Résumé : Après le décès de Malek, Yasmina s'installe dans l'ancienne maison de ses parents. Deux années plus tard, Mohamed manifesta le souhait de prendre la mer. Malgré ses réticences, Yasmina céda et son fils devint marin… 71eme partie Ils prirent donc le même bateau, qui devait accoster à Marseille pour un déchargement de blé. L'apprenant, Yasmina leur remettra la clef de son appartement en leur recommandant de ne rien déplacer, car elle avait l'intention de s'y rendre elle-même un de ces jours et aimerait retrouver les lieux tel qu'elle les avait laissés. Fier et curieux de pouvoir enfin retrouver le lieu de son enfance, Farid embrasse sa mère sur le front et lui promet de ne pas toucher à quoi que ce soit. - Un de ces matins, je te prendrai avec moi sur mon bateau. Et nous ferons la traversée ensemble. - Inch'allah mon fils, lui répondit Yasmina sans trop de conviction. Mohamed serre sa mère dans ses bras au moment de la quitter et versa même quelques larmes. Cette maman exemplaire avait tant souffert et tant lutté pour faire d'eux ces hommes cultivés et fiers qu'ils étaient devenus. Mohamed goûta à la joie de naviguer sur un bateau de marchandises dont il était le capitaine. L'élève était devenu maître. En un laps de temps très court, il sut gagner l'estime et le respect de tout l'équipage. À l'instar de Farid, il était un homme bon et juste. Son grand cœur, sa bravoure et son sérieux finiront par le propulser à plus haute échelle. Quelques mois plus tard, il décroche le même grade que son frère, qui avait pourtant mis des années pour y arriver. Dès leur arrivée à Marseille, une seule idée taraudait leur esprit : visiter l'appartement de leurs parents. Farid s'était remémoré quelques souvenirs enfantins. Mohamed, qui n'avait encore jamais vu ni Marseille ni rien d'autre, est tout remué devant les souvenirs de son frère. Il repense aux récits de sa mère et à la justesse de ses descriptions. Les lieux, bien qu'empoussiérés et livrés aux toiles d'araignées, étaient restés tel qu'on les lui avait décrits. Il ouvrit les portes des chambres, se rendit dans la petite cuisine, où traînaient encore un tablier de sa mère et même une tasse de café toute noircie. Son père avait dû se verser un café avant d'embarquer pour le retour au bled et avait laissé cette tasse à moitié vide sur le potager depuis plus d'une vingtaine d'années. Farid demeure un long moment devant la grande bibliothèque qui contenait tant d'ouvrages. Il se rappelle que sa mère passait de longues heures à lire dans ce même salon et qu'elle l'avait elle-même encouragé à en faire autant. C'est peut-être dans ces mêmes livres d'histoire et de géographie que son amour pour la mer et les voyages avait pris racine . Il prend un ouvrage et se met à le feuilleter. - Notre jeune frère sera heureux d'avoir cette bibliothèque à sa disposition, n'est-ce pas Mohamed ? Mohamed sourit. - Tel que je le connais, il ne sortira pas de ce salon, avant d'avoir tout lu. Cela lui aurait pris des mois, mais il ne se serait même pas rendu compte. Farid se met à rire. - Heureusement qu'il a hérité de cette passion. Si notre jeune frère décroche les meilleures notes de son école, c'est en grande partie grâce à ses nombreuses lectures. - Oui, tu peux le dire. C'est un véritable rat de bibliothèque. Il tournèrent encore un moment dans l'appartement, puis ressortirent pour prendre un peu d'air. Ils flânèrent dans la ville phocéenne qui grandissait à vue d'œil depuis la fin de la guerre et Farid entraîne Mohamed dans un dédale de quartiers anciens qui n'en finissait pas. - Tu vas humer cette odeur perceptible à l'entrée de ces escaliers en pierres taillées. Tu ne remarques donc rien Mohamed ? Le jeune homme sourit. - Cela me rappelle un peu notre quartier au bled. - C'est ça. Sauf qu'ici, ce quartier est plutôt l'apanage de quelques familles italiennes. (À suivre) Y. H.