Le cours de l'histoire tracé par la proclamation du 1er Novembre et la plate-forme de La Soummam a été dévié. C'est à l'occasion du 48e anniversaire du déclenchement de la Guerre de libération que les délégués de la coordination interwilayas des archs se sont réunis à Ighil Imoula vendredi dernier. Après un recueillement sur les lieux où la proclamation du 1er Novembre a été élaborée, les délégués de l'Interwilayas ont rédigé une déclaration politique à travers laquelle il est souligné que le cours de l'histoire, tel que tracé dans la proclamation du 1er Novembre mais aussi le Congrès de La Soummam a été dévié de sa trajectoire initiale, mais aussi pour dire que le mouvement citoyen s'est assigné la mission de poursuivre le combat des aînés. “La déclaration de Novembre 1954, rédigée à Ighil Imoula, a été l'acte qui a tracé la voie à une Révolution qui aspirait à rompre les liens avec le colonisateur et à redonner véritablement sa souveraineté à un peuple fier et digne. Ce dernier en a payé le tribut par le sang, et rares sont les peuples qui peuvent s'enorgueillir de tels sacrifices pour le recouvrement de leurs indépendances. Malheureusement, ce combat libérateur pour lequel les meilleurs fils de l'Algérie se sont sacrifiés a été dévoyé après 1962, date qui devait consacrer le principe de la légitimité populaire et son corollaire la primauté du politique sur le militaire, adopté au Congrès de La Soummam comme un des fondements de la construction de l'Etat algérien”, ont annoncé les délégués de l'Interwilayas qui poursuivent : “C'était l'espoir du peuple algérien, mais les prémices des dérives annonciatrices d'un lendemain sombre étaient déjà présentes pendant la Guerre de libération puisque la liquidation d'hommes d'honneur et de valeur qui voulaient que la Révolution n'accouche pas d'un régime dictatorial sonnait comme un avertissement à toute velléité de contrecarrer les visions putschistes d'un clan qui avait fomenté le projet funeste pour notre pays. C'est ainsi que les aspirations populaires ont été toutes étouffées après l'indépendance grâce à un instrument politique qui a été utilisé pour consacrer un régime dictatorial sans partage”. Le mouvement citoyen accuse le pouvoir de ne pas avoir su répondre aux aspirations populaires après les évènements d'octobre 88 : “Octobre 1988 pour lequel d'autres sacrifices ont été consentis n'a été finalement utilisé par le pouvoir maffieux et assassin que comme une poudre aux yeux permettant juste d'amorcer l'étape de la démocratie de façade qui lui permettrait de perdurer tout en s'achetant l'image d'un régime ayant évolué aux yeux de l'opinion internationale. Le peuple a vite compris que les tenants du pouvoir étaient arc-boutés à leurs privilèges et n'entendaient point aller dans le sens des aspirations populaires. Le désenchantement qui a gagné les esprits après octobre 88 a enfanté indirectement le mouvement citoyen”. Les rédacteurs de la déclaration indiquent que le rôle du mouvement citoyen est de réhabiliter l'histoire longtemps confisquée par les tenants du pouvoir algérien : “Comme avant 1954, la colère a longtemps couvé pour donner naissance à un mouvement qui veut se réapproprier l'Histoire et lui donner son véritable sens. C'est un mouvement qui s'inscrit dans la durée parce que la lutte ne peut être qu'ardue et c'est un mouvement qui a une dimension nationale parce que tous les Algériens partagent aujourd'hui le même idéal de justice, de dignité et de démocratie. C'est un mouvement qui s'est doté d'une plate-forme de revendications qui se veut un espoir pour le peuple algérien qui veut en finir avec ce pouvoir corrompu et corrupteur. Le mouvement citoyen obéit à une logique historique dans le sens où il aspire à un changement radical”. Revenant aux élections massivement rejetées par la population, les délégués de l'Interwilayas estiment que “c'est pour cela que la décision unanimement partagée de rejeter les élections a été prise pour la seconde fois afin d'empêcher le pouvoir de garder une image vendable au niveau international. En sus, le rejet des élections locales s'inscrit dans la logique de redonner à l'élu toutes les prérogatives que lui confère une loi qui s'inspire d'une Constitution réellement démocratique. Jamais le pouvoir algérien n'a été mis à mal comme il l'a été après l'opération de rejet des élections, quand bien même il a ourdi un complot visant à faire de la Kabylie le théâtre d'affrontements fratricides. Le peuple algérien vient de démontrer à la face du monde que son aspiration au changement est réelle, et ceux qui s'efforcent de ghettoïser ce combat doivent méditer le taux de participation aux élections, politiquement très faible, pour être imputé à un quelconque autre facteur. C'est un désaveu clair du pouvoir qui, malheureusement, continue dans sa logique autiste et refuse de faire une traduction juste des pulsions de la société. Le combat d'aujourd'hui n'est pas uniquement celui de la Kabylie qui aspire, avec humilité, à jouer son rôle pour une prise de conscience nationale active, permettant l'instauration de la démocratie. C'est le combat de tout le peuple algérien qui veut assumer aujourd'hui son destin. En consentant d'énormes sacrifices pour l'indépendance du pays d'abord et pour la démocratie ensuite, il démontre qu'il a atteint cette maturité politique lui permettant d'exercer pleinement la démocratie”. C'est donc à un changement radical que le mouvement citoyen aspire. “Au pouvoir de saisir le sens de l'histoire et de reconnaître que le peuple ne peut plus être considéré comme mineur et ne peut aussi se satisfaire d'un simulacre de changement. Ses aspirations sont légitimes et ni le pouvoir, ni ses relais ne peuvent les comprimer indéfiniment et impunément. La flamme de novembre est devenue inextinguible et les enfants du Printemps noir ont hérité indirectement du flambeau de ceux de novembre pour ne point le lâcher jusqu'à la satisfaction pleine et entière de la plate-forme d'El-Kseur explicitée à Larbaâ Nath-Irathen. C'est le salut de l'Algérie qui aspire, à l'instar d'autres pays moins nantis en matière de sacrifices, à renouer avec la stabilité qui ne peut être que la conséquence certaine de l'instauration d'une véritable démocratie. Honneur et gloire aux martyrs de Novembre 54 et de la démocratie, ulac smah ulac, le combat continue”, conclut la déclaration. K. S. Membre influent de l'interwilayas Zahir Benkhellat arrêté • Le délégué de la commune d'Akbou, M. Zahir Benkhellat, a été arrêté, hier matin, vers 9h, par des éléments de la Police judiciaire (PJ) en civil, au moment où il s'apprêtait à rejoindre son lieu de travail au lycée du 20-Août-1956 de la ville d'Ighzer-Amokrane, à 60 km à l'ouest de Béjaïa. Selon les témoignages recueillis auprès des citoyens de cette localité, ce commando de policiers, dépêché depuis la sûreté de wilaya spécialement pour appréhender ce membre de l'interwilayas des archs, guettait, dès la matinée, l'arrivée de ce dernier au niveau de cet établissement où il devait donner son cours de tamazight prévu de 9h à 10h. Intercepté aux alentours du lycée par des policiers embusqués dans les parages, ce membre influent du mouvement citoyen de Kabylie a été aussitôt conduit au commissariat central de la ville de Béjaïa où il sera mis en garde à vue, en attendant sa comparution devant le magistrat instructeur. À l'heure où nous mettons sous presse, nous n'avons aucune information sur le sort réservé à ce délégué-enseignant de la langue amazighe.