La décision du chef de l'Etat, annoncée le 28 février 2009 à Biskra, au sujet de l'effacement des dettes des agriculteurs et éleveurs à l'échelle nationale, semble obéir à une politique de deux poids deux mesures. À Tizi Ouzou, en tout cas, les agriculteurs et assimilés, regroupés dans un cadre associatif, crient à l'exclusion. L'association des agriculteurs et assimilés de la wilaya de Tizi Ouzou en appelle au premier magistrat du pays, devant ce qu'elle assimile à une injustice. “Monsieur le président, aidez-nous car à travers nous, c'est toute l'agriculture de notre pays que vous aiderez”, écrivent les agriculteurs affiliés à cette association dans une correspondance au chef de l'Etat. Ces deniers sont des ingénieurs et autres techniciens supérieurs qui ont bénéficié, en 2002, d'un matériel agricole dans le cadre du programme de soutien à l'investissement d'appui à l'exploitation agricole du PNDA (Plan national de développement agricole). Ils ont acquis ce matériel à crédit avec le partenaire Salem (Société algérienne de leasing du mobilier), aujourd'hui en liquidation. Ce programme a été initié en direction des jeunes diplômés dans le domaine agricole. Une bouée de sauvetage pour ces jeunes qui ont failli moisir dans l'oisiveté et le chômage. Jusque-là, tout était bien dans le meilleur des mondes. Seulement voilà : la société de leasing a fait face à des problèmes qui ont fini par précipiter sa dissolution, laissant cet ambitieux programme au milieu du gué. Pourtant, il est écrit noir sur blanc dans le cahier des charges que la société partenaire devait mettre à la disposition des agriculteurs bénéficiaires tout le matériel prévu dans ce cadre. Ça n'a pas été le cas. Les réclamations faites par les bénéficiaires pour la finalisation du programme n'ont pas été suivies d'effet. Les bénéficiaires ont été alors confrontés à de sérieux problèmes. Certains des bénéficiaires n'ont pas acquis tout le matériel prévu dans le protocole. Or, le matériel est indispensable à la rentabilité de l'activité. C'est ainsi qu'à titre d'exemple, des agriculteurs n'ont acquis qu'un tracteur pneumatique. Des kits remis aux agriculteurs, lors d'une visite du ministre de l'Agriculture de l'époque à Tizi Ouzou, n'étaient pas adaptés aux spécificités géographiques et culturales de la région. Même les papiers du matériel acquis n'ont pas été remis aux bénéficiaires. En outre, la non-élaboration dans des délais raisonnables des échéanciers de remboursement couplée à l'absence d'un plan de charge, bien qu'il soit prévu dans le programme de soutien aux agriculteurs, tout cela n'a fait que compliquer les choses pour ces agriculteurs qui ne sont pas au bout de leur peine. Alors que les démarches entreprises pour le règlement de leurs problèmes n'aboutissaient pas, les agriculteurs sont tombés des nues en apprenant qu'ils devaient payer rubis sur l'ongle les arriérés d'échéances impayées. Des arriérés qui sont bien entendu majorés de pénalités de retard. “Nous étions des chômeurs, nous risquons à présent de devenir des chômeurs endettés”, se lamentent les membres de l'Association des agriculteurs et assimilés de Tizi Ouzou. “Nous sommes dans l'impossibilité de rembourser tout le passif”, avertit-on. C'est pourquoi la décision du chef de l'Etat d'effacer les dettes des agriculteurs et éleveurs algériens est tombée à point nommé pour ces agriculteurs prestataires de service agricole qui voyaient l'horizon agricole bouché. Mais voilà, ils viennent d'apprendre auprès des chargés de la liquidation de l'ex-Salem qu'ils seraient exclus de la mesure d'effacement des dettes. Ce qui a provoqué une grande inquiétude parmi les agriculteurs de Tizi Ouzou. Or, jusque-là, quelque 400 000 dossiers sont en étude au niveau de la commission gouvernementale installée à cet effet. La liste des agriculteurs, qui devraient bénéficier de la mesure présidentielle, n'est pas encore arrêtée, croit-on savoir.