Beaucoup d'observateurs de la scène politique américaine ont parié que Barack Obama ne s'impliquerait pas suffisamment dans les dossiers internationaux et qu'il en laisserait le soin à sa secrétaire d'Etat et, accessoirement, au vice-président. Rien n'est moins sûr et on en aura sans doute confirmation aujourd'hui même à l'occasion de son discours d'investiture. D'ailleurs, quand bien même il n'en eût jamais l'intention, l'actualité sanglante de Gaza ne lui en laisse plus le loisir. Il est fortement attendu sur ce dossier et, selon toute vraisemblance, Hillary Clinton se rendra dans la région, avec une feuille de route précise mais dont on ignore la teneur, sitôt la nouvelle administration installée. En Irak, malgré l'hostilité qu'il a toujours affichée à l'égard de l'intervention américaine et sa promesse, au cours de la campagne électorale, de rapatrier rapidement les quelque 150 000 soldats qui y sont toujours déployés, rien n'indique qu'il remettra fondamentalement en cause le plan de retrait entériné par les deux pays. Le grand pari d'Obama concerne l'Afghanistan où il a promis de renforcer substantiellement la présence militaire, l'objectif étant d'éradiquer la menace talibane et de priver la nébuleuse terroriste Al-Qaïda de l'une de ses principales bases arrière. Mais il sait que les Etats-Unis ne peuvent pas, seuls, supporter l'effort de guerre. Les partenaires européens, notamment, seront donc fortement sollicités. Or, une grande partie des opinions publiques du vieux continent et de plus en plus d'acteurs politiques se sont laissés convaincre qu'il n'y a pas de solution militaire en Afghanistan. Cette question risque donc d'être la pomme de discorde qui viendra ternir la lune de miel tant espérée d'un côté comme de l'autre de l'Atlantique. L'autre dossier qui polarisera l'attention du nouveau président américain est celui dit du nucléaire iranien. S'il considère que l'acquisition par l'Iran de l'arme nucléaire est inacceptable, avec tout ce que ce mot recèle de sens, il n'en demeure pas moins que, contrairement à George W. Bush, il prône le dialogue avec les autorités de Téhéran. Certes, il n'affuble plus le terme dialogue de l'adjectif “inconditionnel” comme il l'a fait pendant sa campagne électorale, mais il retient toujours cette option. Et là aussi se dresse un obstacle de taille. Cette fois, c'est le calendrier électoral iranien qui pose problème. L'élection présidentielle aura lieu au mois de juin prochain. D'ici là, pour des raisons de politique intérieure évidentes, aucun dialogue fiable ne peut être envisagé. Or, en cinq mois, beaucoup de choses peuvent se produire. Il n'est pas exclu que d'ici là Téhéran ait le temps de confectionner sa première bombe atomique, tout comme un bombardement israélien des installations nucléaires iraniennes est possible. Là aussi la tâche d'Obama est donc lourde et complexe. Il n'empêche qu'incontestablement, avec son élection, l'image de l'Amérique à travers le monde s'est considérablement améliorée. Son investiture aujourd'hui comme 44e président des Etats-Unis prouve, en tout cas, que le rêve de Martin Luther King n'était pas si fou et que ce pays a une incroyable capacité de régénération. M. A. B.