat hébreu (8 mai 1948), le contentieux israélo-palestinien n´a pas bougé d´un iota et les choses demeurent en l´état tant que la «communauté internationale», subjuguée et tétanisée par d´éventuelles accusations d´antisémitisme, laisse au seul Israël le choix du moment - accordant ainsi un droit exorbitant à l´Etat hébreu - de l´érection de l´Etat palestinien indépendant. Lorsque les Palestiniens, dans leur désarroi, ont eu la velléité de proclamer unilatéralement leur «Etat indépendant» il y eut un cri unanime pour les en dissuader et les mettre en garde contre une telle décision qui serait, selon les Américains, improductive. Justement, ce sont les Américains - déclaration du président Harry Truman - qui reconnurent Israël, deux heures après la proclamation unilatérale de cet Etat. Cette annonce était contraire à la résolution 181, dont l´application devait se faire une année après son adoption par le Conseil de sécurité. En clair, la résolution 181 devait entrer en vigueur et les deux Etats (Israël et la Palestine) devenir effectifs, le 29 novembre 1948. En proclamant arbitrairement son Etat, six mois avant l´échéance de la résolution 181/II, Israël a court-circuité le processus onusien qui devait ramener la paix au Proche-Orient. Ce qui provoqua d´ailleurs, la première guerre israélo-arabe de 1948. Aussi, l´existence d´Israël est-elle fondée sur l´illégalité la plus totale, en sus du fait que l´Etat hébreu n´a même pas eu la décence et la probité de respecter la résolution à l´origine de sa création. Dès lors, on peut ne pas comprendre les hésitations des Palestiniens à proclamer, eux aussi, leur propre Etat, que cela soit dans les limites attribuées en 1947 par la résolution onusienne, ou dans les frontières, dites «ligne verte» ou «ligne de démarcation» de 1967. C´est cette seconde solution qui sera sans doute appliquée par les Palestiniens, mais il faut bien qu´ils se décident, enfin, à franchir le Rubicon. Israël a proclamé son Etat en dehors des lois et du droit internationaux, le Kosovo, c´est le cas le plus récent, en a fait de même. Qui peut interdire aux Palestiniens de suivre cette voie d´autant plus, qu´en tant qu´Etat, ils seront plus forts pour négocier avec Israël. Peur de ne pas être reconnus par les grandes puissances? Cela change quoi, d´autant plus que celles-ci n´ont rien pour résoudre le conflit. Par ailleurs, la Palestine aura pour elle le nombre - tous les pays asiatiques, africains et latino-américains voteront son entrée à l´ONU (le veto ne s´applique pas à l´Assemblée de l´ONU). C´est d´ailleurs la solution (proclamation de l´Etat palestinien) que recommandait Bernard Kouchner, qui n´a pas été suivi par le président français, Nicolas Sarkozy, qui qualifia l´idée de son chef de la diplomatie de «prospective». Comment cela, alors que c´est le seul moyen de mettre Israël dos au mur et le contraindre à négocier sérieusement. Il y a urgence et le temps est compté. En effet, plus le temps passe, plus Israël défigure la Cisjordanie (il est envisagé la création dans les colonies juives d´une université) et Jérusalem-Est. Un responsable israélien affirmait, au lendemain de l´échec de la conférence d´Annapolis - initiée par l´ancien président américain, George W.Bush - qu´un Etat palestinien aux côtés d´Israël ne pouvait être envisagé avant au moins un siècle. C´est dire qu´Israël a tout verrouillé et n´a jamais perçu l´existence d´un Etat palestinien à ses côtés comme allant de soi. D´ailleurs, tous les plans de paix (notamment les Accords d´Oslo) ont échoué et tourné court du fait du seul Israël. Aussi, proclamer un Etat indépendant sans attendre l´autorisation de quiconque, est devenu vital pour la survie même de ce qui reste de la Palestine.