“La greffe est la meilleure solution pour les insuffisants rénaux. Cette option délivre le malade de la contrainte de l'hémodialyse et lui permet de retrouver une vie normale.” C'est ce qu'a déclaré le Pr Rayane du service de néphrologie au CHU Nafissa-Hamoud à Hussein-Dey, lors de la journée scientifique organisée par la Fédération nationale des insuffisants rénaux (Fnir), hier, à l'hôtel Raïs, à La Marsa, près d'Alger. Le même praticien se plaint du recul de l'activité de greffe dans les dix centres algériens dédiés à cette activité. Il rappelle que la première intervention du genre a eu lieu à l'hôpital Mustapha-Pacha en 1986 et que, depuis, seules 500 autres opérations ont été pratiquées. Excepté quatre patients qui ont bénéficié de reins prélevés sur deux morts, à Constantine en 2001, tous les autres ont été greffés grâce à la générosité d'un parent très proche qui leur a fait don d'un organe. La greffe en Algérie se pratique surtout de donneur vivant à receveur vivant. Cette pratique est, certes, une solution, mais les praticiens souhaitent le lancement d'une nouvelle politique en matière de greffe : le prélèvement des organes sur les cadavres. “Il s'agit d'une pratique admise par les scientifiques et non interdite par la religion. Il faut convaincre maintenant les citoyens à se prononcer de leur vivant sur leur volonté ou non de donner leurs organes après leur décès”, propose le Pr Rayane. Si certains malades ont bénéficié d'un rein donné par un proche, les familles algériennes refusent toujours de toucher au corps d'un parent mort. La complexité du prélèvement d'organes sur un mort réside dans le fait que cette pratique ne peut se faire que sur les cas déclarés morts cérébraux. En effet, après deux électro-encéphalogrammes espacés de deux heures, les praticiens peuvent déclarer la mort d'un malade ou d'un accidenté de la route. Pour pouvoir transplanter les organes, ces derniers doivent continuer à être irrigués par le sang et ce, grâce à la respiration artificielle et au cœur artificiel. Les parents qui voient un proche maintenu artificiellement en vie refusent de croire en sa mort, et encore moins de permettre le prélèvement de ses organes. La question a été tranchée par les ulémas qui ont décrété une fetwa autorisant les médecins à prélever les organes. La généralisation des prélèvements d'organes sur des cadavres permettra aussi de réaliser d'autres greffes : le foie, les poumons, le cœur et les reins. Cela offrira aux médecins la possibilité de sauver plusieurs malades. Quant à la situation des insuffisants rénaux en Algérie, le Pr Benabadji, chef de service de néphrologie au CHU de Béni-Messous à Alger, évalue le nombre des hémodialysés en Algérie à 13 000 malades. Pour le moment, quelque 200 centres d'hémodialyse sont recensés en attendant l'ouverture de 80 autres. Il révèle que chaque année, 1 000 nouveaux insuffisants rénaux sont diagnostiqués dans le pays. La prise en charge d'un hémodialysé revient à plus d'un million de dinars par an. La greffe rénale permet à la collectivité de réaliser des économies substantielles et au malade de retrouver une vie normale. C'est pourquoi le président de la Fédération nationale des insuffisants rénaux, le Dr Boukheloua, insiste sur l'importance de la greffe rénale, et espère la généralisation du prélèvement d'organes à partir de cadavres. Spécialiste en hémodialyse, le Dr Boukheloua estime qu'il est grand temps de développer la greffe en Algérie pour sauver les nombreux malades diagnostiqués chaque année. Les malades, pour leur part, espèrent une meilleure prise en charge dans les centres d'hémodialyse et la généralisation du traitement par l'EPO et le fer. La greffe reste la revendication des praticiens et des malades, car il s'agit de la meilleure solution pour les patients. Djafar Amrane