Assainir le commerce extérieur est devenu une tâche ardue au regard de l'ampleur du préjudice causé au Trésor public. En l'absence d'une politique globale, cohérente et audacieuse pour booster la production nationale, l'économie algérienne reste basée essentiellement sur le commerce extérieur. Il faut savoir que 25 548 sociétés activant dans l'import-export ont été recensées en Algérie, en 2008, par le Centre national du registre du commerce (Cnrc), dont 1 665 entreprises étrangères. Ainsi, au fil du temps et des circonstances, une véritable mafia, usant et abusant de méthodes illégales, s'est arrogé le droit de disposer à sa guise de ce commerce extérieur. Et les mécanismes de fraude sont bien huilés. Fausses déclarations, faux registres du commerce, prête-noms, réseautage, lobbying (dans le sens obscur du terme), corruption, trafic d'influence, rien n'est omis. À la faveur de la dernière actualisation opérée sur le Fichier national des fraudeurs (FNF), l'administration fiscale a recensé 10 324 importateurs fraudeurs, rien qu'en 2008. Durant cette même année, l'évasion fiscale sur le commerce extérieur a dépassé les 80 milliards de dinars, soit l'équivalent d'un milliard de dollars américains. Pour le premier trimestre 2009, la direction générale des douanes a répertorié pas moins de 5 167 infractions douanières, dont près de 1 200 fausses déclarations. Le bilan des douanes fait ressortir un nombre de 3 981 infractions constatées lors des opérations de dédouanement des marchandises, 1 068 infractions de contrebande et 118 infractions de change. Entre janvier et mars 2009, les infractions constatées lors des opérations de dédouanement ont englobé les fausses déclarations de valeur (1 180 infractions) et les infractions relatives aux marchandises admises en avantage fiscal par voie de réduction et exonération des droits et taxes (45 infractions). Pour remédier à cette situation et assainir les activités du commerce extérieur, toute une batterie de mesures coercitives a été mise en place. Il faut dire qu'assainir l'activité est une tâche ardue. De 1981 à ce jour, près de 400 lois, ordonnances, décrets et arrêtés relatifs à l'importation ont été inscrits au Journal officiel de la République algérienne. Sans parler des différentes réformes engagées dans le corps des douanes et autres systèmes financiers. Néanmoins, cela ne semble pas avoir dissuadé les importateurs véreux. Aussi, dans le cadre de la loi de finances complémentaire 2009, plusieurs dispositions relatives aux opérations d'importation ont été mises en œuvre. Essentiellement, il s'agit de la décision d'instaurer le crédit documentaire et celle relative à suppression de la procuration. L'article 66 de la LFC 2009 stipule que “la réalisation d'opérations d'importation ne peut être effectuée au moyen de procuration”. Cela sous-entend que seul le véritable opérateur économique, en l'occurrence l'importateur lui-même, titulaire du registre du commerce, ou le gestionnaire de l'entreprise, a la possibilité de faire sortir du port la marchandise importée. La mesure répond à une situation où malheureusement se sont développées des pratiques frauduleuses sur des opérations d'importation par l'utilisation des registres du commerce et la multiplication des procurations. En effet, beaucoup de registres du commerce sont délivrés à des personnes mais sont gérés par d'autres. L'article 69 stipule, pour sa part, que “le paiement des importations s'effectue obligatoirement au moyen du seul crédit documentaire”. En effet, le transfert libre présente beaucoup d'insuffisances du point de vue du régulateur, puisqu'il est un moyen qui permet d'inonder le marché et d'actionner une véritable pompe aspirante de la devise à l'égard de l'économie algérienne. Selon le ministre des Finances Karim Djoudi, cette mesure vise à “introduire dans ce domaine le maximum de rationalité (…) qui assure la traçabilité, le suivi et l'évaluation de la transaction”. Les pouvoirs publics ont par ailleurs décidé de lutter contre la corruption en tentant de limiter les liens des douaniers avec les importateurs et les opérateurs économiques ou carrément en écartant les uns des autres.