Les suppositions de l'auteur et les quelques informations dont il fait état ont déjà été publiées dans la presse occidentale. L'Algérie pourrait prétendre au statut de puissance nucléaire. Sans trop connaître de ce “candidat possible” à ce statut, Bruno Tertrais, auteur de “Le marché noir de la bombe” dans lequel il consacre un chapitre à notre pays, conclut que l'Algérie pourrait, en disposant de l'infrastructure adéquate et des compétences, fabriquer sa bombe atomique. Peu connues, écrit l'expert, les capacités de l'Algérie sont bien réelles. Et tout le chapitre est construit sur les suppositions et les quelques informations déjà publiées dans la presse occidentale. Et même s'il considère le programme nucléaire algérien secret, l'auteur s'avance sur les possibilités de fabriquer la bombe imputant l'option aux ambitions des militaires. Bruno Tertrais qui a beaucoup travaillé sur le dossier du nucléaire pour le compte du ministère de la Défense, dit tenir l'information de l'ancien ministre algérien. “Il (le site d'Aïn Ousséra) se prêterait assez facilement à une utilisation militaire : il pourrait permettre, à partir d'uranium naturel, de produire en un an assez de plutonium de la qualité nécessaire pour une bombe”, a-t-il écrit. Mais point d'arguments. Par ailleurs, l'ambition nucléaire algérienne est inscrite au tableau de la guerre de leadership dans le monde arabe. Ainsi l'Algérie, qui dispose de l'infrastructure de la dimension de celles de l'Egypte et de l'Arabie Saoudite, serait tentée de se doter de la bombe, une première dans cette région afin d'asseoir sa suprématie. “Pour des raisons de statut, elle pourrait ne pas vouloir laisser l'Arabie Saoudite, et surtout l'Egypte, devenir la première puissance nucléaire arabe”, lit-on dans le livre. Toute la trame du chapitre s'appuie sur un chapelet de probabilités que l'auteur, pourtant un expert, conseiller et analyste, prend la précaution de conjuguer au conditionnel qui n'apporte aucune confirmation. Avec ses moyens, l'Algérie “pourrait prétendre à un programme nucléaire entièrement autonome”, écrit-il au sujet d'un programme qu'il qualifie pourtant de “secret”. Même les conclusions des inspecteurs de l'AIEA qui ont pourtant affirmé que l'Algérie ne dispose pas de l'arme nucléaire et ses installations destinées à un usage pacifique ne sont pas prises au sérieux par l'auteur qui du coup remet en cause l'Agence internationale. Car, selon lui, si l'AIEA n'a rien trouvé, c'est qu'il “est possible que certaines barres de combustible aient été retirées sans que l'AIEA soit avertie”. Et les déclarations officielles quant au but pacifique de ces acquisitions sont considérées comme de simples “prétentions”. “Alger prétend, d'ailleurs, ne pas être intéressée par l'enrichissement ou le retraitement”, dit M. Tertrais qui fait montre d'un don de lire dans les intentions et de déceler les secrets qui échappent aux autres. Et argument suprême, dans son optique, le refus de l'Algérie de signer le protocole additionnel de vérification de l'AIEA. Ce qui, de son point de vue, induit de légitimes soupçons devant mener à cataloguer l'Algérie dans la rubrique “dangereux”. “L'Algérie doit être classée dans les pays à risque du point de vue de la prolifération”, a-t-il conclu, en plus de ses relations privilégiées avec l'Iran, relations qu'il considère comme un soutien à son programme nucléaire. Et la perspective que l'Algérie se dote de l'arme nucléaire est une option inéluctable, selon lui. Car, si le FIS avait gouverné, il se lancerait dans ce projet. Comme le processus électoral a été interrompu, l'ambition est adossée aux militaires pour s'assurer de garder les rênes du pouvoir. “Comme cela a été le cas au Pakistan par le passé, à garantir la pérennité du contrôle de l'armée sur le régime”, suppose-t-il encore. Reste à savoir le but recherché à travers ce chapitre truffé essentiellement de supputations, de commentaires et de projections fantaisistes sans fondements. À moins que l'objectif soit principalement celui qu'il suggère : classer l'Algérie comme pays à risque de prolifération nucléaire. Ce que bien des pays, ceux-là mêmes qui nourrissent la campagne contre l'Algérie et coutumiers de la politique du deux poids, deux mesures et de la tolérance sélective de la prolifération nucléaire, pourraient applaudir.