Des deux capitales, le Caire a perdu la bataille sportive, mais risque également de s'enliser dans une crise politique interne, et Hosni Moubarak de revoir sa copie concernant sa succession filiale. L'Egypte, tout comme l'Algérie, jouait plus qu'un match de football, même qualificatif pour la prochaine Coupe du monde, et le perdre équivaut à l'ouverture de la boîte de Pandore avec tous les risques de déstabilisation qu'elle peut engendrer dans son sillage. Le pouvoir égyptien l'a bien compris en l'assimilant à une campagne de dénigrement sans précédent contre les Algériens un mois avant le match retour. Tous les organes lourds officiels et leurs relais propagandistes, à chercher dans les networks égyptiens mais également arabes, ont grandement contribué à allumer et maintenir une flamme belliqueuse avant qu'elle ne se transforme en véritable brasier diplomatique après l'élimination de la vieillissante formation égyptienne. Si le ton haineux et méprisant est monté graduellement en s'accentuant à l'approche de la rencontre du 14 novembre, il a basculé dans l'extrémisme lourdaud et naïf des va-t-en guerre convoqués sur les plateaux télé des chaînes égyptiennes. Ainsi, on assistera, au coup de sifflet final de l'arbitre seychellois, à un véritable tir de barrage des différents commentateurs pseudo-sportifs égyptiens contre les supporters algériens présents au Soudan. L'impression d'une véritable boucherie est savamment mise en scène par les différents canaux à travers des appels téléphoniques des artistes égyptiens dépêchés par Moubarak pour soutenir leur équipe. Les supporters algériens ont même été traités de mercenaires par le dauphin au pouvoir, en l'occurrence Djamel Moubarak qui avait fait le déplacement au stade d'Omdurman, assuré de la victoire des Pharaons, sur Dream TV lors de l'émission de Khaled El-Ghandour, connu pour sa haine de l'Algérie. Nil Sport, Hayat 2 la chaîne terrestre ESC, pour ne citer que celles-là, sont en train d'entretenir une véritable campagne de dénigrement contre tout ce qui est algérien, appelant à la rupture des relations diplomatiques entre les deux pays et, pourquoi pas, selon certains intervenants, à tout bonnement se déclarer la guerre. Lorsqu'on connaît la servilité égyptienne devant l'Etat hébreu, on est en droit de se demander à quoi peut rimer une telle mascarade si ce n'est à créer de toutes pièces un ennemi à même de détourner le regard du peuple égyptien des véritables problèmes qu'il vit. Cette unanimité à s'attaquer à l'Algérie est devenue le credo de tous les présentateurs en manque de vedettariat et même le très réservé Shoubeir s'est mis de la partie, lui qui avait essayé de se la jouer pro avant de se faire rabrouer par ses confrères et même par la classe politique locale. La défaite de mercredi commence déjà à semer les germes de l'incompréhension et de la colère puisque l'opinion publique reproche, notamment au président Moubarak de n'avoir pas facilité le déplacement des supporters égyptiens pour encourager leur équipe. Pourtant, cet acharnement audiovisuel a mis à nu, si besoin est, l'incapacité des médias officiels algériens, et spécialement l'ENTV, à riposter ou à mener une contre-campagne en l'absence de télévisions privées. Un reproche quoique atténué par le droit de réserve officiel et la retenue diplomatique de ne pas verser dans l'excès, et qui reflète fidèlement la position de l'Etat algérien qui a préféré patienter et voir venir. Cette guerre médiatique a certainement boosté les ventes de la presse écrite qui a pris le relais de l'incorrigible ENTV en allant au charbon et en n'hésitant pas à faire de la surenchère. Une leçon apprise aux côtés des pratiques médiatiques égyptiennes qui excellent dans la désinformation et les faux scoops. Au secours de cette presse écrite est venu se greffer le soutien inconditionnel de Nessma TV, résolument aux couleurs nationales, ainsi que les comptes rendus professionnels de la presse française. S. O.