La position tranchée du pouvoir semble, elle aussi, avoir été décrétée «scellée et non négociable». Les marches synchronisées, programmées par les ârchs à Bouira, Tizi-Ouzou, Béjaïa et Alger, n'ont pas drainé grand-monde, même si, en revanche, le mot d'ordre de grève générale a, quant à lui, été mieux respecté, notamment au niveau de la ville des Genêts. Il apparaît ainsi clairement que même si la pétition en faveur de la libération des détenus en grève de la faim a donné lieu à un assez large mouvement de mobilisation, il en est tout autrement sur le terrain. Les mêmes personnes qui ont signé, donc, se montrent peu empressées de joindre cet acte aux manifestations de rues. Le mouvement des ârchs n'arrive toujours pas à casser le spectre de la démobilisation citoyenne qui a commencé à le gagner depuis de nombreux mois. La grève de la faim de certains de ses délégués a donné l'air d'être la chance de recouvrer un second souffle. Mais il n'en est toujours rien. De nombreux observateurs, bien au fait de ce qui se passe au sein de ce mouvement, expliquent cet état de fait par «les trop nombreux courants politiques qui traversent les ârchs alors que ce dernier était censé transcender les chapelles politiques». Or, c'est bien la phobie citoyenne par rapport à la plupart des acteurs politiques classiques qui avait encouragé, en 2001, l'érection d'un mouvement capable de mobiliser en quelques heures près d'un million de personnes. Du jamais vu, même du temps de la toute puissance du FIS dissous. La conférence nationale du mouvement- dont les délégués vont faire un nouveau départ, mais aussi le moyen le plus efficace d'étendre le mouvement à tout le pays- est une nouvelle occasion pour trois courants politiques (au moins) de s'affronter à visages à peine couverts pour le contrôle des ârchs et, pourquoi pas, la mise en place d'un puissant parti sur une organisation déjà présente et qui, deux années durant, a fait ses preuves sur le terrain, notamment à Alger. Mais un «miracle» reste toujours possible. A une quarantaine de jours de grève de la faim de certains, la santé des détenus ne cesse de se détériorer. L'irréparable risque fort de se produire, entraînant de facto une nouvelle spirale de la violence, mais aussi une plus grande mobilisation des citoyens autour des ârchs. Or, au lieu de lâcher du lest comme cela devrait être logiquement le cas en pareille situation, le pouvoir joue, lui aussi, la carte du durcissement. C'est à croire que, lui aussi, a décrété sa position «scellée et non négociable». La dernière sortie de Yazid Zerhouni, ministre de l'Intérieur, a sonné comme un nouveau défi lancé aux délégués du mouvement à un moment où le ton devrait être à l'apaisement.