Depuis quelques jours, le commandement de la gendarmerie au niveau de la wilaya de Aïn Témouchent enquête sur une délicate affaire de trafic de ciment qui porte atteinte à l'économie nationale en général et au développement de la wilaya en particulier dans la mesure où Aïn Témouchent demeure ce grand chantier où se bouscule un grand nombre d'entreprises. La cimenterie de Béni-Saf est donc devenue un centre d'intérêt pour certains qui sont attirés par l'argent facile. En effet, une lutte implacable est menée ces derniers jours contre les spéculateurs qui se sont spécialisés dans le trafic du ciment. Plus de 100 tonnes de ciment viennent d'être saisies en un laps de quelque jours dont 40 tonnes pour la seule journée de ce lundi et qui étaient transportées dans un camion malaxeur en vrac et à bord de trois véhicules utilitaires de type Peugeot 404 bâchées. Six personnes ont été arrêtées lors de cette opération. Il s'agit de B. B., 54 ans, B. B., 34 ans, A. L., 26 ans, D. C., 45 ans, C. F., 44 ans, et S. M., 38 ans, qui sont tous originaires de Aïn Témouchent. Cependant, ces spéculateurs, qui viennent s'ajouter à 6 autres arrêtés la semaine écoulée et qui sont impliqués dans six affaires du même genre, où trois camions malaxeurs ont été saisis, risquent de ne pas être que le maillon faible de la chaîne et donc ne sont que de simples exécutants, et les services de sécurité ne veulent aucunement qu'ils soient des boucs émissaires. C'est pourquoi, et ce, d'après une source digne de foi, ordre est donné par le commandement de faire toute la lumière sur cette affaire qui risquera de débusquer de gros gibiers. L'enquête diligentée par la gendarmerie ne semble pas de tout repos dans la mesure où dans ce genre de situation des complicités et des relations d'intérêt se tissent quelque part, ce qui n'est pas fait pour faciliter le travail des enquêteurs. Une véritable mafia du ciment s'est donc constituée à Aïn Témouchent et qui peut à tout moment être derrière un coup d'arrêt du développement socioéconomique de la wilaya. Des revendeurs en possession de registres du commerce trouvent toutes les facilités du monde à se procurer de grandes quantités de ciment que seules les entreprises en bâtiment détenteurs de projets de construction ont ce privilège. Or, pour être servi au niveau de la cimenterie, il faut avoir ce fameux bon de livraison. Et c'est ce point précis qui intéresse au plus haut point les enquêteurs. Selon nos informations, la première phase des investigations qui sont menées dans la plus grande discrétion cible les vendeurs de bons de livraison de grandes quantités de ciment qui les rachètent et qui ne sont attribués en fait qu'aux seules entreprises, eu égard aux nombres importants de projets lancés aussi bien au niveau de la wilaya de Aïn Témouchent qu'à celui des wilayas limitrophes. Ce qui permettra de dénicher ceux qui les achètent et par ricochet, connaître la destination réelle de ce matériau de construction très prisé par… les autoconstructeurs. Où va donc toute cette quantité ? Il est utile de rappeler que seuls quatre revendeurs de ciment dont deux à Aïn Témouchent et autant à Béni-Saf sont autorisés à s'adonner à cette activité afin d'éviter une anarchie dans ce genre de commerce aux appétits alléchants. Des entrepôts clandestins, une véritable machine à sous Une fois livrée, la quantité de ciment en vrac est acheminée vers des entrepôts créés pour la circonstance et d'une façon illégale car sans autorisation des services concernés. Ces entrepôts, qui naissent comme des champignons dans la périphérie, au niveau des nouveaux lotissements de Béni-Saf et des localités avoisinantes sont considérées par les services de sécurité comme de véritables usines, des chaînes de distribution où sont emmagasinées des tonnes et des tonnes de ce matériau de construction et qui n'attendent que le moment venu pour les écouler, le temps que durera la crise de ciment tant souhaitée par les spéculateurs. La marchandise en vrac est donc mise dans des sacs imités sous le sceau de l'Erco de Béni-Saf ou d'une autre entreprise de production de ciment que les spéculateurs achètent chez certains revendeurs à raison de 10 DA l'unité. Les sacs de ciment sont cédés à des prix exorbitants pour une quantité de moins de 50 kg. À ce niveau, les enjeux sont énormes et les gains aussi. Ces entrepôts sont donc devenus par la force du temps de véritables machines à sous que la mafia du trafic de ciment semble en profiter. Dans le même sillage, la gendarmerie vient de saisir 15 tonnes de ciment de mauvaise qualité et l'arrestation d'un autre réseau de trafic de ciment et ce, même si celui-ci n'est pas de la même taille, son influence sur le marché est très importante, mais aussi sur la qualité des constructions qui peuvent constituer un danger. Ces derniers se sont spécialisés dans la récupération des restes de ciment qui sont grattés à l'intérieur des cocottes des camions malaxeurs ou récupérés du sol, et leur revente après les avoir mis dans des sacs à ciment imités. De mauvaise qualité, puisque le ciment est mélangé à de la terre, ce matériau qui est facilement écoulé en période de crise pourrait constituer un danger pour la construction s'il est utilisé dans les travaux de fondations, de dalles ou de poutres. Arrivera-t-on à dénicher les gros bonnets qui se cachent derrière ce grand trafic à grande échelle ? Les services de sécurité en charge de l'affaire ne jurent que par la réussite de leurs plans et promettent que leurs investigations donneront leurs fruits dans les jours à venir. M. LARADJ