Tout en refusant de répondre directement et publiquement aux Egyptiens, dont le comportement demeure injustifiable comparativement à l'enjeu, qui n'est que le résultat d'un match de football, les autorités algériennes, fortement déçues par cette tournure, refusent d'entendre parler d'excuses qu'elles qualifient de pure aberration. Il faut dire qu'il n'est nullement question à Alger de présenter des regrets à l'Egypte, bien au contraire, on estime qu'on est plutôt en droit d'attendre des excuses du côté du Caire, pour la simple raison que jusqu'à preuve du contraire les autorités égyptiennes n'ont pas respecté leurs engagements d'assurer la sécurité de la délégation et des ressortissants algériens avant, pendant et après le match Egypte-Algérie du 14 novembre dernier. C'est ce qu'a révélé une source algérienne au quotidien arabophone londonien Al-Qods Al-Arabi. La principale raison de cette attitude algérienne s'explique par la conviction que les autorités égyptiennes sont derrière cette campagne anti-algérienne menée par les chaînes de télévision satellitaires égyptiennes, qui a visé le peuple, le pouvoir et l'histoire de l'Algérie. Cela a engendré une très forte déception à tous les niveaux de la société algérienne, d'où une profonde colère de la rue, dont une grande partie était branchée régulièrement sur les chaînes égyptiennes. À partir de là, l'idée de présenter des excuses n'effleure point l'esprit des responsables algériens, souligne la même source, abstraction faite de l'initiative du leader de la Révolution libyenne, Mouammar Al-Kadhafi. En effet, la colère est telle au sein de toutes les classes algériennes après le flot d'insultes égyptiennes, qui ont suivi la qualification de l'équipe nationale algérienne de football pour le Mondial sud-africain, que c'est à l'Egypte d'entreprendre des démarches pour apaiser la tension. Ainsi, les Egyptiens peuvent s'estimer heureux que les dirigeants algériens, la télévision, les radios se soient abstenus de répondre à la campagne haineuse par les télévisions, y compris publiques, du côté du Caire. Hosni Moubarak a trahi ses engagements Le président Abdelaziz Bouteflika ne décolère pas. La raison : son homologue égyptien, Hosni Moubarak, n'a pas respecté son engagement d'assurer la sécurité de la délégation et des ressortissants algériens, comme il l'avait pourtant personnellement promis après l'agression contre le bus transportant l'équipe nationale algérienne. Il aurait justifié son incapacité à le faire par “l'impossibilité de contrôler 80 millions d'Egyptiens”. Cette phrase aurait plongé Bouteflika dans une profonde colère, d'où sa décision de prendre en charge le déplacement des supporters algériens à Khartoum pour remonter le moral des joueurs de Rabah Saâdane et contrer tous les agissements des Egyptiens. Ces derniers, qui pensaient que leur sélection allait évoluer sur du velours en terrain conquis au Soudan, car écartant toute possibilité de voir les Algériens débarquer par milliers dans la capitale soudanaise, à cause du visa existant entre le pays d'accueil du match d'appui et l'Algérie, de la forte colonie égyptienne installée sur place et la facilité pour leurs ressortissants de s'y rendre, ont déchanté en voyant le nombre de supporters algériens déferlant pour soutenir les coéquipiers de Karim Ziani. L'autre déception pour Alger est l'attitude du magnat égyptien, Sawaris, qui ne respectait pas la législation bancaire algérienne, qu'il violait en transférant illégalement en Egypte 1,8 milliard de dollars US de bénéfices annuellement, outre l'évasion fiscale dont il se rendait coupable en ne versant pas régulièrement les impôts dus par Orascom Télécom Algérie. Pourtant, cette dernière avait bénéficié d'avantages, qui n'ont jamais été accordés à un autre opérateur étranger, notamment le blocage pendant deux années pratiquement de la société publique algérienne, Mobilis, qui constituait un rival pour Djezzy. Ce manque de gratitude de la part de Sawaris a conduit à l'application rigoureuse de la loi algérienne en la matière, comme l'indique ce redressement fiscal de 600 millions de dollars, dont une première tranche de 120 millions de dollars rapidement. Ainsi, les agissements des Algériens n'ont été que la conséquence logique des agissements négatifs des Egyptiens, d'où l'absence de raisons pour s'excuser auprès des Egyptiens. La diplomatie algérienne hausse le ton Par ailleurs, bien que la diplomatie algérienne agisse sans faire de bruit pour contrer cette campagne anti-algérienne des Egyptiens, Mourad Medelci, le ministre des Affaires étrangères, a répondu indirectement au discours de Hosni Moubarak, qui avait affirmé devant le Parlement égyptien que “l'Egypte ferait preuve de fermeté envers ceux qui portent atteinte à ses ressortissants”, sans pour autant citer nommément l'Algérie. L'Algérie assume sa responsabilité pleine et entière à l'égard de ses ressortissants à l'étranger, a donc déclaré le chef de la diplomatie algérienne. “L'Algérie assume sa responsabilité pleine et entière à l'égard de sa communauté établie à l'étranger. Je souhaite que cette situation douloureuse puisse être évaluée à juste titre afin que nous puissions construire un avenir meilleur”, a indiqué le ministre à la Radio nationale. C'est clair qu'il faisait allusion à la tension entre l'Algérie et l'Egypte autour de la qualification pour le Mondial, remportée le 18 novembre à Khartoum par l'Algérie (1-0). Dans cette optique, Mourad Medelci soulignera que “nous préférons travailler sur le terrain pour protéger notre communauté à l'étranger, notamment celle qui nécessite une attention particulière dans certaines régions”. Plus explicite, il ne manquera pas d'ajouter que cette attention particulière “s'oriente aujourd'hui vers nos frères en Egypte, étudiants, résidents et familles mixtes algéro-égyptiennes auxquels nous devons prêter toute l'aide et l'assistance dont ils ont besoin”. Le ministre émettra le souhait que “cette situation douloureuse puisse être évaluée à juste titre afin que nous puissions construire un avenir meilleur”. Ceci étant, des hommes politiques, et des responsables de partis algériens, envisagent de lancer prochainement une initiative de soutien à Abdelkader Hadjar, l'ambassadeur d'Algérie au Caire, qui fait l'objet d'une campagne de dénigrement de la part des autorités locales.