Quelques minutes après la projection du film Hors-la-loi, les centaines de journalistes qui ont eu juste le temps de savourer un café offert par un grand sponsor du festival, se sont rués vers la salle où a eu lieu la traditionnelle conférence de presse des réalisateurs. Des dizaines de bodyguards en costume beige sont là pour vérifier les badges (rose pour la presse internationale, jaune pour la presse française). Là, c'est une véritable organisation qui se met en place. Les caméras sur un petit balcon, les journalistes assis et les photographes ont quelques minutes pour prendre des photos avant de disparaître. Sur la tribune, l'équipe du film est au complet. Le réalisateur Rachid Bouchareb et les producteurs du film : Le Français Jean Bréhat, l'Algérien Mustapha Orif et le Tunisien Tarek Benamar. Et bien sûr les comédiens principaux du film : Roshdy Zem, Samy Boujailia, Jamel Debbouze et surtout Chafia Boudraâ qui est désormais passée du statut d'artiste national à celui de vedette internationale assumant des interviews en français. Cette conférence de presse très attendue a été ficelée par l'équipe de communication du film, comme un point de presse présidentiel. Le politique pour le réalisateur, la coopération pour les producteurs, la comédie et la satire pour Debbouze, l'expérience pour Roshdy Zem et l'humain pour Chafia Boudraâ. C'est Rachid Bouchareb qui interviendra le premier en remerciant le délégué général du festival, Thierry Frémieux, qui a défendu et soutenu le film devant toute cette polémique. Rachid Bouchareb dira à ce propos : “C'est exagéré, le film n'est pas un champ de bataille. Il y a un abcès et maintenant l'abcès a été percé… ouvrons le débat”. Le réalisateur déclare que “le passé colonial reste tendu, invitant les protagonistes à ouvrir le débat constructif vers l'avenir en regardant bien le passé”. Et d'ajouter : “Mon métier c'est de faire des films. Le film est là, alors discutons.” Rachid Bouchareb a profité de cette première sortie médiatique pour dénoncer toutes les allégations sorties depuis la sélection du film au Festival de Cannes, indiquant qu'il n'a jamais reçu de pression de Matignon qui l'empêche de placer le film sous l'étendard algérien. Il reconnaît toutefois qu'il a reçu des pressions de milieu d'extrême-droite, pour retirer le film du festival. Rachid Bouchareb ajoute que ce n'est pas du courage que de faire ce film, c'est plutôt faire du cinéma. Jamel Debbouze, qui a beaucoup fait de cinéma lors de cette conférence de presse, a déclaré d'un ton sérieux que cette polémique est le fait que la république et le colonialisme ne font pas bon ménage. Enfin Chafia Boudraâ, lala Aïni de Dar Sbitar, a, pour la première fois de sa vie de comédienne, reçu sa première salve internationale d'applaudissements quand elle a déclaré qu'“en Algérie, on m'a surnommée la mère de tous les Algériens à cause de mon interprétation dans un feuilleton, je suis en fait dans le film à travers ce rôle, la mère de toute l'humanité, car ce qui compte avant tout pour une mère, ce sont ses enfants”. Rachid Bouchareb a enfin mis l'accent dans son intervention sur l'importance de la coproduction algéro-française, qui intervient quelques mois seulement après la signature de l'accord de coproduction entre l'Algérie et la France, précisant que le même scénario a été proposé aux deux parties sans que quelqu'un change une ligne du scénario. La conférence de presse s'est achevée sans incident et quelques journalistes qui demandaient la parole sont restés sur leur faim, puisqu'ils ont été empêchés par le modérateur Henri Béhar, de poser d'autres questions sur un film qui n'a pas encore fini de faire parler de lui.