Alors que le processus de paix israélo-palestinien est dans l'impasse, le président de l'Autorité palestinienne, qui en est un des éléments-clés, décide de jeter l'éponge, compliquant du coup davantage la situation. S'agit-il d'une manœuvre politique de sa part ou d'un aveu d'impuissance de Mahmoud Abbas ? Très déçu par la position américaine, demandant aux Palestiniens de reprendre les négociations avec les Israéliens malgré le refus de ces derniers de geler les colonisations, Mahmoud Abbas a annoncé, jeudi, dans une conférence de presse, qu'il avait décidé de ne pas postuler à sa propre succession lors des élections générales qu'il a convoquées pour le 24 janvier 2010. “J'ai dit au comité exécutif de l'Organisation de libération de la Palestine (OLP) et au comité central du Fatah que je ne souhaite pas me présenter à la prochaine élection”, a-t-il déclaré à la presse à Ramallah. Sachant que cette décision pouvait être interprétée comme une manœuvre de sa part, le président de l'Autorité palestinienne, 74 ans, prendra le soin de souligner : “Ce n'est pas une manœuvre. J'espère que tout le monde comprendra cette décision et je vais m'efforcer de la faire comprendre.” Il ne fait aucun doute que ce retrait de Mahmoud Abbas est lié au récent échec des Etats-Unis à convaincre les Israéliens de geler complètement la colonisation dans les territoires palestiniens, car il attendait beaucoup de la venue de Barack Obama, comme le confirme sa déclaration suivante : “Nous nous sommes félicités et nous avons été optimistes lorsque le président Obama a annoncé la nécessité d'un arrêt complet des colonies.” Il n'a pas caché sa déception de ce revirement américain en ajoutant : “Nous avons été surpris par son soutien pour la position israélienne”, en référence aux récents propos de la secrétaire d'Etat Hillary Clinton lors d'une conférence de presse commune avec le Premier ministre israélien à Jérusalem. En effet, le week-end dernier, Hillary Clinton avait apporté son soutien à la position de Benjamin Netanyahu, lequel veut une reprise des pourparlers de paix avec les Palestiniens sans pré-condition tout en ne proposant qu'un gel partiel de la colonisation. Cela a été confirmé par Nabil Chaath, un important dirigeant du Fatah, qui a expliqué : “Le président Abbas a dit plus d'une fois qu'il ne veut pas être un candidat à la présidentielle en raison de son sentiment de grande frustration devant la position américaine sur le processus de paix.” Ceci étant, Mahmoud Abbas a notamment insisté sur l'importance de la question de la colonisation en affirmant : “Le problème qu'il faut résoudre, c'est qu'Israël et son gouvernement actuel rejettent tout cela.” Même si Hillary Clinton a fait marche arrière depuis, ses propos à Jérusalem ont suscité une immense surprise et de l'incompréhension, sinon de la colère, dans le camp palestinien. “Les Américains ont abandonné leurs obligations”, a déploré Nabil Chaath, soulignant au passage que les Palestiniens avaient de leur côté respecté tous les engagements envers la communauté internationale depuis l'adoption de la feuille de route en 2003. Pour rappel, la feuille de route, adoptée par le quartette pour le Proche-Orient (UE, Etats-Unis, Russie et ONU), prône notamment la coexistence au Proche-Orient de deux Etats, Israël et la Palestine, la fin des violences et de la colonisation juive. Le Hamas, qui s'est abstenu de commenter ce qu'il a appelé “une décision interne du Fatah”, ne s'est pas empêché de faire porter la responsabilité de la décision de Mahmoud Abbas sur les Etats-Unis et Israël, car : “Nous interprétons cette initiative comme un message de désaveu envers ses amis israéliens et américains après qu'ils l'ont ignoré et instrumentalisé.” Réagissant à cette annonce de retrait, la Maison-Blanche a salué dans le dirigeant palestinien Mahmoud Abbas un “vrai partenaire” des Etats-Unis, mais s'est gardée de se prononcer sur les conséquences qu'aura sa décision de ne pas se représenter à la tête de l'Autorité palestinienne. “Nous avons pour le président Abbas un respect immense ; il a été pour les Palestiniens un dirigeant important et historique, et pour les Etats-Unis un vrai partenaire”, a notamment déclaré le porte-parole du président Barack Obama, Robert Gibbs, avant d'ajouter : “Je dirai simplement que quelle que soit sa décision, nous comptons continuer à travailler avec lui.”