Dans sa lettre, le ministre s'interroge sur les véritables motivations de cette protesta alors que le gouvernement, selon lui, s'est engagé à répondre favorablement aux revendications de revalorisation des salaires avec effet rétroactif applicable à partir de janvier 2008. Sortie inattendue, mais ô combien importante à plus d'un titre pour le secteur de l'éducation, dont certains syndicats annoncent à nouveau la reprise de la protesta à partir de cette semaine. “Lorsqu'on considère que le ministère de l'Education nationale est le premier secteur à avoir élaboré, en associant l'ensemble des partenaires socioprofessionnels, un projet de régime indemnitaire allant dans le sens de l'amélioration de la condition salariale des enseignants, on peut s'interroger sur les véritables motifs de ces menaces”, écrit Boubekeur Benbouzid, ministre de tutelle, procédant dans sa longue missive adressée hier aux rédactions à une sorte de rétrospective explicative. “Au moment même où les pouvoirs publics sont en voie de finaliser le dossier du régime indemnitaire du secteur de l'Education nationale, certains syndicats d'enseignants brandissent encore et de manière systématique des menaces de grève”, dira-t-il, non sans étonnement certain, devant cette attitude, rappelant à l'occasion que le gouvernement s'est engagé, par un communiqué rendu public le 15 novembre 2009, à répondre favorablement aux revendications de revalorisation des salaires avec effet rétroactif applicable à partir de janvier 2008. À noter que le dossier du régime indemnitaire a fait l'objet d'une prise en charge sans délai par le MEN. Il a été mené à un rythme soutenu dans le cadre du groupe de travail mixte MEN/syndicats, mis en place le 17 novembre 2009. Ensuite, des propositions ont été soumises à la commission ad hoc, installée par le gouvernement dès le mois de décembre 2009. Ce travail est actuellement en phase finale. Les décisions du gouvernement seront annoncées prochainement. L'effet rétroactif concernera toutes les primes, y compris l'indemnité d'expérience professionnelle et pédagogique (IAPP), depuis janvier 2008. “Aussi, quand bien même ce dossier a été déjà au sein du groupe de travail MEN/syndicats, il a été de l'intérêt des enseignants d'accorder aux pouvoirs publics le temps nécessaire d'une décision devant s'inscrire dans le processus global de valorisation des salaires de l'ensemble des agents de la Fonction publique”, martèlera-t-il. Tantôt expliquant, tantôt avertissant, quant aux conséquences incalculables aussi bien pour les élèves et leurs parents que pour la famille éducative dans son ensemble, le ministre n'ira pas par quatre chemins pour faire comprendre que brandir des menaces de grève, accentuer la pression, en tentant de provoquer des décisions hâtives pour le secteur de l'éducation, et qui ne pourraient qu'être déconnectées du processus global engagé par le gouvernement, desservira inévitablement la cause des enseignants. Aussi, Benbouzid, en guise d'argument ultime, rappellera que “les dégâts” de la grève de trois semaines, lancée le 8 novembre 2009, qui a affecté le programme pédagogique, notamment les classes d'examen, ne sont pas encore rattrapés que le spectre d'une nouvelle grève est de nouveau agité à plus forte raison quand les pouvoirs publics ont bel et bien décidé d'augmenter les salaires des enseignants, actuellement au stade des dernières retouches. De ce fait, rien, selon l'avis du ministre, ne peut justifier le recours à une grève supplémentaire qui aura pour conséquence une diminution irrémédiable des capacités des élèves à faire face aux examens annoncés. “Il est, tout de même, regrettable de constater que le secteur de l'éducation nationale, un secteur aussi stratégique nécessitant d'être à l'abri de toute perturbation et protégé par tous les acteurs de la société en vue d'assurer sa stabilité, soit continuellement contraint à faire face, de manière récurrente, à des actions aussi extrêmes que les grèves”, déplorera le premier responsable du secteur de l'éducation, en insistant que le recours systématique aux grèves vient non seulement contrarier les efforts d'amélioration continue des performances de notre système éducatif mais contribue également à saper et à annihiler les efforts quotidiens consentis par la majorité des enseignants. Il ne manquera d'ailleurs pas de rappeler dans ce message particulier que durant toutes les périodes de perturbations, son département a toujours privilégié le dialogue et la concertation avec ses partenaires socioprofessionnels. De même que dans un réel souci d'apaisement, il a souvent fait preuve de magnanimité en annulant ses propres mesures coercitives prévues par la réglementation à l'égard des grévistes comme les retraits sur salaire, les mesures disciplinaires, les retraits de plaintes de justice… Sur un dernier mot d'apaisement, Benbouzid clôt cet appel à peine voilé en invitant les enseignants à évaluer les avancées passées et à venir, en matière d'augmentation des salaires, mais également de mesurer les effets de la survenue d'un nouveau débrayage.