Contrairement à ses prédécesseurs, qui ont refusé de signer le protocole de Kyoto, le nouveau président américain a fait de la question climatique un des thème phare de sa campagne tout comme il s'est montré favorable à la concertation internationale. Le protocole de Kyoto est un traité qui prévoit un calendrier de réduction des émissions des gaz à effet de serre s'étalant jusqu'en 2012 et dont l'objectif est d'atteindre 5% de réduction globale. Cet accord, qui ne concerne en réalité que les pays développés, a été ratifié jusqu'à ce jour par 172 pays à l'exception notable des Etats-Unis. Cette situation risque de changer avec la récente élection du candidat démocrate Barak Obama à la tête de la superpuissance. Cependant, le calendrier tend à expirer et les objectifs sont loin d'être atteints. Et ce, malgré la publication du quatrième rapport du Groupe intergouvernemental sur l'évolution du climat (GIEC) qui établit clairement la responsabilité humaine dans le phénomène du réchauffement climatique. Le cinquième rapport est en cours de préparation et ce qui en a filtré fait état d'un constat encore plus sévère. À cause, notamment, de récents éléments scientifiques liés à la fonte des glaciers du pôle Nord. En plus des rapports quinquennaux du GIEC, les Conférences des parties (COP) se tiennent annuellement pour faire aboutir les négociations de réduction d'émission des gaz à effet de serre et donner corps aux dispositions prévues par la Convention cadre des Nations unies sur le changement climatique. La dernière en date, à savoir la COP 14, s'est tenue à Poznan (Pologne). Selon Mohamed Senouci, membre du GIEC et président d'honneur de l'Association de recherche sur le climat et l'environnement (Arce ), la COP 14 n'a pas réalisé beaucoup d'avancées. “La conférence de Poznan s'inscrivait à mi-chemin entre la COP 13 (Bali, 2007) et la COP 15, prévue à Copenhague fin 2009. À Bali, la conférence coïncidait avec la publication de l'alarmant 4e rapport du GIEC, tandis qu'à Copenhague, il s'agira de trouver un texte de remplacement du traité de Kyoto. C'est ce qui donnait à la Cop 14 toute son importance d'où la forte déception ressentie à sa clôture”, a-t-il expliqué. “À Poznan, il a été répété ce qui avait été dit à Bali, ce qui n'a pas donné lieu à des perspectives très optimistes d'autant que la rencontre coïncidait avec les premiers remous de la crise financière mondiale, chose qui a affaibli l'importance du climat dans les négociations. D'autres enjeux demeurent sans réponse après Poznan : vision partagée à long terme, réduction à moyen terme, adaptation, transferts technologiques et surtout financement”, a-t-il ajouté. Néanmoins, cette rencontre a tout de même abouti à quelques avancées telles que l'inclusion des mesures de protection des forêts. “C'est la première fois que dans les discussions la protection des forêts est récompensée et considérée comme étant une réduction des émissions de CO2”, a-t-il indiqué. La 15e COP qui se tiendra à Copenhague est, selon l'expert, un grand rendez-vous. “Nous sommes condamnés à trouver un texte qui remplacera celui de Kyoto. Ce dernier devenu caduc”, a-t-il dit. UE : une attitude décevante Alors que l'Union européenne s'était engagée à parler au nom de toute l'Europe, ce qui simplifiait énormément les négociations, l'accord signé à Bruxelles à la veille de la clôture des travaux de Poznan a sérieusement affaibli sa position de leader. “À l'issue des discussions de Poznan, nous attendions de l'UE qu'elle adopte une position plus forte. Cette dernière, après avoir présenté l'accord signé à Bruxelles et qui prévoit un engagement jugé encore faible, a provoqué une déception générale, notamment auprès des pays du Sud et de l'Afrique en premier lieu”, a-t-il expliqué. L'Algérie étant présidente du groupe Afrique, cet échec lui incomberait presque. Selon de nombreux experts en climat, les pays Africains adoptent des attitudes de victimisation et n'attendent de ces négociations que des solutions de dédommagements. Or, le groupe Afrique fait aussi partie du “G77+Chine” que les pays développés tentent de diviser en pays émergents et pays pauvres. Il est vrai que la Chine est désormais le premier pollueur, devançant les Etats-Unis, et il est donc de plus en plus difficile de négocier avec les pays développés qui utilisent cet argument pour casser les discussions. “L'Afrique n'a pas beaucoup de poids dans les négociations. Négocier, ce n'est pas se plaindre mais c'est plutôt faire des propositions. L'Afrique devrait mieux étudier les effets du changement climatique afin de mieux argumenter lors des négociations. Ceci exige des efforts importants dans le domaine scientifique, et notamment de modélisation, mais aussi en termes de capacités de négociations internationales”, affirme M. Senouci. À ce sujet, il ajoute que “le continent africain a tout intérêt à adopter une stratégie d'intégration claire de la question climatique dans toutes les stratégies de développement. À terme, cette démarche authentiquement africaine fixera également les termes des négociations des différents partenariats économiques avec les pays évolués pour s'assurer un développement durable intégrant la dimension des impacts du changement climatique. Cette attitude a, par exemple, été adoptée par le Brésil”. L'après-Kyoto s'annonce dans de nouvelles configurations, notamment grâce au récent changement de la position des Etats-Unis. En effet, que ce soit lors de sa campagne électorale ou encore après le vote de son plan de relance économique, Obama, contrairement à ses prédécesseurs, a toujours mis en évidence l'importance qu'il accorde à la dimension climat mais aussi à la concertation internationale et d'une certaine façon au multilatéralisme. Aujourd'hui, les espoirs se tournent donc vers lui pour faire avancer ce dossier. “Les Etats-Unis ne s'opposeront plus à ce qu'il y ait des négociations mondiales, notamment à travers l'ONU, ce qui est un fait nouveau”, explique M. Senouci avant d'ajouter que “les incertitudes se situent aujourd'hui du côté de l'Inde et de la Chine”. A. H.