Comme nous l'avait déjà annoncé Rachid Bouchareb, le film Hors-la-loi n'a pas été récompensé. Le réalisateur était à Paris et il n'a pas reçu d'appel l'invitant à se rendre à la cérémonie de clôture. “C'est une tradition au Festival de Cannes, nous confie un journaliste français habitué des coulisses. Quand un réalisateur n'est pas invité à la clôture, cela signifie qu'il n'a reçu aucun prix.” Le Festival de Cannes a donné une véritable leçon à l'Algérie, préférant attribuer le Grand Prix au film de Xavier Beauvois Des hommes et des dieux. Le long-métrage a été re-projeté aux festivaliers le jour de la clôture, dans une salle archicomble et acquise à la cause de ce film humain, aux arrière-pensées politiques. Une manière pour le festival d'annoncer la couleur et surtout de pousser les journalistes à écrire encore sur ce film émouvant, mais très critique envers le pouvoir algérien. Une des scènes du film, largement suggestive, transporte cette vision du “qui-tue-qui” : le chef des moines est invité à la caserne pour identifier le corps du terroriste qui leur a rendu visite au monastère. Ce dernier, emporté par un élan de sympathie pour le chef terroriste, commence à prier pour lui. Une attitude qui provoqua la colère du militaire. Le réalisateur, Xavier Beauvois, voulait, par cette scène, montrer que les moines avaient de la sympathie pour les terroristes et de la colère envers les militaires. L'autre grande claque pour l'Algérie, c'est le prix du jury accordé au film tchadien, Un homme qui crie de Mohamed Salah Haroun, qui n'a pas cessé de dire que son pays n'a pas de cinéma. Le film Hors-la-loi, qui est techniquement et historiquement mieux loti que le film tchadien, était un bon candidat pour recevoir ce prix. Mais voilà, le Festival de Cannes à travers ce prix voulait récompenser le Tchad, étant une ancienne colonie française. C'est plus pour encourager ce pays qui a autorisé l'implantation d'une base militaire française sur son sol que de récompenser le cinéma tchadien, qui avec Un homme qui crie propose un beau film, mais techniquement modeste. Le cinéma algérien est reparti bredouille, après avoir tenu en haleine plusieurs mois le festival de Cannes.