On ne saurait soustraire tout commentaire sur l'opportunité du maintien de l'état d'urgence ou de sa levée aux considérations liées à l'exercice des libertés démocratiques. Hier encore, dans une localité où les blessures causées par le séisme sont encore béantes, un véhicule de patrouille de la gendarmerie a été pris sous le feu de terroristes embusqués. Bilan, un gendarme tué et un autre blessé. Il ne se passe plus de jour où l'on n'enregistre de victimes civiles ou militaires du terrorisme islamiste. Ce qui n'empêche personne, pas plus l'armée que cette cellule de réflexion constituée à l'initiative de Me Ali Yahia, de parler de la levée de l'état d'urgence. On sait pourtant que la mesure prise par le Haut comité d'Etat, il y a onze ans, de proclamer l'état d'urgence avait pour motif essentiel de donner aux pouvoirs publics les moyens de réduire l'islamisme armé. Et on sait aujourd'hui qu'en dépit des progrès indéniables accomplis dans cette voie, le terrorisme islamiste est toujours là, prêt à mettre à profit la moindre faille du système de défense, le moindre fléchissement de la vigilance pour prélever sa part de sang. Néanmoins, sauf à se dire que, jouant le jeu de la démocratie, le régime a voulu donner au combat contre le terrorisme des assises juridiques propres à un Etat de droit, l'action des forces de l'ordre ne requérait pas, en raison des conditions sévères dans lesquelles elle s'exerçait, d'un arsenal législatif exceptionnel. Face au danger qui menaçait les fondements mêmes de la République, la guerre à outrance contre l'islamisme armé relevait de la simple légitime défense. Cela étant, on ne saurait soustraire tout commentaire sur l'opportunité du maintien de l'état d'urgence ou de sa levée aux considérations liées à l'exercice des libertés individuelles et collectives. Il est difficile de contester que la mesure dictée par la nécessité de combattre les forces engagées dans la violence terroriste a été très souvent invoquée pour restreindre les champs d'expression de la démocratie. Du côté de la presse, comme de celui des intellectuels démocrates, on a trop souvent subi les conséquences des amalgames commis au nom de l'état d'urgence pour faire l'économie d'une réflexion sérieuse sur l'opportunité du débat que conclura le maintien ou la levée de l'état d'urgence. M. A.