Résumé : Mohamed vient de faire connaissance avec un citadin. Ce dernier lui prodigue des conseils et ira même jusqu'à lui proposer du travail. Mais, méfiant, le jeune homme ne s'aventure pas à donner tout de suite sa réponse. 25eme partie Mohamed retrouve sans difficulté le maréchal-ferrant dans la ruelle indiquée. Il fait examiner les talons de son cheval et remettre en place un fer qui s'était détaché et dont le clou pénétrait dans la patte de l'animal. La journée avançait. Le jeune homme avait faim, mais il dut se contenter de grignoter un bout de galette et quelques figues sèches. Il ne devait surtout pas gaspiller son argent dès son arrivée dans cette grande ville qui avait cet aspect terrifiant des villes qu'on ne connaît pas. Il se promène longuement à travers les quartiers et les jardins publics et constate que les quelques Européens qu'il rencontrait au gré du hasard le regardait avec étonnement. C'est que malgré son aspect, le jeune homme avait beaucoup d'allure. Il débouche sur un petit port de plaisance, et hume l'air frais de la mer. Ah ! C'est donc ça la grande bleue ! Il n'avait jamais encore vu de port de sa vie et fut étonné de remarquer les petites barques amarrées çà et là et qui tanguaient au gré du vent. Plus loin, c'est le port industriel. Reconnaissable à la grande activité qui y régnait et aux cargos qui chargeaient et déchargeait des conteneurs de marchandises. C'est par là que les émigrés transitent pour partir en France, se dit-il. La nuit étendait ses ténèbres. Mohamed remonte vers la ville et se renseigne auprès d'un jeune garçon qui lui indiqua un hammam situé non loin de là. Il s'y dirige puis s'arrête au beau milieu de son chemin. Et son cheval ? Il regarde à droite et à gauche et remarque un attroupement. Un orgue de barbarie jouait une mélodie. Mohamed est attiré par cet air un peu étrange mais très agréable. Il s'arrête un moment pour écouter. Le musicien semble maîtriser son instrument et quelques passants jetaient des pièces d'argent dans un chapeau déposé près de lui. Soudain, Mohamed sentit une main s'introduire tout doucement dans la poche de son pantalon. Il laisse la main se glisser jusqu'au bout puis abattit la sienne sur elle et tira de toute ses forces. Un jeune premier d'à peine une quinzaine d'années se met à gigoter, tout en essayant de se débarrasser de son étreinte. Mohamed l'empoigne par la taille et le jette par terre avant de mettre son pied sur son ventre. Se désintéressant du joueur d'orgue, les passants s'attroupèrent autour de Mohamed et du gamin. - Bien joué, jeune homme, lui lance un vieux monsieur tout de noir vêtu. Ce garçon n'est pas à son premier coup et mérite une bonne correction. - On vient à peine de le relâcher de prison, et il recommence encore son coup. - Sale voleur ! s'écrie une dame dont le chapeau descendait sur les yeux. C'est bien toi qui t'ai enfui avec mon panier hier au marché. Mohamed écoutait tout ce monde sans dire un mot. Pour lui, l'incident était clos. Il avait donné une bonne leçon au garçon et maintenant, il n'avait qu'à le relâcher. Il retire son pied et le gamin s'empresse de se relever. Il le prend alors par le collet et l'entraîne loin de là. - Monsieur… Monsieur… Où m'emmenez-vous, je n'ai rien fais de mal. - Tu as essayé de me voler et tu dis n'avoir rien fait de mal ? Le gamin brandit son bras en avant en s'essuyant les yeux : - Je… je vole parce que j'ai faim. Je n'ai pas mangé depuis trois jours. - Hein ? Et tu crois que tu vas me faire avaler ça, petit voyou ? - Je te jure que c'est la vérité. - Tu n'as donc pas de famille ? - Si, j'ai une mère et deux petites sœurs. - Et ton père ? - Il est mort il y a deux ans, écrasé par une diligence. Y. H. (À suivre)