“Tu vois, maman, ces élèves ont retrouvé leur école et leurs enseignants car ils entendent et ils parlent. Ils ne sont pas comme nous”, tel est le commentaire gestuel qui donne la chair de poule d'un enfant sourd-muet scolarisé à l'école de Mohammadia en suivant, hier, le JT. Lui, comme le reste de ses camarades de classe, n'a pas eu cette chance. Son école entrave l'aboutissement d'un projet utopique et devrait, selon les autorités, être rasée, et ses “occupants” répartis entre différents autres établissements. Ainsi, au deuxième jour de la rentrée scolaire, les enfants handicapés scolarisés à l'école de jeunes sourds de Mohammedia n'ont toujours pas repris. Leurs classes auxquelles ils se sont adaptés sont toujours fermées. Hier, personnel administratif et enseignants, élèves et leurs parents ont fait le pied de grue dans la cour de l'école dans l'attente d'une improbable bonne nouvelle ou d'une visite “officielle” à même de mettre fin à ce qu'ils qualifient de “cauchemar”. Mais, au bout de la longue attente sous un soleil de plomb et les réclamations des enfants privés de nourriture et de toilette, point d'espoir. Personne ne réagit à l'appel de détresse lancé par près de 170 enfants sourds-muets qui ne réclament que leur droit constitutionnel à l'enseignement. Brandissant des pancartes où l'on pouvait lire : “Ayez pitié des sourds-muets” ; “Ne nous privez pas d'enseignement”…, les enfants ont surpassé leur handicap en poussant des cris de colère et en faisant des gestes pour expliquer qu'ils ne veulent pas quitter les lieux et se séparer des enseignants qui leur ont tenu la main pour les aider à combler leur handicap par la réussite de leur cursus scolaire. En témoigne le taux de réussite de 100% enregistré l'an dernier à l'examen de l'ex-6e. “Cette réussite est le fruit de plusieurs années de labeur et d'adaptation. Elle ne peut être possible par le transfert de l'enfant brisé psychologiquement”, avertissent les psychologues et les enseignants. Et c'est cette crainte de priver leurs enfants déjà pas très gâtés par Dame Nature d'une voie, en l'occurrence celle des études qui sauverait leur avenir, à l'image de ces anciens élèves de l'EJS qui ont réussi à décrocher leur bac grâce au soutien de leurs enseignants. Ils sont venus, hier, pour apporter leur soutien à tout le personnel de l'école et prendre part à toute éventuelle action de protestation qui serait adoptée. Idem pour la Fédération nationale des sourds-muets d'Algérie dont le président et le SG se sont déplacés, hier, à l'école pour afficher leur soutien. Mieux, nous dira le SG, “nous allons envoyer aujourd'hui (hier, ndlr) une lettre au ministre de tutelle pour exposer le problème”. La longue attente a été mise à profit pour discuter des prochaines actions de protestation. Hier, les protestataires devaient investir la rue mais ils ont décidé d'opter pour une démarche afin de permettre à leurs enfants de reprendre les cours. En effet, il a été décidé à l'unanimité de tenter de récupérer les clés des salles de classe et de reprendre le travail dès cette matinée. Un appel est lancé aux autorités “pour reporter la fermeture ou la démolition de l'école d'une année, le temps de trouver une autre solution”. Espérons que cet appel trouvera un écho favorable pour permettre à ces enfants de retourner en classe.