Ce n'est pas tant parce que le Fonds monétaire international (FMI) s'est invité dernièrement au débat sur les mesures d'urgence prises par l'Algérie en s'élevant contre la suppression des crédits à la consommation que je note le retour en force de cette institution. Paradoxalement, le fait qui a attiré mon attention c'est le recours au FMI par l'Union européenne en vue de le faire participer au “dispositif de soutien en dernier ressort” à l'économie de la Grèce. Je dis paradoxalement parce que les grands pays de l'UE considéraient, il n'y a pas si longtemps, que le recours au FMI doit être seulement réservé aux pays en développement incapables selon eux de gérer leurs finances publiques, nécessitant ainsi des programmes d'ajustement structurels (PAS) particulièrement “musclés”. Cette “implication substantielle” mais non majoritaire du FMI dans le traitement des déficits budgétaires et de la balance de paiements des pays concernés membres de l'UE n'est pas une première. La première exception à la « règle » a été la Roumanie qui avait dû faire appel dans l'urgence aux ressources du FMI pour alimenter sa balance des paiements. Mais peut-être que la Roumanie est encore considérée comme un pays périphérique de l'UE car nouveau pays membre. Là il est question des pays membres du “premier cercle” s'agissant non seulement de la Grèce mais peut-être aussi ,si la situation l'exige, “des autres pays de l'UE dans le même cas” (Espagne, Portugal, Italie, etc.). Le compromis autour de ce mécanisme de soutien à la Grèce a tardé à se mettre en place car l'Allemagne ne voulait pas payer seule l'ardoise. Il s'est fait aussi sur fond de divergences entre la France et l'Allemagne quant aux politiques économiques de soutien à la croissance à mener au sein de l'UE. Ainsi l'Allemagne affiche clairement son désaccord sur le modèle français de relance à travers la consommation et l'investissement public. La France, quant à elle, remet en cause le modèle allemand basé sur la rigueur budgétaire, l'épargne et l'exportation. Dans l'élaboration de ce compromis c'est en fait l'Allemagne qui a pesé le plus car c'est elle qui a non seulement fait entrer le FMI dans le dispositif financier mais a aussi introduit un “droit de regard sur les déficits nationaux”. Les partisans d'une Europe politique et économique forte redoute ce recours au FMI, qui va probablement s'élargir aux autres pays membres en difficulté budgétaire, en le présentant comme l'entrée du “loup dans la bergerie”. Même si ces deniers se consolent en disant qu'il ne s'agit que “d'un problème budgétaire et non monétaire”, il n'en demeure pas moins que la valeur de l'euro est menacée par les autres devises avec une perspective decennale d'une croissance au sein de l'UE d'un point au maximum, ce qui n'arrange pas les choses. Faudra-t-il pour autant commencer à s'inquiéter chez nous ? Oui et non. Non parce que nos fondamentaux monétaires et financiers sont solides.Malgré la crise financière internationale et ses effets en Algérie les réserves de changes n'ont pas été entamées et ont même légèrement progressé pour atteindre 149 milliards de dollars à fin 2009. Non plus aussi parce que les crédits bancaires affectés au financement de l'économie- sans tenir compte du rachat par le Trésor public des créances non performantes- ont augmenté de 18,51% en 2009. Ces chiffres sont ceux que Mohamed Laksaci, Gouverneur de la Banque d'Algérie, a donné, lors de sa réunion avec les PDG de banques, dans son rapport intitulé “tendances monétaires et financières du second semestre 2009”. Il est vrai qu'on aurait pu faire un peu mieux puisque le Conseil de la monnaie et du crédit avait prévu le taux de 22 à 23%. Par contre et dans le même temps, oui on devrait s'inquiéter parce que l'économie réelle ne tire pas suffisamment profit de cette situation financière favorable. Ainsi à ce jour, seules 120 entreprises ont été déclarées éligibles au « nouveau programme de soutien » mis en place par le ministère de l'industrie et de la promotion des investissements (MIPI). C'est trop peu face aux besoins du marché. Oui aussi on devrait s'inquiéter car la pression à la baisse sur le moyen terme des prix des hydrocarbures va continuer. Ainsi le recul français sur l'instauration de la taxe carbone n'est que tactique et a été surtout dû à des résistances internes institutionnelles et sociales. En fait la France a demandé et apparemment obtenu que l'UE instaure cette taxe pour notamment “by- passer” ses obstacles internes. Les Etats-Unis continuent quant à eux l'exploitation sur leur territoire du gaz naturel non conventionnel. La preuve ils viennent de confier à la compagnie norvégienne Statoil un permis d'exploitation dans une zone gazeuse de schiste. Pour tout vous dire ma crainte, sur une décennie au moins, ne réside pas dans le retour aux conditionnalités FMI ou autres injonctions de quelque pays ou groupe de pays, elle réside dans notre incapacité à utiliser le levier de notre épargne monétaire et celui de nos ressources humaines pour diversifier de façon compétitive notre économie. En vérité le problème est en nous. La solution aussi.