Bientôt débutera la campagne électorale. Une campagne sans intérêt politique, les choses étant entendues. Mais l'expérience n'est pas sans intérêt intellectuel. En 20 ans de multipartisme, bientôt quatre scrutins présidentiels, autant d'assemblées nationales et d'élections locales. L'Algérie aura fait la démonstration renouvelée qu'une dictature peut aisément s'accommoder d'élections “démocratiques”. À chaque échéance, l'émotion gagne les candides puristes, mais en vingt ans de procédures multipartites, il n'y a pas eu un seul vote démocratique. Les techniques évoluent en fonction de l'état de la société et des moyens de l'Etat, toujours à la disposition du pouvoir en place. En 1991, à l'occasion des mémorables élections législatives “propres et honnêtes”, le pouvoir avait partagé ces moyens avec le FIS détenteur de l'écrasante majorité des municipalités : la démission du pouvoir central a laissé la voie libre à l'intimidation et à la fraude pour les pouvoirs locaux. Depuis, la démocratie continue à payer ce faux départ. L'intermède Boudiaf passé, la violence s'étant manifestée, l'Algérie est retournée à son péché originel, reposant la question de son destin en termes binaires : l'intégrisme ou la dictature. Depuis, son histoire politique se résume en une inlassable quête d'une synthèse des deux dans un système qui repose sur l'autoritarisme politique et le populisme idéologique. L'élection présidentielle de 1995 a profité de la mobilisation antiterroriste. Mais si elle fut l'occasion, pour la société, de dépasser la pression islamiste, elle subit un encadrement musclé de la part d'un dispositif administratif et sécuritaire, justifiant tacitement son hégémonie politique par l'impératif d'ordre public. L'ascendant de l'administration sur l'issue des consultations nationales s'exprimait de manière encore plus flagrante dans les résultats des législatives suivantes, en 1997. Le FLN qui, auparavant, s'était, pour partie, “converti” à l'islamisme et, pour partie, désengagé d'un contexte de lutte, et non plus de paisible rente, avait déserté les institutions. Le RND, créé pour pallier cette défaillance, se fit très justement surnommer “machine électorale”. Appellation qu'il revendique à chaque rendez-vous, sans que l'on sache s'il y met quelque pointe d'ironie. Pendant ce temps-là, le pacte qui se dessinait, et que fondait cette recherche désespérée d'un arrangement entre l'idéologie dominante et le système de domination, appelait à une restauration du FLN dans son expression islamo-populiste la plus rétrograde. Le projet mis en œuvre piétine. Tous les cinq ans, il faut recommencer l'ouvrage de Sisyphe. Le prix est payé en termes de régression politique et de retard de développement. À chaque consultation, et depuis 1999, la décision électorale est forcée à coups de communication totale, d'intimidation des acteurs visibles de la société, d'excès budgétaires et, bien sûr, de pressions de toutes natures. Avec des variantes, selon les circonstances sociales et politiques. En 2009, ce ne sera pas une élection moins démocratique que les précédentes. L'histoire de la “démocratie” algérienne, c'est l'histoire singulière d'un autoritarisme habillé de multipartisme. M. H.