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“La médiation vise à protéger les rapports sociaux” M. Bouzertini Djamel, directeur général du centre de recherche juridique et judiciaire, à “Liberté”
Pour notre interlocuteur, la médiation “n'est pas nouvelle, elle a de tout temps existé”. Liberté : En quoi consiste la médiation et quelles sont les affaires qu'elle doit traiter ? M. Bouzertini : La médiation, ici en Algérie comme partout ailleurs dans le monde, c'est quand deux personnes en conflit demandent une médiation pour trouver une issue à leur antagonisme. La chose n'est pas nouvelle, puisqu'elle a de tout temps existé chez nous à travers ce qu'on appelle tadjmaât. Aussi, il y a l'imam qui joue souvent le rôle de médiateur dans notre société, comme cela existe aussi chez les ibadites et partout ailleurs. C'est pour ainsi vous dire que la médiation consiste à mettre les antagonistes d'accord par rapport à ce qui les sépare devant le juge. Cette médiation à caractère social, le législateur algérien l'a instituée ; cela dit il ne sera pas médiateur celui qui veut, car cela répond à des critères et le médiateur doit être agréé par le ministère de la Justice. Il y a des conditions d'accès à cette fonction ; par exemple, le médiateur ne doit pas avoir d'antécédents judiciaires. Dans ce sens, il y a des enquêtes administratives qui se font automatiquement. Aussi, une fois désigné, le médiateur est indépendant, son rôle consiste à dépassionner les conflits. Il faut savoir également qu'il faut, dans le cas de litige, séparer les faits des sentiments. Le juge travaille sur les faits et le médiateur s'attaque au côté subjectif pour permettre le dialogue. C'est cela la médiation et son rôle de manière générale. Quelles sont les origines de cette initiative ? Est-elle en relation avec la surcharge que connaissent aujourd'hui les centres pénitentiaires ou avec la pression du nombre de dossiers qui augmente de jour en jour ? Cette initiative n'a rien à voir avec la surcharge des centres pénitentiaires. Ce qui a été débattu durant ce séminaire, c'est la médiation civile qui a pour objectif de mettre fin aux conflits et de donner satisfaction à toutes les parties, visant avant toute chose la paix sociale. Aujourd'hui, le plus important, c'est qu'il y ait une réelle prise en charge du justiciable, qu'il y ait ce sentiment. C'est vrai aussi que le médiateur aura à traiter des dossiers et des affaires. Cela permet forcément au juge de se décharger quelque part et de se concentrer sur les dossiers que je dirai “lourds”. Quelles sont les principales recommandations de ce séminaire ? L'une des principales recommandations de ce séminaire est de multiplier ce genre d'initiatives, et ce, à travers tout le territoire du pays, et de lancer, par la même occasion, des formations dans ce sens. La formation est très importante et, à l'image des pays européens, la médiation devra inévitablement se charger des affaires pénales parce que, jusque-là, on ne parlait que des affaires civiles. Il y a des conflits intellectuels, c'est-à-dire un litige qui oppose par exemple deux marques, comme aussi les grosses affaires commerciales. Ce sont là des affaires spécifiques et pour cela il faut un médiateur bien formé dans ce sens. Aujourd'hui, le centre de recherche des affaires juridiques et judiciaires tentera de mettre sur pied un programme pour étudier la meilleure façon de former un médiateur. D'ailleurs, l'université sera associée à ce projet et elle délivrera des diplômes de médiateur, comme pour les avocats il faut un certificat d'aptitude professionnelle. Enfin, l'autre recommandation de ce séminaire, c'est bien la maturité dont ont fait preuve tous les participants et je trouve cela de bon augure pour la médiation dans notre pays. Récemment, dans son discours, Tayeb Belaïz a parlé du nouveau code pénal introduisant la médiation comme une nouvelle forme de règlement des litiges, insistant beaucoup plus sur la médiation pénale. Pensez-vous que cela va réussir ? Vous savez, la médiation pénale comme la médiation civile visent à protéger les rapports sociaux et, dans ce domaine, on n'est pas les premiers, car les pays anglo-saxons étaient les précurseurs. C'est la Norvège, suivie par l'Angleterre, le Canada puis la France. Cela dit, l'essentiel dans la médiation, c'est que la victime soit réparée et que la médiation élimine les poursuites pénales. D'ailleurs, on commencera d'abord par s'attaquer à quelques infractions avant de la généraliser. Il y a aussi la diffamation qui sera traitée à travers un médiateur pour justement éviter toute poursuite pénale. Pour répondre à votre question, je ne vois pas pourquoi elle ne va pas réussir, il n'y a aucune raison pour cela. À présent, il faut recréer le débat et permettre une vulgarisation de ce projet. C. m.