C'est l'échec de leur projet de saisine du président de la République qui est derrière leur sortie publique. S'achemine-t-on vers un scénario similaire à celui de 1999 quand six candidats à l'élection présidentielle (Aït Ahmed, Djaballah, Hamrouche, Khatib, Sifi et Taleb Ibrahimi) se sont retirés de la course à la veille du scrutin ? L'hypothèse est, depuis hier, du domaine du possible. Des représentants de trois prétendants à la magistrature suprême, Fawzi Rebaïne, Mohamed Saïd et Djahid Younsi, ont agité, lors d'une conférence de presse conjointe animée au siège du parti Ahd 54, le spectre du retrait de leurs mentors. “Comme première étape, nous avons décidé de tenir cette conférence pour alerter l'opinion publique quant à l'inertie dont fait preuve la commission de surveillance de l'élection présidentielle. D'autres scénarios sont possibles. Avant la date du 9, même l'éventualité du retrait de nos candidats n'est pas exclue même si pour le moment aucune décision n'est prise”, a souligné Rachid Lourari, représentant du candidat Mohamed Saïd. Pour Kamel Abdeslam, représentant de Djahid Younsi, le silence de la commission devant les dérapages qui ont émaillé la campagne électorale est “une forme de fraude anticipée”. Et Mohamed Seddiki, représentant de Fawzi Rebaïne, de renchérir : “Si les choses restent en l'état, cela veut dire que l'élection sera truquée.” Mais ils ont tenu à préciser que les différents candidats n'ont pris aucune décision dans ce sens. Même l'éventualité de se retirer de la commission présidée par Mohamed Teguia est pour le moment écartée. Et pour cause, ils ne perdent pas espoir de voir les autorités corriger le tir même si la campagne électorale tire à sa fin. “Nous n'avons aucun complexe à saisir Abdelaziz Bouteflika qui est toujours président de la République. Nous espérons que les autorités nous répondront et que l'élection se tiendra dans la transparence. Nous demandons à ce que les candidats soient mis sur un pied d'égalité et que le meilleur l'emporte”, soutient le représentant de Rebaïne. D'ailleurs, c'est l'échec de leur projet de saisine du président de la République qui est derrière leur sortie publique. Une commission qu'ils ont accusée de tous les maux. “La commission est dans une situation de blocage. Elle a montré ses limites”, regrette M. Lourari. Tout en regrettant les écueils et blocages qui ont accompagné toutes les tentatives des membres de la commission de se réunir, il a dénoncé le peu d'empressement du président de la commission à prendre en charge les doléances des représentants des candidats qui ont porté à sa connaissance de multiples dérapages qui ont émaillé la campagne électorale (l'immobilisme de l'administration face à un affichage anarchique, fermeture des villes visitées par Bouteflika pendant des heures au grand dam des autres candidats,…). Mais ce qui a fait le plus de mal aux trois candidats est le fait qu'Ahmed Ouyahia, saisi à deux reprises en sa qualité de président de la Commission nationale chargée de l'organisation de l'élection présidentielle, n'a même pas daigné leur répondre. Se disant “très surpris” par la sortie de Mohamed Teguia qui a juré que “tout va bien”, le représentant de Ahd 54 a assuré : “Nous avons beaucoup protesté au sein de la commission de surveillance de l'élection. Notre parti a déposé plus de 30 lettres de protestations. Mais M. Teguia a toujours eu la même réponse : je ne peux rien : (Allah Ghaleb).” Très remonté, M. Seddiki de Ahd 54 est allé jusqu'à reprocher à l'instance présidée par l'ancien ministre de la Justice de s'être transformée en comité de soutien en faveur du candidat Bouteflika. Simple question : devant un tel parti pris, pourquoi les candidats restent-ils toujours en course ? “Nous avons accepté le défi de participer à l'élection dans le but d'asseoir la démocratie qui ne se construit pas en 10 ou 20 ans. C'est un long combat”, explique le représentant de Mohamed Saïd. Et M. Abdeslam Kamel d'El-Islah d'ajouter : “Ne pas participer à l'élection est de nature à ôter à la fonction présidentielle toute légitimité sur la scène internationale. Les contrecoups pour la souveraineté du pays sont énormes.”