La nécessité de développer les ressources financières tirées de la fiscalité ordinaire devient une urgence. “Si l'Algérie en est aujourd'hui à l'abri, cette crise a eu au moins le mérite de nous révéler que nous n'avons pas travaillé en conséquence pour préparer l'après-pétrole”. Cette déclaration lourde de sens du Chef du gouvernement, en marge de l'ouverture de l'année judiciaire 2008-2009, révèle de manière claire l'insatisfaction de l'Exécutif quant à la dépendance du pays des recettes tirées des exportations hydrocarbures. Depuis plus d'une décennie, l'économie nationale n'a pas réalisé de grands progrès dans la diversification de l'économie. En dépit des efforts consentis, les exportations hors hydrocarbures n'ont à ce jour pas connu le développement tant attendu. En dehors, des hydrocarbures, l'Algérie n'exporte que des fruits et légumes tels que les dattes, les produits du vin, les fertilisants et les déchets ferreux et non ferreux. Les exportations hors hydrocarbures connaissent chaque année une croissance qui se situe entre 15% et 30%. Des experts avancent un total de plus de 1,5 milliard de dollars d'ici à la fin de l'exercice 2008 contre environ 1,2 milliard de dollars en 2007. D'autres estiment qu'il est fort possible que les exportations hors hydrocarbures atteignent le montant de 2 milliards de dollars pour l'année en cours. Une chose est sûre, un tel montant reste encore faible par rapport aux potentialités existantes dans notre pays. Elles couvriront moins de 10% des importations de marchandises en 2008. Certes, ces ventes sont en progression à peine de 1 milliard de dollars, il y a quelques années jusqu'à 1,3 milliard de dollars en 2007, il n'en demeure pas moins que ce qui est exporté est loin d'égaler le potentiel existant. Il est exporté peu de produits manufacturés, agricoles et agroalimentaires. Les exportations hors hydrocarbures couvrent 10% des importations Notre pays continue d'exporter uniquement des produits bruts, des produits issus de la transformation des hydrocarbures… Cette dépendance des recettes du pétrole, qui, à leur tour dépendent des cours mondiaux, a également un impact sur le budget de l'Etat. Ainsi, le yoyo qui caractérise les prix du brut sur le marché international risque de remettre en cause les prévisions budgétaires du gouvernement. Le président de la République Abdelaziz Bouteflika l'a d'ores et déjà fait rappeler lors de l'une de ses dernières sorties. Pour le premier magistrat du pays, le budget de l'Etat n'est soutenable qu'avec un prix du baril de pétrole à 70 dollars. On peut comprendre par-là, qu'avec un niveau au-dessous des 70 dollars, au terme des trois prochaines années, durée conjecturée de la récession mondiale, le pays ne pourra pas faire face, voire à moyen terme aux dépenses d'investissements qui ne cessent d'augmenter. L'Etat ne peut de ce fait s'appuyer ou se contenter principalement des ressources engrangées grâce à la fiscalité pétrolière pour couvrir ses dépenses. “Notre système bancaire ne fait pas partie du système financier international, mais on peut considérer cette crise comme une douche froide qui doit nous faire réagir, car nous n'avons eu de cesse de chanter notre aisance financière”, prévient le premier ministre. Autrement dit, la solution ne peut émaner que de la diversification des ressources. Pour cela, il y a lieu de varier et de dynamiser d'autres activités liées à l'industrie, l'agriculture… Cet objectif ne peut être atteint, toutefois, qu'à l'aide d'un tissu industriel réformé et développé. L'implication des banques dans ce processus est en outre de mise. Or, les établissements financiers manifestent souvent leurs réticences à aider les PME. Ils justifient leur appréhension par le fait que ces entreprises n'ont pas suivi un programme de mise à niveau et leurs projets présentent des risques. Les banques sont tenues de ce fait à améliorer leurs techniques de financement et leur manière d'apprécier les projets des différents opérateurs économiques. Cet épineux problème devrait être l'un des points à traiter dans le processus de réforme financière enclenché depuis quelques années par les pouvoirs publics. Conséquence : les difficultés liées à la concurrence, le manque de rendement, l'absence de marché potentiel, le mauvais choix de l'activité… sont entre autres raisons à l'origine de la mortalité de près 3 000 entreprises chaque année. Devant une telle situation les pouvoirs publics doivent réaliser, une analyse pointue sur ce phénomène afin de savoir les véritables causes, proposer des solutions et décider de l'avenir de ces sociétés. L'Etat doit, en revanche, offrir cependant toutes les conditions nécessaires au développement des 20 000 à 25 000 autres entreprises en moyenne créées annuellement. Il s'agit désormais de mettre à leur disposition les moyens qui leur permettront de faire face aux éventuels méfaits de la crise financière. Car, à court ou à moyen terme, les effets de ce phénomène financier qui continue d'ébranler toutes les places dans le monde, ne tarderont pas à se manifester si l'Etat, d'un côté et l'opérateur économique de l'autre, ne se préparent pas sérieusement à d'éventuels impacts négatifs de cette crise. Pour le moment, il est opportun de maintenir le soutien des entreprises en les accompagnant dans leur évolution progressive. L'idée est de lancer des actions ciblées à travers une meilleure sélection des activités, voire des filières à développer quitte à réinjecter de l'argent dans ces entreprises pour qu'elles puissent jouer le jeu de la compétitivité. Ainsi, ces sociétés mettront sur le marché des produits de haute qualité et en quantités suffisantes pour l'ensemble de la population, voire les placer sur les marchés à l'étranger. Il reste également à collecter d'autres ressources fiscales en dehors des hydrocarbures, en un mot à mieux appréhender l'assiette fiscale, et développer ainsi la fiscalité ordinaire. L'argent qui échappe au fisc, en particulier, du fait des opérations du commerce extérieur ou des transactions de l'économie informelle reste énorme. Badreddine KHRIS