Une nébuleuse de bandits quadrille le Grand Sahara, de la Mauritanie au Soudan, dans cette zone de non droit ouverte à tous les trafics : armes, drogue, personnes, voitures volées.. Niamey a tenu les 25 et 26 février un forum de “la Paix dans le nord du Niger et dans le nord du Mali” mais il faudra attendre encore longtemps pour voir si cette réunion aura des effets. La question des touaregs est un casse-tête dans ces deux pays et malgré des similitudes, Niamey et Bamako ont des approches différentes de la question. La réunion nigérienne a le mérite d'avoir été tenue, ne serait-ce que parce que les autorités du Niger ont jusqu'ici nié la question touarègue, la réduisant à un problème de grand banditisme ! Le Haut-commissaire à la restauration de la paix au Niger, Mohamed Anako, n'aurait pas pu l'organiser sans l'aval et le soutien des présidents malien et nigérien. Les leaders d'opinion des différentes communautés qui cohabitent dans les zones frontalières entre le Niger et le Mali, notables touaregs, songhaï, peuls, arabes et Toubous se sont retrouvés pendant deux jours pour évoquer les problèmes de la zone sahélienne depuis une vingtaine d'années : trafics illicites, banditisme et salafistes. Mais derrière ces maux, le Forum devait surtout servir à ouvrir un dialogue entre le gouvernement nigérien et le Mouvement des Nigériens pour la justice, le parti des Touaregs, qui se regardaient en chiens de faïence. Les autorités nigériennes sont d'ailleurs restées très prudentes. Pour elles, il existe bien un problème touareg, mais il se réduit à une dimension criminelle et non politique ni sociale, au sein de cette population qui réclame une meilleure répartition des richesses tirées notamment de l'uranium extrait par les Français du groupe Areva dans leur région d'origine, au Sud de l'Algérie. Une nébuleuse de bandits quadrille le Grand Sahara, de la Mauritanie au Soudan, dans cette zone de non-droit ouverte à tous les trafics : armes, drogue, personnes, voitures volées... Les enlèvements sont devenus un de leurs fonds de commerce et, à ce titre, un diplomate onusien originaire d'un grand pays est une prise de grande valeur, devait encore dénoncer fermement durant les travaux sur la paix, le ministre nigérien de l'Intérieur. Mais qu'on ne s'y trompe pas, le Niger ne peut plus rester dans cette posture. Et ce n'est pas pour rien si le Haut-commissaire à la restauration de la paix au Niger veut qu'il y ait une suite à cette rencontre : les conclusions de ce forum seront portées à l'appréciation des chefs d'Etat du Mali et du Niger. “Nous souhaiterions aussi après ce forum que ces communautés aillent parler de vive voix avec tous les groupes armés qui opèrent dans ces zones, parce qu'ils sont considérés comme étant leurs enfants”, explique-t-il, pour qu'il y ait “définitivement la paix dans cet espace, pour qu'enfin les gens développent les régions”. Le Mouvement des Nigériens pour la justice (MNJ), le principal groupe touareg, très actif depuis 2007 dans la région d'Agadez, n'a pas pris part à ce forum mais il n'a été question que de lui. En outre, Mohamed Anako a une conviction : “Pour que la solution soit définitive, le problème des zones nord du Mali et du Niger doit être réglé en même temps dans les deux pays”. En effet, et bien que la situation est différente dans les deux pays, l'insécurité est identique. Niamey empruntera-t-il le même chemin que Bamako qui a choisi la négociation pour résoudre la crise dans son nord ? À ce jour, aucun contact officiel n'a eu lieu entre les autorités et le MNJ, retranché dans les massifs de l'Aïr, dans le nord du Niger où le président Mamadou Tandja a d'ailleurs reconduit et pour trois mois les pouvoirs exceptionnels d'intervention accordés depuis 2007 à l'armée dans cette zone. Si Bamako a recouru à la médiation algérienne, Niamey, selon l'hebdomadaire indépendant nigérien Le Républicain, fait appel aux Libyens. Le président du Niger aurait demandé mi-février à Mouammar Kadhafi, président en exercice de l'Union africaine, de s'investir à fond pour le règlement de la situation générée par la rébellion des touaregs du Niger. Le MNJ devrait remettre dans un mois ses revendications à un médiateur libyen, toujours d'après Le Républicain. La situation donne l'impression de s'accélérer depuis l'abandon par les Touaregs Maliens de la force par les armes et sa détermination à voir s'appliquer les accords d'Alger qui avaient ouvert leur réconciliation avec le pouvoir de Bamako. Mais, il reste des inconnues tel le report du sommet qui devait se tenir le 19 février à Bamako sur “La sécurité et la paix dans la bande sahélo-saharienne” avec les dirigeants du Mali, du Burkina Faso, du Niger, d'Algérie, de Libye et du Tchad. Il a été reporté, officiellement pour des raisons de calendrier ! Il faut espérer que ce n'est que pour donner le temps aux Nigériens de mettre de l'ordre dans leurs affaires. D. Bouatta