Résumé : Mon cousin Fayçal partagera mes premières années d'enfance. C'était mon souffre-douleur. Pourtant, je l'aimais beaucoup, et lorsqu'il me quitta, j'en eus beaucoup de chagrin… 81eme partie Ma grand-mère me consola de son mieux et me promet de demander à ses parents de le laisser passer les prochaines vacances parmi nous. Mais je ne revis Fayçal que des années plus tard, alors que je venais de boucler mes 17 ans et lui ses 18 ans. L'adolescent grand, svelte et athlétique, n'avait plus rien du garçon chétif de mes souvenirs. Moi, de mon côté, j'avais énormément changé. J'étais cette brunette aux yeux rêveurs, qui ne passait pas inaperçue. Il en était tombé amoureux au premier regard. Mais devant l'œil vigilant de ma grand-mère, il s'abstint de tout commentaire, et nous passâmes des vacances au bord de la mer, où nous nous donnâmes à cœur joie à la natation et au tennis. Fayçal repartit à la fin des vacances, promettant de m'écrire tous les jours. Je n'étais pas particulièrement attirée par lui, car à cet âge, j'avoue que j'avais une réelle répugnance pour les garçons blonds. Mais le jeune homme souffrait du mal d'amour, et quelques années plus tard, il revint demander ma main. La chose me paraissait tellement incroyable que j'en restais bouche bée. Fayçal était certes un cousin, un ami, un confident, mais je ne l'avais jamais imaginé comme mari. Jamais au grand jamais je n'avais imaginé qu'un jour, il ressentira d'autres sentiments pour moi en dehors de cette amitié qui nous a toujours liés. Je venais de terminer mes études et entamais une carrière professionnelle. Le mariage pour moi n'était pas encore dans mes projets. Encore moins avec ce cousin, qui me rappelait mon enfance et ma tendre jeunesse. Ma grand-mère m'en parla, mais quand elle remarqua que cette proposition ne m'intéressait pas, elle me prit dans ses bras pour m'avouer qu'elle aussi n'avait pas apprécié ce geste. Et qu'elle ne m'en avait fait part que parce qu'elle voulait connaître mon opinion. D'ailleurs, elle voyait d'un mauvais œil les mariages de famille. Je poussais un soupir de soulagement. Ma grand-mère venait de prendre la meilleure décision qui soit à mon encontre. Mon père, par contre, ne m'adressera pas la parole des jours durant, arguant du fait que je ne connaissais pas mon bonheur. Il aimait beaucoup Fayçal et le citait en exemple devant mes frères. Certes, mon cousin avait de l'avenir. Il venait de décrocher son doctorat en archéologie et ne comptait pas s'arrêter là, d'autant plus que plusieurs propositions de travail lui avaient été déjà faites dans certains pays arabes et même européens. Mais je jugeais qu'aussi instruit et intellectuel qu'il était, il demeurera pour moi cet enfant qui a partagé mes jeux, sans plus. Fayçal finira par comprendre. Il me tint un discours des plus flatteurs pour me signifier que j'étais devenue non seulement une belle femme, mais que j'avais beaucoup de personnalité et qu'il admirait mes positions. Il repartit en France le cœur lourd, bien que j'eus tenté de lui faire entendre raison et que je lui rappelais même la petite fille sans cœur d'autrefois, qui ne ratait aucune occasion pour l'humilier. Rien n'y fait. Il revint à la charge à maintes reprises, mais ni ma grand-mère ni moi-même n'avions l'intention de changer notre position. Il fallait des années à ce cousin pour m'oublier. Enfin, voyons que je ne bronchais pas, il consentira à prendre femme. Une étrangère, comme l'on s'y attendait, bien que la plupart des filles de la famille n'avaient d'yeux que pour lui. Je ne le revis que bien plus tard, lors du décès de ma grand-mère. Alors qu'il avait lui-même beaucoup de chagrin, il trouvera les mots justes et les gestes apaisant pour alléger un tant soit peu ma peine. (À suivre) Y. H.