Résister par la poésie peut sembler téméraire et idéaliste. Et pourtant, Mahmoud Darwich a réussi cet exploit. Une année après sa disparition et dans le cadre d'“El-Qods, capitale éternelle de la culture arabe”, l'Algérie, par le biais de l'Aarc et les éditions Barzakh, rend hommage à ce mythe à travers l'événement “Mahmoud Darwich, une vie de poésie”. L'Agence algérienne pour le rayonnement culturel (Aarc) organise en étroite collaboration avec les éditions Barzakh, du 1er au 3 octobre prochain, un événement de grande envergure et pluridisciplinaire : un hommage au chantre de la Palestine, poète de la résistance, Mahmoud Darwich, qui s'est éteint le 9 août 2008, mais dont la voix continue à s'élever toujours très haut, pour prendre en charge les âmes en peines et les cœurs des hommes à qui on a coupé des ailes. Symbole de courage et de militantisme, Mahmoud Darwish sera ressuscité, durant trois jours, grâce aux différentes activités, inscrites dans le programme de cet hommage. Ce dernier n'est pas fortuit et encore moins improvisé, puisqu'il a été porté et réfléchi par les éditions Barzakh et notamment le codirecteur des éditions, Sofiane Hadjadj, et par Rachid Koraïchi qui a commencé à travailler sur le projet d'accompagner ses gravures par des poèmes de Mahmoud Darwich, en 1981 à sa rencontre justement avec le poète à Tunis. En fait, Rachid Koraïchi a sélectionné des poèmes de Darwich écrits entre 1966 et 1984, tout en faisant appel aux calligraphes l'Irakien Hassan Massoudy et l'Egyptien Kamal Ibrahim. Ce projet a fait l'objet de plusieurs expositions, fragmentaires à chaque fois, mais à présent, il est achevé. Ainsi, Rachid Koraïchi présentera son œuvre accomplie, le 1er octobre prochain, dans le cadre d'une exposition intitulée “Une nation en exil”, au Musée d'art moderne et contemporain (Mama), et qui s'étalera jusqu'à la fin du mois. En plus de cela, un beau livre portant le même titre a été coédité par Barzakh (Algérie) et Actes Sud (France). L'ouvrage, Une nation en exil, dont la maquette a été réalisée intégralement par Barzakh, devait être prêt pour l'événement mais comme il a été imprimé en Italie, et en raison de l'entrée en vigueur de la nouvelle mesure (article 69 sur le crédit documentaire) de la loi de finance complémentaire 2009, le livre ne sera disponible qu'à la fin du mois d'octobre, donc éventuellement pour le Salon international du livre d'Alger. Pour en revenir à l'événement, en plus de l'inauguration de l'exposition, un spectacle de danse sera dispensé par Nacéra Bélaza qui excelle dans la danse contemporaine et qui proposera au public d'Ibn Zeydoun (Riadh El-Feth), une prestation qui s'inscrit dans la représentation du corps. Le deuxième jour de cette manifestation comprendra diverses activités, notamment à Dar Abdeltif. En effet, il sera d'abord question et dès 16h, d'un récital poétique dispensé par la poétesse et traductrice Inaâm Bioud, qui sera accompagnée au luth et qui choisira au gré du vent et de l'inspiration, les textes à déclamer et à dire. D'autre part, la somptueuse Dar Abdeltif accueillera deux poètes, l'un palestinien et l'autre algérien. Représentant la nouvelle génération de poètes, Najwan Darwich et Abdellah Hamel seront les hôtes de la magnifique demeure pour une résidence d'écriture d'une durée d'un mois. Dans la soirée de cette deuxième journée, la salle Ibn Zeydoun abritera un concert de Moneim Adwan Quatuor. Ce groupe palestinien, composé de différentes nationalités, dispensera un concert où se mêleront poésie et musique populaire et traditionnelle. Un voyage au-delà du temps et de l'espace grâce à d'harmonieuses mélodies et d'envolées lyriques. Le troisième et dernier jour sera consacré à un colloque dédié à la vie et l'œuvre de Mahmoud Darwich et comprendra trois volets distincts : “L'œuvre et la vie”, “Traduire Mahmoud Darwich” et “la Poésie”. Ces trois thèmes génériques tendent à dévoiler les différentes facettes de Darwich ; et à présenter le Mahmoud Darwich, enfoui dans l'imaginaire et la mémoire de chaque invité. Une sorte de résurrection, voire de mémoire contre l'oubli ! Ce colloque sera animé par plusieurs personnalités du monde de la littérature qui ont, entre autres, côtoyé, connu et tissé des liens avec le poète, notamment le poète et essayiste marocain Mohamed Bennis, l'écrivain algérien Rachid Boudjedra, la traductrice et poétesse algérienne Inaâm Bioud, la traductrice et universitaire italienne Francesca Corrao, la traductrice et universitaire espagnole Luz Gomez Garcia, l'historien, journaliste et délégué de la Palestine à l'Unesco Elias Sanbar, le directeur de la collection Sindbad chez Actes Sud, Farouk Mardam-Bey, le poète et journaliste palestinien Najwan Darwich, ou encore le journaliste libanais Abbas Beydoun. Prometteur ! c'est donc un évènement culturel important qui va être organisé, puisqu'en plus de rendre hommage à l'une des personnalités les plus nobles et les plus talentueuses, l'Algérie recevra des noms importants et déterminants sur la scène culturelle internationale. La boucle sera ainsi bouclée puisque Mahmoud Darwich est un personnage emblématique et universel. Il a réussi par son combat à exploser les frontières, braver les interdits et faire rêver les hommes, avec pour bagages deux mots… deux concepts qui se confondent avec le parcours de l'homme : courage et talent. Sara Kharfi