Le week-end passé, le Théâtre national d'Alger Mahieddine-Bachtarzi a abrité la représentation théâtrale Errajoulou el-aâri (L'homme nu ou dénudé, plutôt mis à nu). Texte de Wadi' Ismander. Mise en scène et réalisation, Belkacem Amar Mohamed. Errajoul el-aâri, c'est l'histoire d'un troubadour ou un goual qui sillonne, en compagnie de son fils, divers pays, diverses contrées, racontant des histoires, racontant la vie et ses aléas. Cet homme est aussi un marionnettiste. D'ailleurs, il possède quatre, voire cinq marionnettes. Chacune a un nom. Chacune véhicule une histoire, celle d'une vie, celle de leur vie. D'ailleurs, les noms sont significatifs : il y a Boukhdoud, le sage, Moustache, le marin et le bon vivant, Bounif, allusion à ceux qui n'en ont pas, et Karkouz, ce pantin qui voulait changer le cours de sa vie. La sienne ou celle de ses comparses ? C'est aussi l'histoire d'un homme, porté disparu, qui refait surface. Au départ, il est complètement désarticulé. Il a des mouvements saccadés, petits. À croire qu'il a de grandes difficultés à se mouvoir. Cependant, son apparition dérange, d'autant plus qu'il apparaît au milieu d'une salle de tribunal, jetant, au départ, moult interrogations, qui se transforment au fil de la pièce, en peur, effroi et suspicion. Le juge et sa cour lui posent des questions sur sa présence, ô combien incongrue, qui, las de ne rencontrer soit une réponse en boucle, soit un mur de paroles acérées, le jettent en prison, attribuant ce comportement à une organisation secrète voulant nuire au pays, ou à un groupe de radicaux cherchant déstabilisation et destruction… Ce n'est qu'un peu plus tard que la cour apprend la véritable identité de ce personnage venu de nulle part et sans identité (Une identité spoliée !). C'est la panique, car si la nouvelle de sa présence venait à être ébruitée, c'est l'intégrité de cette cour qui serait en jeu. Les tractations commencent pour étouffer l'affaire. Le pouvoir se dérange en personne pour trouver un compromis… Il est prêt à tout, sauf à capituler. On promet monts et merveilles pourvu qu'il accepte la solution proposée et surtout se taise… En vain ! Errajoul el-aâri, c'est aussi une sorte de mise à nu. Par des sous-entendus, l'auteur crie, par le biais de la voix du personnage principal, les atrocités et les exactions commises sur le peuple palestinien. Tous les ingrédients y sont : les tractations pour le partage de la Palestine, le combat avec les pierres, ce sentiment d'abandon, le silence de certains Etats et autres institutions internationales… Cependant, ce qui gênait dans le jeu des comédiens, c'est cette lenteur dans l'action, enrobée d'une certaine raideur, figeant le geste et le verbe. D'ailleurs, le texte, porteur de sens malgré sa poésie, perdait de sa verve et surtout de son intensité. Par ailleurs, à certains moments – censés être des moments forts –, la pièce s'essoufflait. Car au lieu de monter, ça s'arrête, ça reprend, ça déroute. Une sorte de flou. Voulu ou pas, la question reste posée. Les intonations de certains comédiens frisaient le sur-joué. Alors que d'autres chantonnaient. Autre détail, et de taille : la chorégraphie ! Des pas de danse ont été exécutés par les comédiens, puisés, pour la plupart, d'une danse populaire (où est la création ?). À croire qu'en optant pour la danse, le metteur en scène voulait meubler ? Dommage, car malgré ces petits incidents ou détails, le thème reste intense et profond : la Palestine et ses malheurs. D'ailleurs, cette pièce entre dans le cadre de Al-Qods, capitale de la culture arabe 2009 et aussi dans les activités théâtrales en faveur de la Palestine et de la population de Gaza, initiées par le Théâtre nationale d'Alger. Amine IDJER