Si une pénurie de sable, ce matériau indispensable à la construction, venait à s'ajouter aux prix déjà exorbitants du ciment, à la faiblesse de l'outil de réalisation et aux nombreuses autres contraintes d'ordre foncier et administratif, de nombreux chantiers en cours ne tarderaient pas à connaître de sérieux blocages. La Direction de l'hydraulique (DHW) de la wilaya de Tizi Ouzou a annoncé le 20 août dernier, via l'APS, que l'extraction du sable de l'oued Sebaou sera interdite à partir du 31 de ce même mois, date à laquelle expire l'autorisation provisoire accordée aux sablières par un décret présidentiel qui a modifié et complété la loi du 05-12-2005 relative à l'eau, et ce, en soumettant, selon les cas, cette activité d'extraction de sable soit à un cahier des charges précis ou à la concession, sous réserve d'une étude d'impact établie conformément à la législation et à la réglementation en vigueur. Selon le communiqué, les propriétaires des sablières exerçant dans la wilaya de Tizi Ouzou ont été invités dans des correspondances qui leur ont été adressées “à cesser l'extraction de matériaux alluvionnaires en prenant les dispositions nécessaires avant la date butoir du 31 août”. Au total, 8 sablières sont concernées par cette décision alors que la neuvième, à savoir celle de Ramdani Saïd, exerçant à Bordj Sebaou, dans la commune de Sidi Nâamane, depuis 1986, s'est vu déjà refuser, depuis l'année 2005, le renouvellement par les autorités administratives de l'autorisation d'exploitation pour des raisons restées floues puisqu'un arrêté de reconduction a été établi par le service de l'hydraulique au profit du propriétaire. Pour rappel, une similaire décision de fermeture des sablières a été déjà prise, durant l'année 2005, par un arrêté du wali de Tizi Ouzou qui a même ordonné le démantèlement des sablières installées dans l'oued Sebaou. Une décision qui n'a pas tardé à être annulée en raison de la pénurie de sable qui, faute de carrières de substitution, a paralysé quasiment tous les secteurs, particulièrement ceux du bâtiment et des travaux publics. La décision a été prise pour arrêter le pillage du sable, couper l'herbe sous les pieds de la maffia du sable qui commençait à avoir des tentacules longues et aussi de mettre fin au massacre environnemental qui a frappé de plein fouet l'oued Sebaou mais, hélas, les autorités n'ont pas tardé à se rendre compte qu'à travers leur décision elles n'ont fait que livrer l'oued en question sur un plateau d'argent à la maffia du sable tout en donnant un coup de frein déjà au développement dans la wilaya qui, déjà, est dans une situation peu reluisante. Aujourd'hui que les pouvoirs publics sont revenus à la charge, en décidant de mettre fin à l'activité des sablières, il y a sans doute lieu de se poser la question : quel avenir sera réservé aux chantiers, et donc au développement, à Tizi Ouzou ? Le secteur du bâtiment est sans doute le premier à accuser le coup. Si une pénurie de sable, ce matériau indispensable à la construction, venait à s'ajouter aux prix déjà exorbitants du ciment, à la faiblesse de l'outil de réalisation et aux nombreuses autres contraintes d'ordre foncier et administratif, de nombreux chantiers en cours ne tarderaient pas à connaître de sérieux blocages. C'est à vrai dire tout le programme de logements dans la wilaya qui serait affecté. Pour rappel, déjà durant l'année 2008, alors que les prix du ciment n'avaient pas connu une telle flambée et que les agrégats étaient disponibles, le programme de logements a connu, selon les chiffres révélés par le DLEP lors d'un conseil de wilaya tenu au début janvier 2009, d'énormes retards. Sur les 50 187 logements, toutes formules confondues, affectés à la wilaya pour l'année 2008, seules 24 633 unités ont été achevées, soit un taux de 41,87%. Dans le même secteur du bâtiment, la wilaya de Tizi Ouzou a bénéficié dans le cadre du même programme de pas moins de 30 320 aides à l'habitat rural mais dont la grande partie n'est toujours pas livrée. Avec une pénurie de sable qui suppose une augmentation excessive des prix, puisque de toute manière la maffia du sable n'arrêtera pas pour autant de “travailler”, ces projets individuels entamés avec beaucoup de difficultés pourront-ils être achevés ? Pas sûr ! Le secteur des travaux publics dans cette wilaya où de grands projets structurants sont annoncés sera sans doute le deuxième secteur qui sera touché par la crise du sable qui se profile à l'horizon. Il est vrai que lorsqu'il s'agit de grands projets structurants, des conventions spécifiques d'extraction de sable sont élaborées à cet effet, mais souvent insuffisantes à l'achèvement de tous les projets. Il est à souligner que lorsque les autorités ont permis, en 2005, aux sablières de reprendre leur activité de façon provisoire jusqu'au 31 août 2007 avant de la prolonger jusqu'au 31 août 2009, l'argument avancé était la nécessité d'ouvrir, d'ici cette date, des carrières de substitution dans les hautes montagnes afin de permettre un approvisionnement normal des chantiers en sable. Mais, voilà que le délai en question a expiré et aucune carrière n'a pu être ouverte. Le directeur de l'énergie et des mines a expliqué récemment que pas moins de 50 avis d'appel d'exploitation de carrières sont diffusés mais, s'agissant des concrétisations, seules 13 carrières sont en exploitation en matière de tuf, de calcaire et de marbre. 6 permis d'exploitation dont deux en offshore pour le sable dans les deux régions de Tigzirt et Azeffoun ont été délivrés mais l'exploitation n'a toujours pas débuté a expliqué le même responsable qui avoue que de nombreux projets dans ce secteur risquent de rester bloqués à cause des oppositions émanant à chaque fois des citoyens des localités concernées. Ainsi donc la décision de fermer les sablières alors que des solutions de substitution ne sont pas encore mises en place, permettra peut-être, d'une part, de diminuer, mais juste diminuer le crime qui se commet quotidiennement sur l'oued Sebaou, mais risque d'autre part de pénaliser grandement le développement dans la wilaya de Tizi Ouzou. En outre, cette décision révèle au grand jour la grande incohérence dans la manière avec laquelle est géré le développement dans cette région où l'on sert beaucoup plus de discours creux que de développement au sens concret du terme.