À la veille de l'ouverture du Sommet sur la sécurité dans les pays du Sahel devant se tenir ce jeudi à Bamako, avant son report de dernière minute, le réseau Al-Qaïda pour le Maghreb islamique a revendiqué le kidnapping de deux diplomates canadiens et de quatre touristes européens dans la zone frontalière entre le Mali et le Niger. La bande sonore diffusée dans la nuit de mardi à mercredi, par le canal habituel des groupes terroristes, Al-Jazeera en l'occurrence, annonce “la bonne nouvelle du succès des moudjahidine dans la réalisation de deux opérations de qualité au Niger”, selon le porte-parole d'Al-Qaïda, un certain Salah Abou Mohammed. Les disparitions de Robert Fowler, envoyé spécial du secrétaire général de l'ONU pour le Niger, de son collègue Louis Gay et de leur chauffeur nigérien, Soumana Moukaila, ont été signalées à la mi-décembre à l'ouest de Niamey. Ils avaient au préalable effectué une visite privée dans une mine d'or exploitée par une société canadienne à Samira, le 14 décembre. Quatre touristes européens ont aussi été enlevés, le 22 janvier, dans la zone frontalière entre le Mali et le Niger. C'est la première fois que le territoire nigérien est utilisé par le réseau terroriste dans une action d'une telle envergure. Le réseau Al-Qaïda voudrait marquer sa présence lors du Sommet des chefs d'Etat de la région du Sahel dont l'ordre du jour portera justement sur la sécurité dans la région et les voies et moyens de renforcer la coopération en matière de lutte antiterroriste. Le report sine die du Sommet des chefs d'Etat du Sahel, pour “des raisons de calendrier” sont invoqués par certains leaders de la région, selon la diplomatie malienne. Mais le dernier coup médiatique d'Al-Qaïda ne serait pas tout à fait étranger, lorsqu'on sait que dès l'annonce de la disparition des diplomates et des autres touristes, ce fut le branle-bas de combat des chancelleries et des experts dans la lutte antiterroriste pour essayer de retrouver la trace des ravisseurs et tenter de nouer un contact avec eux, pour éviter l'assaut des forces de sécurité que de nombreuses capitales occidentales voudraient toujours éviter dans ce genre de situations. Le réseau Al-Qaïda est connu pour avoir organisé des opérations de kidnapping dans les vastes contrées désertiques. La dernière en date remonte à 2008 lorsque deux touristes autrichiens avaient été retenus en otages, en Tunisie, avant d'atterrir au nord du Mali, via l'Algérie. Après plusieurs mois de tractations, les autorités autrichiennes ont fini par céder au chantage des terroristes et ont dû verser une rançon pour libérer leurs otages. Les Allemands avaient déjà fait pareil lors de la prise d'otages de leurs ressortissants. Ce qui n'est pas pour plaire aux pays en butte à la menace terroriste, à l'image de l'Algérie qui, par le biais de son ministre délégué aux Affaires maghrébines et africaines, Abdelkader Messahel, estime que “payer des rançons, c'est financer le terrorisme”. S'il est vrai que les frontières des pays du Sahel restent “poreuses” et difficilement contrôlables, il est aussi vrai que l'attitude de certains pays occidentaux préoccupés par la seule survie de leurs ressortissants, encourage les groupes terroristes à privilégier ce genre d'actions pour renflouer leurs caisses et se procurer les armes nécessaires pour la poursuite de leur sale besogne, sachant que des marchés d'armes clandestins pullulent en Afrique australe. Mais au-delà de cette opération aux répercussions médiatiques certaines, le réseau Al-Qaïda, qui a subi ces derniers temps de sérieux coups en Algérie, avec l'élimination de plusieurs “émirs” de premier plan et la reddition de nombreux autres, tente de faire diversion, en ciblant des ressortissants occidentaux, histoire de revenir dans les bonnes grâces du commandement d'Al-Qaïda de Oussama Ben Laden et Aymen Zawahiri, notamment après les multiples manifestations de désapprobation qui ont suivi les attentats suicide à Alger et dans sa périphérie. Azzeddine Bensouiah