La Ligue algérienne de défense des droits de l'homme (LADDH), présidée par Mustapha Bouchachi, a finalement organisé son troisième congrès, les 25 et 26 mars derniers, à Alger. Placé sous le thème “Agissons pour la levée de l'état d'urgence”, celui-ci ne s'est pas tenu, comme prévu, à la Mutuelle des matériaux de construction de Zéralda, mais à la Maison des syndicats, à la Glacière (Hussein-Dey). Jeudi, lors d'un point de presse, le porte-parole du congrès, Aïssa Rahmoune, a révélé que ce n'est qu'à moins de 24 heures du congrès que le refus des autorités de la wilaya d'Alger a été signifié “sans aucun motif”. “On avait élaboré deux plans, A et B. Avec l'interdiction de tenir le congrès à la Mutuelle de Zéralda, on a alors utilisé le plan B, c'est-à-dire le siège de la Maison des syndicats”, a-t-il précisé. M. Rahmoune n'a pu échapper à la question de la crise qui secoue la LADDH, divisée en deux ailes, celle de Hocine Zehouane, élu en septembre 2005, et celle de Mustapha Bouchachi. En réalité, la crise de légitimité s'est installée, à partir de novembre 2007, à la suite de l'élection de Me Bouchachi à la présidence de la Ligue, par un conseil national d'urgence, en présence de Me Ali Yahia Abdennour. Depuis cette date, les deux parties en conflit se rejettent la responsabilité et se disputent le droit de représenter la Ligue. Le 3e congrès de la LADDH, aile Bouchachi, a réuni quelque 154 délégués. Il a vu la présence du FFS, de la Ligue tunisienne des droits de l'homme, du Conseil national tunisien du respect des droits de l'homme, du réseau euro-méditerranéen des droits de l'homme et de la Fédération internationale des droits de l'homme, ainsi que des représentants du corps diplomatique en Algérie (France, Etats-Unis, Suède et Canada) et le délégué de l'Union européenne, également ambassadeur d'Espagne à Alger. Dans son intervention, Me Bouchachi a estimé que l'arrêt du processus électoral, en 1992, a été “fatal pour les libertés et les droits de l'homme” en Algérie. Il a également souligné que la décennie 1990 s'est distinguée par des “atteintes massives aux droits de l'homme”, des “arrestations arbitraires” et des “tortures”, pointant un doigt accusateur en direction des services de sécurité. Il a aussi abordé le problème des disparus et la nécessité de faire connaître la vérité. Pour Me Bouchachi, depuis l'année 2000, “il y a moins de tortures, mais il y en a encore”. De plus, a-t-il noté, il y a “un verrouillage du champ politique”, des “atteintes aux libertés politiques et syndicales”, sans omettre de parler des violations à la liberté de la presse. “Si nos aînés ont récupéré le territoire (algérien), notre devoir à nous est de libérer les hommes, les femmes et les jeunes”, a-t-il indiqué. Plus tard, le président sortant de la LADDH est revenu sur la crise de la Ligue, déplorant que Me Zehouane ait “refusé de se plier aux textes de la LADDH et aux choix des militants”. “Nous sommes la Ligue légitime”, a-t-il appuyé, sous des applaudissements. Le discours du président d'honneur de la LADDH, Yahia Abdennour, a été plus virulent. L'ancien ministre sous Boumediene s'en est pris violemment contre le ministre de l'Intérieur et des Collectivités locales, soutenant que Yazid Zerhouni “s'est acharné contre la LADDH” durant la décennie écoulée, faisant ainsi “revivre le temps de la colonisation”. Me Abdennour a, à son tour, abordé le problème des deux branches de la LADDH, rappelant que Me Bouchachi a été élu, en 2007, par “une majorité de plus de trois quarts de ses membres (du Conseil national)”. Il a ensuite attaqué le régime politique algérien, considérant que celui-ci traverse aujourd'hui “l'épreuve la plus dure depuis son installation par la violence, en 1962”. Ce membre fondateur du FFS a, en outre, fait part de ses appréhensions quant à l'avenir de la société, estimant que l'année 2010 “est à la fois celle de tous les dangers et de tous les espoirs”. L'autre intervention remarquée est celle du secrétaire général du FFS, Karim Tabbou. Réitérant son appui à l'aile Bouchachi, ce dernier a indiqué que le combat de son parti et celui de la LADDH “se confondent”, puisqu'il s'inscrit dans le cadre de “la construction d'un Etat démocratique et d'un Maghreb démocratique”.