Une dynamique certaine semble s'enclencher dans le but d'inciter les groupes terroristes à accepter le choix de la paix et de la réconciliation nationale ; un choix qualifié désormais d'inéluctable par les repentis, dont les anciens “émirs”. Les terroristes encore en armes en Algérie vont-ils répondre aux appels multiples qui leur sont lancés notamment par des anciens “émirs” considérés aujourd'hui comme des “repentis” ? Avec des prises de position de plus en plus tranchées en faveur de la réconciliation nationale et de la paix, la scène nationale semble, en tout cas, s'emballer ces derniers temps autour de la probabilité d'une reddition générale. Rien n'indique véritablement que les choses vont vraiment aller dans ce sens. Le langage de Hattab, Madani Mezrag et autres Layada a, certes, un ton clair vers le retour à l'entente et l'apaisement définitif, et les uns et les autres veulent se montrer tout à fait disponibles à coopérer dans un dossier pour le moins pénible. Mais la solution politique annoncée ou, à tout le moins souhaitée, n'est pas aisée, si tant est que tout le monde est d'accord au préalable qu'il n'y ait pas de surenchères de tous les côtés, et que la paix se fasse pour le seul intérêt d'un pays meurtri par plusieurs années de troubles. Le groupe de 20 terroristes en négociations à Bouira avec les autorités, signalés encore tout dernièrement par la presse, pourrait être, si le fait se vérifiait, un des signes précurseurs d'une déferlante de repentis par groupes entiers et de plus en plus nombreux, comme ce fut le cas, par exemple, lors de la reddition de Madani Mezrag et de ses troupes de l'AIS en 1999, et l'on se souvient qu'à cette date, de longues tractations avaient eu lieu. L'AIS avait même promis d'élargir le champ d'application de sa reddition en masse et d'endiguer l'action parmi les résidus du GIA qu'elle qualifiait alors de déviationniste. Le président Bouteflika avait alors promis de conférer à l'arrêt des tueries une assise juridique. L'on connaît bien sûr la suite : la concorde civile, puis la Charte pour la paix et la réconciliation nationale. Si la question demeure pendante de savoir par conséquent si ces appels vont être entendus, il est toutefois vrai que le nombre de terroristes aujourd'hui a considérablement diminué ; il y en aurait entre 400 et 800 encore en activité, disposant de suffisamment de vivres et de matériel leur conférant une réelle nuisance, comme en témoignent les attentats qu'ils continuent de perpétrer. Lors d'une conférence sur la Charte pour la paix et la réconciliation nationale, organisée à Alger, Abdelaziz Belkhadem, le secrétaire général du FLN, avait précisé qu'au moins 6 000 armes ont été remises aux autorités depuis la mise en application de la charte, en mars 2006. Ce mouvement d'affaiblissement des capacités de nuisance du terrorisme en Algérie ainsi que les nombreuses frappes de l'armée auraient donc permis de dégarnir les maquis islamistes, sans toutefois en venir à bout. À terme, les prises de position d'anciens chefs terroristes en faveur de la paix vont-elles jouer, elles aussi, dans le fléchissement des irréductibles du GSPC ? On peut le penser dans la mesure où la plupart des repentis n'hésitent plus à qualifier les grandes lignes de la réconciliation de “choix inéluctable”, laissant entendre par là même qu'il est illusoire d'en attendre plus. Du moins pour le moment. L'on peut conjecturer ainsi qu'il y a peut-être plus de conditions favorables à la reddition que jamais auparavant. Cependant, de nombreux observateurs vont jusqu'à affirmer à présent que cette dynamique de la repentance tous azimuts proposée par ceux qui ont déposé les armes à l'intention de leurs anciens acolytes n'est certainement pas le fruit d'un simple hasard de calendrier, mais s'inscrirait en droite ligne d'une stratégie médiatique qui vise à pousser le président de la République à décider de prendre les devants en allant jusqu'au bout du pardon et de prononcer donc une amnistie générale, en tant que premier magistrat du pays. À l'heure actuelle, il n'y a rien d'officiel bien entendu. Même si une nouvelle offre de paix aux derniers irréductibles encore en armes reste plausible, il faut sans doute l'envisager à l'aune de la condition que le chef de l'Etat avait mis en avant lors de la dernière campagne électorale. “Il n'y aura pas d'amnistie générale avant le dépôt total des armes”, avait-il déclaré à Chlef. Les manœuvres en cours, engagées à grands renforts médiatiques, auraient-elles pour but de parvenir à un tel dépôt des armes prélude à ladite amnistie générale ? Le pari est par trop optimiste, mais visiblement certains continuent d'y croire.