Retour sur les lieux d'une tragique spécificité. La visite, aujourd'hui, du Président Bouteflika à Jijel, région meurtrie par les années noires du diktat de l'AIS qui en avait fait son fief, relève du geste symbolique. Symbolique dans un contexte national où la concorde civile est sérieusement malmenée par les détracteurs de cette politique après les attentats aux Etats-Unis. Le Président, dont le programme de visite ne comporte pas un meeting ou une prise de parole, aura, en revanche, à revenir sur les projets que connaît la région. La zone franche industrielle d'exportation de Bellara, dont le port de Djendjen est le prometteur fleuron, fait partie des étapes importantes de cette visite présidentielle. Depuis 1996, cette zone a été visitée par huit ministres, des ambassadeurs, des hommes d'affaires, sans qu'un coup de lancement sérieux ait été concrétisé. Des appels d'offres ont été lancés sans pour autant attirer les investisseurs. Bouteflika pourra-t-il booster les volontés et mettre un terme à ce trop-plein de paralysie chronique? La zone franche permettra la création de 25.000 emplois directs. C'est dire l'importance d'une urgente redynamisation. Le volet sécuritaire et, par extension, les résultats politiques sur le terrain de la concorde civile seront vraisemblablement évoqués par le Président, lors de l'inauguration, aujour- d'hui même, du nouveau siège de l'APC de la commune d'El-Aouana, à 20 km à l'Ouest du chef-lieu de wilaya. Cet établissement avait été la cible d'un sabotage terroriste fin 1993. La dernière visite de Bouteflika à Jijel date de 1999, lors de la campagne sur le référendum sur la concorde civile, et ici, les discussions qui tournent autour du volet sécuritaire s'attardent douloureusement sur ces années de terreur pas aussi aveugles qu'il ne paraît. La concorde, ici, n'est pas un texte disposé en articles publié par le Journal officiel. C'est une réalité sociale avec tout ce que cela implique à plusieurs niveaux. Que dira Bouteflika? A Jijel, on se pose la question, mais on attend également des réponses concrètes quant à une véritable relance économique et sociale. La question: va-t-on enfin se décider à lancer un véritable projet d'aménagement dans le secteur touristique, par exemple? Dix-neuf Zones d'expansion touristique (ZET) ont été déterminées par un plan d'aménagement sans que ces projets y voient le jour. L'étude d'aménagement du territoire, qui s'étend des Babors à Annaba, a dégagé, notamment, quatorze zones rurales à promouvoir. Mais pour l'instant, point d'avancées appréciables sur ce point. Le développement local devra sortir du lexique officiel pour se traduire sur le terrain des réalités. C'est là aussi l'enjeu de cette visite présidentielle.