Les lots de vaccins entreposés dans les bureaux risquent à longue échéance de subir des dégradations en raison de la non-disponibilité de moyens frigorifiques La grève illimitée entamée depuis déjà plus d'un mois par les praticiens de la santé, exerçant au sein de l'établissement hospitalier de la ville de Maghnia, a provoqué un tel pourrissement au sein de ce dernier que de nombreuses familles originaires de diverses daïras frontalières émettent de vives inquiétudes pour leurs malades ou blessés évacués en urgence en direction de l'unique centre hospitalier de la région. Plusieurs dizaines de familles accompagnant les malades ou les blessés en attente devant le service des urgences de l'hôpital ne savent plus à quel saint se vouer. À l'intérieur de l'établissement hospitalier, seuls les agents de nettoiement faisaient les cent pas dans les couloirs. Il nous fut impossible de joindre le responsable de l'établissement ou un quelconque docteur. Seul un jeune médecin de garde, enfermé dans un bureau sur la porte duquel est placardé un énorme écriteau en carton sur lequel est écrit en grosses lettres majuscules “En grève”, donnait des consultations se soldant immanquablement par des ordonnances médicales ou une orientation en direction du centre hospitalier du chef-lieu de wilaya distant de plus d'une soixantaine de kilomètres. Un père de quatre enfants sortant fraîchement du bloc opératoire auquel nous avons rendu visite sur son lit d'hôpital fut sauvé in extremis grâce à l'intervention d'un médecin activant dans le privé, relatent des membres de sa famille rencontrés sur place. “Nous sommes venus ce matin en urgence, révèlent ces derniers et après consultation, le médecin urgentiste nous a fait savoir que les fortes douleurs que notre fils ressentait au bas-ventre étaient dues à des problèmes rénaux et qu'il fallait nous adresser à un spécialiste du privé”. Nous perçûmes cette forme de non-recevoir chez ce médecin comme une certaine façon de se débarrasser de nous, confient nos interlocuteurs en poursuivant : “Nous fumes obligés de transporter de nouveau notre fils qui était tombé en syncope chez un médecin du privé, un ami de la famille,exerçant en ville qui après l'avoir examiné, nous fit savoir que notre fils souffrait d'un ulcère perforé à l'estomac et que son état nécessitait une intervention chirurgicale de toute urgence. Ce praticien dut intervenir en personne pour l'admission de notre fils en réanimation”, révèlent nos interlocuteurs. Des indiscrétions émanant du milieu hospitalier nous signalent notamment le cas d'une jeune maman, originaire de la daïra de Béni Boussaïd, qui sur le point d'accoucher, s'est vue refuser l'accès au service maternité, déserté par son personnel médical pour cause de grève. En quittant le service des urgences, un mot d'ordre émanant du Syndicat national des praticiens de la Santé publique(SNPSP) placardé sur la porte en verre de sortie du service retient notre attention. Sur celui-ci on lit : “Il est décrété par le Syndicat national des praticiens de la Santé une grève de trois jours par semaine reconduite toutes les semaines par une durée de trois jours consécutifs et ce depuis le 04/01/2010”. Nous quittons à présent l'hôpital pour nous rendre dans une école d'un quartier populaire de la ville où devrait avoir lieu à l'heure actuelle une campagne de vaccination scolaire. D'emblée, le directeur de l'établissement soulève un problème crucial lié à cette “grève des médecins” et qui ne cesse de triturer la conscience de ce responsable au sein de l'Education. Il s'agit, en fait, nous déclare-t-il, “de la fiabilité du stock de vaccins actuellement entreposé dans mon bureau et destiné à la vaccination des jeunes élèves de l'école. Nous n'avons pas les moyens frigorifiques pour la conservation de ce genre de produits qui risque à longue échéance de subir des dégradations. Je ne suis pas certain que cette campagne de vaccination en milieu scolaire ne sera pas être sans danger pour nos jeunes écoliers, d'ailleurs, de nombreux parents d'élèves m'ont fait dernièrement la remarque”, précise notre interlocuteur. De nombreux patients n'ont même pas les moyens de payer leurs consultations, révèlent certains spécialistes du privé et encore moins les moyens de s'offrir les services d'une clinique privée. Selon l'un d'eux, le mépris affiché ouvertement par leur tutelle a été très mal perçu par l'ensemble du personnel médical de l'hôpital qui refuse catégoriquement de soigner les citoyens. “L'idée de basculer dans le privé ou bien celle d'aller carrément exercer leurs compétences à l'étranger commencent déjà à germer chez nombre d'entre eux”, avoue amèrement notre interlocuteur.